PERSONNEL D’ADF
La campagne près de Djibo dans le Nord du Burkina Faso est vide : les cultivateurs ne peuvent pas sortir de la ville pour s’y rendre. Comme d’autres communautés campestres, Djibo est sujette au blocus des militants qui accusent les résidents de prendre le parti du gouvernement.
Le blocus a réduit l’approvisionnement en vivres de Djibo de 65 % et paralysé le système de soins de santé. En même temps, cette communauté près de la frontière malienne est devenue un refuge pour les étrangers qui fuient la violence extrémiste. La majorité des 360.000 résidents de Djibo proviennent des communautés environnantes ; la moitié sont des enfants.
Le marché de Djibo, jadis plateforme commerciale importante de la région, est désormais un village fantôme avec les trois quarts de ses boutiques fermées, selon Modou Diaw, vice-président régional de l’International Rescue Committee – Afrique de l’Ouest. Des milliers de personnes sont sur le point de mourir de faim.
« La sécurité alimentaire de la population est insupportable et exige une action immédiate de la part de tous les acteurs qui peuvent faire la différence pour ces gens qui ont un besoin extrême d’accès à la nourriture », a dit M. Diaw dans une déclaration diffusée par le comité.
Dans l’ensemble du Burkina Faso, près de quarante communautés sont assiégées par les extrémistes. Plus de 2 millions de personnes ont fui les combats entre les extrémistes et les forces gouvernementales dirigées par la junte, lesquelles comprennent les Volontaires pour la défense de la patrie, qui sont mal entraînés et légèrement armés.
Près d’un million de personnes vivent désormais dans des communautés sujettes à un blocus par les extrémistes. Ces blocus ont détruit l’économie locale, laissé les champs en friche et provoqué des épidémies. Même les articles les plus basiques deviennent difficiles à trouver.
« Nos frères et nos sœurs, nos cousins et nos neveux, nos aînés vivent dans une pauvreté complète », a déclaré au New Humanitarian une enseignante qui s’est échappée de la ville orientale de Pama. Cette dernière est encerclée par les extrémistes depuis l’an dernier.
L’armée du Burkina Faso a orchestré deux coups d’État l’an dernier, en renversant le gouvernement civil qui avait des difficultés pour contrôler la menace extrémiste. Mais plus d’un an plus tard, la majorité du territoire du Faso reste hors du contrôle du gouvernement.
La nourriture et les autres articles qui atteignent Djibo sont amenés lors de missions de sauvetage sporadiques par des hélicoptères des Nations unies. Parfois, les résidents s’échappent dans les convois qui partent de la ville, et qui sont attaqués par les extrémistes.
Les résidents de Djibo et des autres communautés bloquées, coupés en grande mesure du monde extérieur, se sont tournés vers d’autres sources pour survivre. Ils cultivent le peu de nourriture qu’ils peuvent cultiver dans les limites de leurs communautés et mettent en commun leurs ressources pour s’aider mutuellement. Ceux qui ont de la famille à l’extérieur des communautés reçoivent parfois de l’argent grâce aux services mobiles lorsque les systèmes de télécommunication fonctionnent.
Les gens finissent par manger des aliments sauvages et cueillir des fruits et autres plantes comestibles dans les forêts voisines. Les graines que l’on utilisait jadis pour le savon sont aujourd’hui un ingrédient des sauces, pour remplacer les cacahuètes. Les résidents creusent aussi des puits près de chez eux pour remplacer les conduites d’eau sabotées de la région et les puits publics empoisonnés par les extrémistes.
Malgré des efforts pour surmonter l’impact des blocus, les gens tels que Safi, mère de cinq enfants, continuent à souffrir. Son époux avait été tué par les extrémistes alors que la famille s’enfuyait de leur foyer de Yalanga pour se rendre à Djibo, à environ 80 km de distance.
« Il ne restait aucune nourriture pour mes enfants », déclare-t-elle à Médecins sans frontières.