I l est normal pour des professionnels de la sécurité de considérer leur tâche au sens classique. Ils sont formés pour défendre les frontières, protéger le pays et repousser les menaces internes et externes. Mais au début des années 1990, un nouveau terme a commencé à se répandre : la sécurité humaine.
En 1994, l’Organisation des Nations Unies a codifié ce concept en établissant que la sécurité doit inclure la protection contre les maladies, la famine, la criminalité, les conflits sociaux, le chômage, la répression politique et les risques environnementaux. La sécurité « a davantage concerné les États-nations que les gens », a constaté l’ONU dans son rapport annuel sur le développement humain. « Les soucis légitimes des gens ordinaires ont été oubliés ».
Le moment est venu d’essayer de comprendre la sécurité humaine et de la mettre en œuvre. L’Afrique connaît une croissance sans précédent qui pourrait déboucher sur un doublement de sa population d’ici 2050. La génération qui atteint sa majorité aujourd’hui est ambitieuse, créative, maîtrise les nouvelles technologies et promet de porter le continent vers de nouveaux sommets. Cependant, si les jeunes n’ont pas d’emploi ni de possibilités de poursuivre leurs rêves, ils risquent d’être frustrés. Des tendances récentes montrent que les jeunes gens désœuvrés deviennent des migrants ou tombent entre les mains de recruteurs de groupes extrémistes.
Il y a d’autres problèmes. Le changement climatique et des conditions météorologiques imprévisibles aggravent les catastrophes naturelles et déciment les terres agricoles. Les gardiens de troupeaux doivent aller toujours plus loin en quête de pâturages, et se retrouvent en conflit avec les paysans. D’importants mouvements migratoires des zones rurales vers les villes modifient déjà le paysage du continent. Dans les années à venir, la concurrence pour l’accès à l’énergie, à l’eau et à la nourriture sera un souci majeur pour la sécurité humaine.
Le rôle que joueront les armées dans la solution de ces problèmes de sécurité humaine différera d’un pays à l’autre. Certains pays demanderont à leur armée de prendre part à des initiatives sanitaires, de planter des arbres et de travailler à des projets d’infrastructure pour améliorer l’accès à l’eau. Parfois, il sera demandé à l’armée de jouer un rôle prépondérant ; dans d’autres cas, elle soutiendra les efforts de la société civile.
Une chose est sûre : les stratèges militaires doivent comprendre comment les enjeux de la sécurité humaine peuvent entraîner des conflits, de sorte qu’ils soient mieux à même de réagir lorsqu’il sera fait appel à eux. En donnant la priorité à l’individu, aucun des problèmes de sécurité du 20e siècle ne sera trop difficile à surmonter.
—-Personnel de l’état-major unifié des États-Unis pour l’Afrique