Des dizaines de femmes et de jeunes filles étaient alignées dans une cour d’école de Port-Soudan, un fusil d’assaut AK-47 à leurs pieds.Elles ont chargé leur arme avec des munitions lorsque le formateur militaire en a donné l’ordre, puis elles se sont couchées sur l’estomac, leur arme pointée droit devant.
Certaines des étudiantes, enseignantes et ménagères s’étaient rendues au camp militaire improvisé pour des raisons de fidélité aux membres de leur famille qui se battaient avec les Forces armées soudanaises (SAF) contre les Forces de soutien rapide (RSF). Selon Sky News, d’autres ne savaient pas où aller car les emplois dans la ville sont limités.
« Nous soutenons l’armée ! », ont-elles crié d’une seule voix pendant l’exercice. « Ils n’ont pas besoin de nous mais nous sommes ici pour les soutenir. »
Le camp est l’un de plusieurs sites de formation pour les femmes et les jeunes filles établis lorsque le général Abdel Fattah al-Burhan, chef des SAF, a fait appel aux civils pour prendre les armes contre son rival, les RSF. Les deux belligérants sont accusés de commettre des atrocités contre les civils pendant la guerre civile prolongée du pays.
Une apprenante en pleurs déclare à Sky News : « Mon fils a été tué par les RSF. C’était un officier. »
D’autres sont déterminées et en colère.
« Nous sommes venues pour nous protéger nous-mêmes, protéger nos enfants, tout ce que nous représentons contre tout ce que nous avons vu », déclare une femme dont le neveu a été tué et la nièce enlevée par les RSF. « Nous avons vu tant de choses. C’est une tragédie insensée. »
Selon le reportage de Sky News, une initiative de recrutement à Port-Soudan s’appelle « Kandakat » [les reines nubiennes guerrières]. Ce mot est utilisé pour décrire les femmes qui ont conduit des manifestations contre le régime pendant la révolution soudanaise de 2018. Elles ont constaté directement les effets de la brutalité des RSF.
Une apprenante déclare : « L’ampleur des viols est inimaginable. Nous avons rencontré des jeunes filles dans ces camps qui ont été violées. J’ai trois filles. Je suis ici pour les défendre et me défendre moi-même. »
En novembre dernier, l’Union des femmes soudanaises a signalé plus de 150 cas de viol, disparitions forcées et mariages forcés avec des membres des RSF depuis le début de la guerre. Les Nations unies ont signalé en novembre que certaines femmes et jeunes filles enlevées avaient été vues enchaînées à des voitures et des camions.
Le nombre d’enlèvements d’enfant est aussi en hausse. Dans une salle de classe transformée en centre pour personnes déplacées à Port-Soudan, une mère de deux enfants décrit ses épreuves.
« Les RSF ont enlevé des enfants dans la région, dit-elle à Sky News. Elles ont même pris les enfants de ma voisine. Ils ont sauté par-dessus le mur, enfoncé ma porte et m’ont forcée à sortir à la pointe de leur arme. J’ai deux enfants asthmatiques. »
Une femme appelée Rahma est l’une des 30 femmes qui ont été entraînées dans un camp de recrutement militaire à Wad Madani. Elle est animée par la vengeance.
« J’ai vu les larmes de ma mère lorsqu’elle soignait les blessures, et j’ai décidé de me protéger et de protéger ma famille, dit-elle au Sudan Tribune. La conscription semblait la seule option disponible. Il y a une injustice en moi qui peut être uniquement soulagée en cherchant à me venger contre ceux qui nous ont heurtés et ont perturbé notre vie. »
D’autres femmes au centre de Wad Madani ont suivi des classes de premiers secours pour prendre soin d’elles-mêmes et de leur famille. Une femme appelée Amal était motivée pour apprendre le secourisme après avoir vu son père gravement battu par les membres des RSF. « Je ne pouvais pas le sauver ni soulager sa douleur », dit-elle au Sudan Tribune.
Une femme apprenant le secourisme à Khartoum a dit que les soldats des RSF ont menacé sa famille à la pointe du fusil. « Ils nous ont forcés à traiter les blessés et à panser leurs blessures chez nous, dit-elle sur le site web d’actualité. Lorsqu’un soldat mourait, ils nous battaient. »