CAPITAINE NOLUKHANYO NDLELENI, FORCE DE DÉFENSE DU LESOTHO
La participation des femmes dans la Force de défense du Lesotho (LDF) est cruciale. Elles constituent environ 16 % du personnel en uniforme et elles se retrouvent à tous les grades, depuis les niveaux d’entrée jusqu’à celui de brigadier. Mais les femmes ne travaillent pas seulement dans les « services de soutien » des forces armées. Elles sont aussi déployées dans les unités de combat et une majorité d’entre elles sont affectées dans les bataillons d’infanterie. En plus de leurs nombreuses tâches au sein de la LDF, elles offrent un service désintéressé à d’autres secteurs au-delà du militaire, en améliorant les conditions de vie des personnes de la communauté, notamment les enfants.
Ce pays de 30.000 kilomètres carrés et approximativement 2 millions d’habitants possède peu de préoccupations de sécurité internationale mais la LDF fait face à un grand nombre de problèmes concernant la sécurité nationale. Sa tâche principale consiste à protéger l’intégrité territoriale et la souveraineté du pays, tout en soutenant aussi la constitution. Les patrouilles à la frontière avec l’Afrique du Sud sont l’une des responsabilités quotidiennes de la LDF. Les soldats surveillent certains points sensibles pour empêcher les traversées illégales et les vols de bétail, ainsi que la contrebande des armes à feu et du cannabis. La LDF assure aussi la sécurité des installations publiques telles que les barrages.
Elle joue un rôle secondaire pour assister les autres ministères de l’État. Lors de catastrophes naturelles telles que les fortes chutes de neige, elle travaille avec l’autorité de gestion des catastrophes du pays pour aider les personnes vulnérables. En outre, les personnes de plus de 70 ans ont droit à une pension mensuelle de vieillesse qui est versée dans approximativement 300 lieux de paiement dans le pays. La LDF livre l’argent à ces centres de paiement par voie aérienne et y assure la sécurité.
Au cours des derniers mois, le personnel de la LDF a participé aux efforts liés au Covid-19 en effectuant le dépistage des ressortissants sothos retournant d’Afrique du Sud et d’autres parties du monde, dont la plupart utilisent des passages frontaliers non officiels. Les soldats assurent aussi la sécurité des installations de quarantaine.
Il est estimé que le revenu national brut du Lesotho est égal à 3.319 dollars US par habitant, ce qui est relativement élevé pour un pays en voie de développement. Mais la répartition de la richesse est très inégale. L’une des conséquences principales de cette inégalité est le taux élevé de pauvreté dans le pays. Environ 57 % de la population vit sous le seuil national de pauvreté.
À cause de ces réalités démographiques, le Lesotho nécessite des gens qui peuvent penser différemment, des gens qui sont désireux de servir plutôt que d’être servis. Les femmes de la LDF ont décidé de maîtriser leur combativité pour œuvrer au-delà des limites de leurs tâches habituelles.
INSPIRÉES À AGIR
Un incident tragique a servi d’inspiration pour que ces femmes assument une nouvelle responsabilité, celle d’aider les personnes les plus vulnérables du pays : les enfants orphelins.
C’est en 2010 qu’une femme soldat de la LDF, mère d’un jeune garçon, a été assassinée par l’homme qui vivait avec elle. Après le décès, le garçon n’avait pas d’autre membre de la famille qui pouvait prendre soin de lui, mais il a été rapidement adopté. Lorsque les femmes soldats ont contemplé le caractère tragique de cet événement, elles ont trouvé des moyens de soutenir les familles qui élèvent les orphelins. Elles ont établi un système pour empêcher la répétition de l’événement en offrant aux femmes soldats un moyen d’obtenir un counseling lorsqu’elles sont victimes d’abus. Les femmes soldats ont considéré la situation au-delà de l’affaire de 2010 pour rechercher des cas similaires et ont rallié les assistants sociaux pour aider les femmes de la LDF.
Toutes les femmes, à l’exception de celles qui suivent une formation de recrutement, participent à la prise en charge des orphelins et des enfants défavorisés du pays. Elles le font en collectant de l’argent pour en faire don aux enfants, ainsi qu’avec des donations d’articles personnels tels que les serviettes hygiéniques, les vêtements, les fournitures scolaires et autres articles.
