PERSONNEL D’ADF
J’enseigne aux rois l’histoire de leurs ancêtres, pour que la vie des anciens puisse leur servir d’exemple, parce que le monde est vieux mais le futur naît du passé.
Ce sont les mots du griot (conteur) Djéli Mamadou Kouyaté dans la première section d’une histoire orale de Sundiata Keïta, premier dirigeant de l’Empire du Mali. Cette histoire orale, transmise par les griots mandingues depuis 800 ans, s’appelle l’Épopée de Sundiata.
Aucune histoire orale n’est entièrement exacte mais l’épopée est vérifiée en partie par les textes des voyageurs musulmans qui visitèrent l’empire, là où se trouvent aujourd’hui le Mali et le Sénégal.
L’épopée commence vers l’an 1200 avec une prophétie selon laquelle le descendant d’un chef appelé Maghan Kon Fatta accomplirait de grandes choses. Mais cette prophétie ne se réaliserait que si le chef épousait une femme particulièrement laide. Lorsque deux chasseurs présentent une femme bossue avec des yeux « monstrueux » à la cour de Maghan Kon Fatta, il se souvient de la prophétie et épouse en secondes noces cette « femme-buffle ». En 1217, elle met au monde un fils, Sundiata Keïta, qui dans son enfance ne peut pas marcher et est décrit comme un enfant obtus et stupide.
Le chef Maghan meurt lorsque Sundiata a 7 ans, et le demi-frère de Sundiata devient chef. La plupart des versions de l’épopée disent que Sundiata et sa mère ont peur de la façon dont ils seraient traités par le nouveau chef et partent en exil. À ce moment, Sundiata commence à s’épanouir. L’épopée déclare que, à l’âge de 10 ans, Sundiata « était un garçon plein de vigueur ; ses bras avaient la force de 10 hommes et ses biceps inspiraient la peur chez ses compagnons ».
Sundiata et sa mère se rendent à la cour du chef de Méma, un petit royaume de l’Est. Sundiata devient bientôt un favori du chef qui le nomme son adjoint.
Lorsque Sundiata apprend que sa tribu natale a été conquise par un roi voisin, il part en guerre à la tête de la moitié de l’armée de Méma, en formant une coalition avec les royaumes voisins.
Pendant la bataille, on dit que Sundiata tue le roi envahisseur avec une flèche empoisonnée. Cette victoire marque la première étape de Sundiata dans l’établissement de ce qui allait devenir l’Empire du Mali, région prospère d’Afrique de l’Ouest.
À ce moment, il est connu sous le nom de « roi-lion ».
L’épopée du griot dit que Sundiata était intelligent et fort. Le grand nombre de chefs qui l’avaient précédé savaient mieux conquérir que gouverner et Sundiata voulait créer quelque chose de plus durable. Il savait que son empire devait être autonome, et il s’assura donc que ses agriculteurs cultivent des haricots, du riz et plus tard du coton. Il dirigea son empire comme une législature, chaque tribu ayant un représentant à sa cour. Il combina sa foi musulmane avec les religions locales et devint célèbre pour posséder une magie puissante.
Il est décédé vers 1255, alors qu’une tradition orale de son histoire a déjà pris racine. Ses successeurs continuent à développer son royaume, depuis l’océan Atlantique jusqu’au fleuve Niger, au Nord jusqu’au Sahara et au Sud jusqu’au golfe de Guinée. Le royaume commence à décliner vers 1400.
Aujourd’hui, l’Épopée de Sundiata fait partie de la culture des républiques du Mali, de la Gambie, de la Guinée et du Sénégal. Elle est enseignée aux enfants dans les cours d’histoire. Le griot Djéli Mamadou Kouyaté conclut sa narration de l’épopée en déclarant que même un grand chef comme Sundiata ne pouvait pas savoir tous les secrets et toute la sagesse que possèdent les griots eux-mêmes :
Partout, j’étais capable de voir et de comprendre ce que mes maîtres m’enseignaient, mais entre leurs mains j’ai juré d’enseigner seulement ce qui doit être enseigné et de cacher ce qui doit rester caché.