PERSONNEL D’ADF
Un nouveau partenariat sécuritaire multinational menace de changer le rapport des forces dans la Corne de l’Afrique.
Le président érythréen Isaias Afwerki a accueilli le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi et le président somalien Hassan Sheikh Mohamoud dans la capitale érythréenne d’Asmara le 10 octobre et a annoncé une alliance.
Dans un communiqué conjoint, les trois présidents ont déclaré qu’ils s’étaient mis d’accord pour « améliorer les institutions d’état somaliennes afin de confronter divers défis internes et externes et permettre à l’Armée nationale fédérale somalienne de confronter le terrorisme sous toutes ses formes ».
En Éthiopie, l’accord sécuritaire trilatéral a été accueilli par une posture défensive et inconfortable.
Hassan Khannenje, directeur de l’Institut international de la Corne de l’Afrique pour les études stratégiques, a déclaré à la BBC : « Il s’agit d’un axe contre Addis-Abeba. Je pense que c’est une tentative visant à concentrer la haine afin d’accroître la pression contre Addis-Abeba. »
Toutefois, le ministre somalien de l’Information Daud Aweis insiste que la réunion concernait uniquement la coopération entre les trois pays.
Il déclare à la BBC : « Nous n’avons pas décidé d’entreprendre quoi que ce soit contre Addis-Abeba. Addis-Abeba est notre voisine. Nous avons coopéré ensemble pendant longtemps bien que, à un certain moment, leur leadership ait introduit un facteur d’instabilité dans la région. »
« Mais nous continuons à poursuivre la paix et nous ne pensons pas qu’une telle réunion à Asmara ait un rapport quelconque avec l’Éthiopie. »
Le Nil et la mer Rouge sont les points majeurs de désaccord entre l’Éthiopie et ses voisins.
La Somalie et l’Éthiopie sont engagées dans une dispute diplomatique sur un accord portuaire en mer Rouge que l’Éthiopie a conclu avec le territoire séparatiste du Somaliland, considéré par la Somalie comme faisant partie du pays.
Le problème principal entre l’Égypte et l’Éthiopie est le contrôle du débit du Nil. L’Égypte pense que le Grand barrage de la Renaissance éthiopienne a détourné l’écoulement du fleuve.
Ces crises, considérées comme existentielles en Égypte et en Éthiopie, ont suscité la plus récente série de positionnement et de rhétorique croissante.
Samir Bhattacharya, Fellow associé à l’Observer Research Foundation qui étudie la géopolitique africaine, avertit que la Corne de l’Afrique « se transforme rapidement en poudrière ».
Il écrit le 24 octobre pour le magazine The Diplomatic Courier : « Un groupe tripartite anti-éthiopien est déjà une victoire diplomatique pour l’Égypte. Toutefois, mis à part l’offre d’une assistance sécuritaire de l’Égypte, la Somalie et l’Érythrée ont peu à gagner de cet accord. »
« Avec les tensions existantes entre la Somalie et l’Éthiopie déjà exacerbées, ce changement stratégique pourrait envenimer encore plus l’instabilité en Somalie. »
Malgré la montée des températures dans la région, le Dr Mohamed ELDoh fait partie des analystes de défense et de sécurité qui ne pensent pas que le bruit des sabres conduira à un conflit militaire régional.
Il écrit dans un rapport situationnel du 23 octobre pour Geopolitical Monitor : « L’établissement de l’alliance entre l’Égypte, l’Érythrée et la Somalie marque un changement crucial dans la géopolitique de la Corne de l’Afrique. Alors que l’Éthiopie continue à se définir comme une puissance régionale, ses voisins cherchent à contrebalancer Addis-Abeba par des moyens diplomatiques et militaires. »