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À cause de la surexploitation, les pêcheurs ghanéens n’ont « pas de moyen de subsistance »

PERSONNEL D’ADF

Sous un ciel nuageux, des pêcheurs ghanéens dans une pirogue en bois s’efforcent de remonter leurs filets de pêche dans les eaux agitées à 17 km de la côte.

Malgré plusieurs heures de lutte, les filets sont presque vides.

Nana Kwentsiar, pêcheur du village côtier d’Elmina, a déclaré à la chaîne de diffusion Deutsche Welle (DW) : « Je ne suis pas du tout content aujourd’hui. Nous n’avons pas pris [autant de] poisson que nous anticipions. »

À cause de la surexploitation illégale par les chalutiers industriels étrangers, le plus souvent en provenance de la Chine, les stocks de poissons du Ghana baissent fortement. Les stocks de petits poissons pélagiques tels que la sardinelle ont baissé de 80 % au cours des vingt dernières années. L’une de ces espèces appelée sardinella aurita a déjà entièrement disparu.

Nana Kwentsiar pêche depuis l’âge de treize ans. Il a dit à DW qu’il est difficile de poursuivre cette activité.

« Nourrir l’équipage et ravitailler la pirogue en carburant est maintenant un endettement pour moi, dit-il. Parfois, nous partons à la pêche pendant deux semaines et nous n’attrapons rien. Mais c’est notre métier ; nous ne pouvons donc pas nous arrêter. Le problème principal auquel l’industrie de la pêche fait face concerne les activités des navires chinois. »

Une enquête conduite par l’Environmental Justice Foundation a révélé que 90 % des navires de pêche actifs au Ghana appartiennent à des sociétés chinoises, qui agissent souvent par l’intermédiaire de sociétés de façade. Le pays perd annuellement 50 millions de dollars à cause d’accords opaques avec des sociétés étrangères, selon l’enquête.

La Chine, qui régit la flotte de pêche en eaux distantes la plus vaste du monde, cible les eaux d’Afrique de l’Ouest depuis plusieurs décennies. La Chine est aussi le pire contrevenant mondial de la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN), selon l’indice de pêche INN.

Au Ghana, les résultats sont catastrophiques.

Les pêcheries marines du Ghana soutiennent plus de 2,7 millions de personnes, soit près de 10 % de la population. Plus de 100.000 pêcheurs et 11.000 pirogues sont actifs dans le pays, mais le revenu annuel moyen a baissé jusqu’à 40 % par pirogue artisanale au cours des quinze dernières années, selon la fondation.

« Si les navires industriels qui pêchent dans nos eaux territoriales sont contrôlés, l’industrie peut se rétablir », déclare Nana Kwentsiar à DW.

Le manque de poisson a fait grimper les prix, ce qui provoque l’insécurité alimentaire et des disputes bruyantes dans les marchés de poissons.

Ama Sam, qui vend du poisson à Elmina, déclare à DW : « La pêche est notre seule profession. En ce moment, nos enfants ne peuvent pas aller à l’école. Nous avons un emploi seulement si les pêcheurs attrapent suffisamment de poisson. C’est comme ça que nous pouvons prendre soin de nos enfants. Mais en ce moment, il n’y a pas de moyen de subsistance. »

L’Union européenne a donné au Ghana un « carton jaune » en mai dernier lorsqu’elle a conclu que le niveau de développement du pays et son engagement contre la pêche INN étaient insuffisants. Ce carton jaune est un avertissement selon lequel des sanctions pourront être imposées si le pays n’améliore pas ses efforts pour mettre fin à la pêche INN.

Le Ghana a répondu en exigeant que les sociétés qui sont actives dans le pays renouvellent leur demande de licence de pêche pour pouvoir continuer leurs activités. Le gouvernement a aussi annoncé à la mi-septembre des plans pour examiner les vides juridiques concernant les licences, qui laissent les sociétés étrangères fonctionner illégalement.

En réponse, la Commission des pêches du Ghana a averti les sociétés actives dans l’industrie de la pêche au chalut du pays de faire de nouvelles demandes de permis de pêche pour continuer à travailler dans les eaux territoriales.

Pour aider à préserver les stocks de poissons, le Ghana a exhorté en décembre les pays voisins à mettre en œuvre des périodes de fermeture de pêche coordonnées. Le même mois, le Ghana a conclu un accord avec le Bénin et le Togo pour mettre en œuvre un programme conjoint d’observation des pêches pour réduire la pêche INN dans la région.

En février, le président Nana Akufo-Addo a annoncé que le Ghana mettrait en œuvre un plan d’action national pour limiter la pêche INN. Le plan comporte des moyens pour certifier plus efficacement les prises de poissons et améliorer les inspections des ports et des plages, ainsi que pour conduire des patrouilles en mer, selon un reportage de Business Ghana.

« Nous achevons nos travaux sur notre étude de gouvernance des océans et nous mettons en œuvre les structures et les processus requis pour nous assurer d’accomplir notre plan des océans durables en 2025, selon les prescriptions du panel de haut niveau sur l’économie des océans », a dit M. Akufo-Addo.

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