PERSONNEL D’ADF
L’Afrique perd environ 100.000 tonnes de poisson chaque année à cause de la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN). Un nouveau rapport publié par la Financial Transparency Coalition (FTC) estime que le poisson du continent attrapé illégalement coûte près de 11,5 milliards de dollars par an.
L’étude a conclu que le tiers des navires pratiquant la pêche illégale en Afrique est originaire de Chine, bien que des vaisseaux provenant d’un grand nombre d’autres pays emploient aussi des stratagèmes élaborés pour pêcher illégalement dans les eaux du continent. Selon la coalition, huit des dix premières sociétés mondiales pratiquant la pêche INN sont chinoises ; les deux autres sont originaires de Colombie et d’Espagne.
« La pêche illégale est une énorme industrie qui menace les moyens de subsistance de plusieurs millions de personnes sur la planète, en particulier [ceux] qui vivent dans les communautés côtières défavorisées des pays en développement » déjà affectés par Covid-19, par le coût de la vie et d’autres facteurs, déclare Matti Kohonen, co-auteur du rapport et directeur exécutif de la FTC, au Guardian.
Le rapport souligne que peu de pays possèdent des informations sur les propriétaires d’un navire lorsqu’il est enregistré ou fait demande d’un permis de pêche. Il soutient que les propriétaires des navires de pêche devraient être requis de préciser le propriétaire véritable du navire au moment de l’enregistrement et de la demande de permis. Ces données pourraient aider les autorités à mettre en application les lois sur le blanchiment d’argent et les crimes fiscaux et financiers.
Les efforts de surveillance, contrôle et vigilance sont souvent insuffisants dans les pays africains où la pêche INN est problématique. Cette pratique décime les stocks de poisson et les moyens de subsistance des travailleurs de la pêche sur le continent.
Les bateaux de pêche étrangers sont connus pour « emprunter » les pavillons des pays africains, c’est-à-dire qu’ils emploient les règles locales et les abusent pour inclure le pavillon d’un vaisseau de pêche appartenant à et exploité par une société étrangère dans un registre africain et pour pêcher dans les eaux locales. Ceci aide les propriétaires bénéficiaires du vaisseau à éviter les fardeaux financiers et autre réglementation.
Ces registres en ligne sont ouverts et peu supervisés. Cela veut dire qu’une société de pêche chinoise peut s’enregistrer pour pêcher au Ghana et payer électroniquement les droits d’enregistrement.
Les opérateurs de pêche INN utilisent aussi couramment des sociétés fantômes et des accords de coentreprise qui rendent difficiles l’investigation et les poursuites intentées contre les navires accusés de pratiquer la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN).
Les sociétés fantômes sont créées pour détenir les fonds et gérer les transactions financières d’une autre personne morale ou physique. Elles ressemblent à des sociétés réelles mais n’existent que sur papier. Un accord de coentreprise est une entente entre deux sociétés ou plus visant à créer une nouvelle société pour leur avantage mutuel.
Le rapport de la FTC soutient que la pêche INN devrait être considérée comme un crime financier.
Alfonso Daniels, auteur principal du rapport de la FTC, a déclaré à l’Inter Press Service italien : « Jusqu’à aujourd’hui, la pêche INN a été considérée surtout comme un problème relatif à l’environnement et la sécurité alimentaire. Mais ce que nous essayons de faire, presque pour la première fois, c’est de montrer qu’il s’agit d’un problème financier grave, et que les pays perdent des milliards de dollars à cause de la pêche INN. Ainsi, le dossier est transféré du ministère de la Pêche à celui des Finances. »