PERSONNEL D’ADF
Un projet portuaire dans l’État nigérian de Rivers est acclamé comme projet unique qui inclura des usines de transformation, des entrepôts et des chantiers navals d’entretien.
Les défenseurs déclarent que le port proposé, d’un coût de 1,5 à 2,5 milliards de dollars, traitera de grandes quantités de maquereaux, de harengs, de tons et de crustacés, destinés principalement à l’exportation. Les critiques déclarent que le port de pêche et la zone de transformation d’Andoni pourraient attirer plus de chalutiers étrangers dans le golfe de Guinée, région qui est déjà ébranlée par la pêche illégale, la surexploitation, la piraterie et les dommages écologiques.
Il est anticipé que la construction du port commencera en 2021. Les installations portuaires, les usines de transformation et les entrepôts devraient être en service en 2022, déclare Emeka Chukwu, président-directeur général d’Andoni Fishing Port and Processing Zone Ltd., à ADF dans un email.
« Nous recherchons toujours des investissements étrangers, sans nous limiter aux Chinois. Nous examinons toutes les options de financement : la Russie, l’Europe, les États-Unis, l’Asie et les états du Golfe. Nous examinons toutes les options d’investissement qui seront appropriées pour nous. »
Steve Trent, directeur exécutif de l’Environmental Justice Foundation (Fondation pour la justice environnementale) avertit que ce port nouveau et énorme pourrait encourager la venue d’un nombre supplémentaire de chalutiers de fond, qui nuisent aux pays d’Afrique de l’Ouest.
« Le chalut de fond est fondamentalement destructif ; au Ghana, ces navires ont des effets extrêmes, car ils commencent à cibler illégalement les petites espèces pélagiques (les poissons qui vivent près de la surface des océans et qui sont une source majeure de protéines pour les villages côtiers du pays), en plus des espèces de fond qu’ils sont autorisés à pêcher », déclare M. Trent à SeafoodSource.
M. Chukwu rejette les inquiétudes de M. Trent.
Il demande à ADF : « Les critiques préféreraient-ils la situation actuelle dans laquelle les chalutiers étrangers pêchent dans nos eaux territoriales sans aucune réglementation et de façon illégale ? Notre port dédié à la pêche vise à mettre fin à cela en fournissant des installations pour que les chalutiers et les vaisseaux de pêche étrangers se rendent au port pour décharger leur prise et la transformer sur place. Ce faisant, nous pouvons être certains qu’ils agiront selon la structure établie dans le cadre d’une gestion durable de l’écosystème, puisqu’ils pourront désormais être facilement surveillés. »
L’annonce du projet portuaire n’a pas calmé l’angoisse des pêcheurs de l’État de Rivers, qui se plaignent depuis longtemps de la pêche illégale et de la piraterie que les autorités ont des difficultés à réprimer. Les employés du secteur de la pêche dans l’État de Rivers craignent que la pêche artisanale et en eau profonde ne disparaisse, selon un reportage du journal nigérian Daily Trust en mars dernier.
De nombreux navires pratiquant la pêche illégale au Nigeria et dans les pays environnants sont chinois. En 2018, la Marine nigériane déclara que le pays perdait annuellement 70 millions de dollars à cause des chalutiers chinois engagés dans la pêche illégale.
Les chalutiers appartenant à la Chine sont particulièrement problématiques à Oyorokoto, communauté de pêche dans l’État côtier de Rivers. Un pêcheur vivant là-bas, appelé M. Monwon, a déclaré à Nigeria Abroad qu’il avait été récemment « menacé en mer à la suite d’une altercation avec un navire dont l’équipage était chinois ». Il dit que lorsque les chalutiers chinois finissent de pêcher, les pêcheurs locaux ont des difficultés pour attraper des poissons, quels qu’ils soient.
La Société américaine des pêcheries indique dans un rapport de 2019 que les ressources de pêche dans les eaux côtières du Nigeria sont exploitées presque à pleine capacité, et que 80 % des zones de pêche disparaissent, sont surexploitées (prise annuelle comprise entre 10 et 50 % du record historique) ou pleinement exploitées (prise supérieure à 50 % du record historique).
L’institut de recherche FishBase répertorie plus de 60 espèces de poissons originaires du Nigeria qui sont vulnérables ou en danger de disparition.
Il y a « trop de bateaux qui pêchent trop peu de poissons », déclare Dyhia Belhabib à China Dialogue. Mme Belhabib est une chercheuse de l’Université de la Colombie-Britannique qui étudie la pêche illégale en Afrique de l’Ouest.
Juliet Ozalagba, gérante d’entrepôt dans une entreprise nigériane d’exportation, estime que seulement 10 % environ des sociétés de pêche du Nigeria appartiennent à des personnes locales. Elle accuse le gouvernement d’avoir octroyé des licences de pêche sans discernement au cours des dernières années.
Mme Ozalagba déclare à China Dialogue : « Ils ont donné beaucoup de licences, en particulier aux sociétés étrangères. Il y a eu beaucoup de surexploitation. Beaucoup de gens ont fait faillite. »