Africa Defense Forum

Des recherches montrent l’importance de la coopération dans la lutte contre la pêche illégale

PERSONNEL D’ADF

Le Liberia et le Sénégal ont pris une mesure importante dans leur lutte pour mettre fin à la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN) en février lorsque ces deux pays ont signé un protocole d’accord pour promouvoir et faciliter la coopération de l’inspection de la pêche et opérations associées.

Les experts en sécurité maritime favorisent depuis longtemps la collaboration dans la lutte contre la criminalité en mer, comme l’a souligné Pew Charitable Trusts dans un récent rapport intitulé : « Pour mettre fin à la pêche illégale, les pays doivent œuvrer ensemble ».

La coopération est cruciale pour faire face à la pêche illégale parce que « personne ne possède à lui seul les ressources nécessaires, en particulier les pays en développement, pour affronter cela en termes de capacité et de compétence », déclare à ADF Dan Schaeffer, directeur des efforts de Pew visant les pêches internationales et la sécurité maritime.

Le rapport de Pew a souligné le travail de FISH-i Africa, partenariat de huit pays (Comores, Kenya, Madagascar, Maurice, Mozambique, Seychelles, Somalie et Tanzanie) qui réunit les autorités de police nationales, les organisations régionales et les experts techniques et juridiques internationaux pour combattre la pêche INN dans l’océan Indien occidental.

« Ils ont convenu tous de travailler ensemble ; c’est quelque chose qui est plutôt informel », déclare M. Schaeffer à propos de FISH-I Africa.

Mais c’est efficace. Grâce à la mise en commun des informations et la coordination régionale,  FISH-i Africa a prévenu les activités de pêche illégales et empêché les acteurs de la pêche illégale d’utiliser les ports régionaux.

M. Schaeffer raconte l’un des premiers succès de FISH-i en 2012, lorsqu’un navire battant pavillon sud-coréen appelé le Premier a été surpris en train de pêcher illégalement au Liberia.

À la suite de discussions entre les autorités du Liberia et de la Corée du Sud, et le récit des activités du navire sur les médias, le Premier est parti pour l’océan Indien occidental.

Les pays d’Afrique de l’Est connaissaient les antécédents du navire avant qu’il n’arrive, grâce aux informations partagées entre les états participant à FISH-i.

Entre janvier et mars 2013, le Kenya et le Mozambique ont refusé d’accorder une licence de pêche au Premier. Les officiels ont découvert une lettre contrefaite à bord du navire, soi-disant écrite par les autorités libériennes, exonérant le navire de toute infraction, selon Stop Illegal Fishing, l’organisme sans but lucratif basé au Botswana qui a créé FISH-i.

D’autres pays ont bientôt suivi le chemin du Kenya et du Mozambique. Les Comores ont déclaré qu’elles refuseraient d’accorder une licence de pêche au Premier ; Maurice et les Seychelles ont refusé au navire la permission de décharger sa prise dans leurs ports et la Tanzanie a refusé de renouveler sa licence de pêche. En avril 2013, les propriétaires du Premier ont versé au gouvernement du Liberia une amende d’un million de dollars.

En décembre 2013, le navire a été rebaptisé l’Adria. Il a été rééquipé et mis à niveau pour satisfaire à la réglementation et il est retourné aux Seychelles. Il est resté sous observation par les pays de FISH-i jusqu’à 2017 au moins et aucune autre activité illégale soupçonnée n’a été signalée, selon Stop Illegal Fishing.

Le rapport de Pew a aussi décrit les avantages potentiels de l’Accord du Cap. On anticipe que cet accord adopté en 2012 par l’Organisation maritime internationale sera mis en œuvre cette année. Il définit les normes des navires de pêche et comprend une réglementation conçue pour protéger les équipages et les observateurs de pêche. Il n’existe pour le moment aucune réglementation de sécurité obligatoire pour les navires de pêche.

Ceci est un problème en Afrique de l’Ouest, où naviguent 40 % des chalutiers illégaux du monde. Selon une étude du Center for Ocean Solutions à l’université Stanford, l’Afrique de l’Ouest est l’un des points sensibles du monde pour les abus des travailleurs sur les navires pratiquant la pêche illégale.

La région est aussi l’épicentre mondial de la pêche illégale, principalement pratiquée par les navires de pêche chinois. L’Afrique de l’Ouest perd annuellement une somme estimée entre 2,3 et 9,4 milliards de dollars à cause de la pêche INN. Selon la Financial Transparency Coalition, le continent perd 11,5 milliards de dollars annuellement du fait de la pêche illégale.

Le rapport de Pew affirme que la coordination régionale peut aider les pays à lutter contre des activités illégales spécifiques telles que le transbordement, pratique consistant à transférer le poisson entre un navire de pêche et un cargo frigorifique. Cette pratique, appelée aussi « saiko », permet aux navires d’éviter les limites imposées sur leur prise.

Selon l’Environmental Justice Foundation, cette pratique a fait perdre, rien qu’au Ghana, 100.000 tonnes de poisson en 2017.

En fin de compte, chaque gouvernement a ses propres responsabilités et ses plans pour mettre fin à la pêche illégale, mais leur mise en œuvre sans consulter les pays voisins limite leur efficacité, selon le rapport de Pew.

« L’augmentation de la coopération régionale et la coordination est une mesure difficile mais nécessaire pour aider à éradiquer la pêche INN, améliorer la santé des océans et apporter des avantages, y compris une crédibilité internationale, à tous les États engagés », écrivent Katherine Hanly et Tahiana Fajardo Vargas, auteurs du rapport.

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