L’Union africaine a porté atteinte à l’industrie chinoise de l’ejiao lorsqu’elle a interdit l’abattage des ânes dans tous les 54 pays, ce qui a été loué par les organismes de défense des droits des animaux.Le collagène extrait de la peau d’âne produit l’ejiao, remède chinois traditionnel employé pour traiter les personnes souffrant d’anémie, de faible numération globulaire ou de problèmes reproductifs, bien qu’il n’existe aucune preuve scientifique de sa valeur. Il est aussi utilisé dans les snacks et les produits de beauté tels que les crèmes pour le visage. Le collagène est extrait en faisant bouillir la peau d’âne avec un mélange d’herbes et autres ingrédients pour produire des tablettes, des comprimés et des liquides.
Il est prisé par les gens riches et coûte environ 780 dollars le kilo en Chine. Sa forte demande est la cause d’une hausse de production de 160 % depuis 2016, selon le journal émirien The National News.
La Chine a été forcée de se tourner vers l’Afrique pour les ânes parce que sa propre population d’ânes s’est effondrée à cause de la demande de l’ejiao. Le marché chinois du collagène est passé d’environ 3,2 milliards de dollars en 2013 à environ 7,8 milliards de dollars en 2020, selon The Conversation. L’Afrique possède 60 % de la population mondiale d’ânes.
L’interdiction de l’UA est un « moment formidable pour les communautés africaines qui ont profité des ânes depuis des temps immémoriaux », déclare à la BBC Raphael Kinoti, directeur régional de l’organisme caritatif de protection des animaux Brooke East Africa.
Une ressource cruciale
D’innombrables Africains dépendent des ânes pour le transport des personnes, de la nourriture et d’autres articles.
En Éthiopie où vivent 8,8 millions d’ânes, une étude récente par le Firoz Lalji Institute for Africa a montré que la possession d’un âne peut faire la différence entre la pauvreté et la possibilité de gagner modestement sa vie.
Mais le vol des ânes, dû en large mesure à la demande pour l’ejiao, est en hausse depuis des années sur le continent.
Pour Steve (nom d’emprunt), marchand d’eau à Nairobi (Kenya), les ânes font le travail laborieux consistant à tirer une charrette chargée de conteneurs d’eau de 20 litres. Un matin récent, il s’est rendu au champ pour aller chercher ses animaux mais ils avaient disparu.
« Je ne pouvais pas les voir, dit-il à la BBC. J’ai cherché toute la journée, toute la nuit et le jour suivant. »
Un ami l’a appelé trois jours plus tard pour lui dire qu’il avait découvert les squelettes des animaux. « Ils avaient été tués, massacrés ; leur peau avait disparu », dit-il.
La population d’ânes sur le continent a chuté au cours des dernières années à cause de la demande chinoise d’ejiao, responsable pour l’abattage de plus de 5 millions d’animaux par an dans le monde.
« Entre 2016 et 2019, nous estimons qu’environ la moitié des ânes du Kenya ont été abattus » pour vendre leur peau, déclare à la BBC Solomon Onyango, qui travaille pour le Sanctuaire des ânes à Nairobi.
Mise en œuvre de l’interdiction
Jennifer Croes, scientifique écologiste aux Émirats arabes unis et conseillère stratégique du groupe de travail d’Interpol sur les crimes contre la faune sauvage, a loué les dirigeants africains pour assumer leurs responsabilités dans la lutte contre le commerce illégal de la faune sauvage.
« La question qui se pose maintenant est de savoir comment cette interdiction sera mise en œuvre et quel est l’échéancier de sa mise en application, déclare Mme Croes au National. Je travaille avec les secteurs maritimes et d’aviation pour les encourager à adopter une politique de “non-transport de la peau d’âne”. »
« Cette interdiction commerciale facilite la mise en place de mesures ou de processus opérationnels selon lesquels les parties prenantes du transport peuvent effectivement dire Non au transport de la peau d’âne. »
Otieno Mtula, gestionnaire régional des campagnes et de la mobilisation au Sanctuaire des ânes, exhorte chaque pays africain à mettre en œuvre et mettre en application l’interdiction.
« Nous œuvrerons étroitement avec nos collègues et partenaires de toute l’Afrique pour fournir tout le soutien et toutes les ressources possibles pour assurer que cet engagement envers une interdiction de l’abattage des ânes pour leur peau devienne une réalité dans toute l’Afrique et le début d’une nouvelle ère pour le bien-être des ânes », dit-il sur le site web de l’organisation.