Grâce à ces contributions mensuelles, les femmes soldats et officiers sont déterminées à affronter les problèmes sociaux de la communauté tels que la pauvreté, l’analphabétisme et le grand nombre d’enfants rendus orphelins par le VIH/sida, parmi beaucoup d’autres. L’une des façons pour ces femmes de collecter des fonds dans le but de soutenir les enfants est de pratiquer des activités appelées mokhibo, danse traditionnelle des groupes féminins exécutée à genoux pendant les célébrations. Les femmes font des représentations de danse et vendent les tickets d’admission pour obtenir des fonds. Elles acceptent aussi les vêtements et autres donations d’articles à ces événements.
Les femmes exécutent une autre danse sotho traditionnelle appelée litolobonya, forme de chanson et de danse pour les jeunes filles et les femmes mariées seulement. La version de la litolobonya pour les jeunes filles peut être dansée à l’extérieur et observée par tout le monde. Toutefois, la version pour les femmes mariées est tout à fait secrète. Elle est dansée uniquement par celles qui ont accouché d’un bébé en vie et seulement devant d’autres femmes lors d’une présentation appelée pitiki.
Les femmes de la LDF acceptent des donations d’argent et de produits. Les orphelins reçoivent chaque année des articles nécessaires tels que les fournitures scolaires, les vêtements, la nourriture et autres donations. Les orphelins du personnel militaire peuvent avoir accès à des services de santé à l’hôpital militaire Makoanyane. Jusqu’à présent, toute l’aide provient des salaires des femmes soldats de la LDF et du prix des admissions aux représentations de danse. Aucun financement extérieur n’a été utilisé jusqu’à maintenant.
Pendant combien de temps ces efforts continueront-ils ? Il s’agit de quelque chose qui est fait par gentillesse, et non pas dans les limites des paramètres des obligations normales. Ces femmes ont démontré un service désintéressé, une discipline, un engagement et un dévouement envers la positivité. Elles ont aussi créé une façon d’assurer que leurs efforts soient gérés correctement. Leur initiative est bien structurée avec un comité de 14 membres pour superviser leurs efforts. Il est composé de femmes soldats de la LDF et d’une civile du département de comptabilité. Il possède une présidente, son adjointe, une secrétaire, deux trésorières, un officier des relations publiques et 8 membres qui représentent diverses unités de la LDF.
Ces femmes ont reçu un soutien inconditionnel de la part de leurs supérieurs de la LDF. La nature de leurs travaux humanitaires exige qu’elles s’éloignent de temps à autre de leurs fonctions officielles et les commandants les ont assistées en autorisant cette flexibilité. En 2019 le lieutenant-général Mojalefa Letsoela, commandant de la Force de défense du Lesotho, a remis des donations au nom des femmes lors de la célébration du Mois des femmes africaines, en démontrant ainsi son soutien aux efforts des femmes soldats.
Ces femmes ont démontré non seulement leur amour, mais un amour altruiste, pour leur pays et ses habitants les plus vulnérables. Un vrai soldat met en premier la sécurité des autres. Les efforts de ces soldats restent ignorés la plupart du temps. Le fait qu’elles aient consacré leur vie à l’amélioration de la vie des autres est une inspiration. Elles devraient être applaudies pour aller toujours plus loin en faisant don de leur argent et de leur temps pour affronter ces questions sociales importantes.
Bien qu’il ait commencé à un niveau bas, cet effort s’est développé pour aboutir à quelque chose dont les femmes de la LDF, et de tout le Lesotho, peuvent être fières.
Au sujet de l’auteur : Le capitaine Nolukhanyo Ndleleni est membre de la Force de défense du Lesotho depuis 2003. Elle a suivi une formation d’élève officier en 2009-2010 à l’académie de formation des officiers en Inde, où elle a reçu le prix du meilleur étudiant international ainsi que beaucoup d’autres prix. Elle détient une maîtrise en administration des affaires de l’école commerciale Wits à Johannesbourg (Afrique du Sud) et elle fait des études de doctorat à cette même école, avec une spécialisation en investissement social militaire. Elle est mariée et mère de deux enfants.