PERSONNEL D’ADF
L’Éthiopie a rejoint une liste croissante de pays africains qui souhaitent un allégement de leur dette extérieure alors qu’ils ont des difficultés pour affronter le ralentissement financier mondial tout en prenant soin de leur peuple pendant la pandémie de Covid-19.
L’Éthiopie a demandé une assistance pour sa dette en janvier auprès de l’initiative de suspension du remboursement des dettes (DSSI) du G20. Elle est la deuxième nation africaine à invoquer la DSSI, après la Zambie.
Le ministère des Finances de l’Éthiopie a déclaré que l’accord DSSI « adresserait les vulnérabilités liées à l’endettement du pays, tout en préservant l’accès à long terme aux marchés financiers internationaux, pour stimuler ainsi le potentiel de croissance. »
Le Premier ministre Abiy Ahmed Ali a déclaré que l’allègement des paiements de la dette jusqu’à la fin 2022 pourrait faire économiser à son pays jusqu’à 3,5 milliards de dollars, somme qu’il pourrait utiliser pour faire face à la pandémie. Le programme DSSI expire à la fin 2021.
Cette initiative aide les pays à renégocier leurs dettes publiques et à remettre à plus tard les remboursements pour renforcer leur économie face aux exigences de la pandémie. Toutefois, le manque de transparence, en particulier concernant la dette à l’égard de la Chine, peut entraver leur capacité d’utiliser le programme.
Certains problèmes de transparence existent pour les emprunts chinois accordés aux entreprises d’état, telles que les centrales électriques et les ports, qui peuvent ne pas être répertoriés comme faisant partie de la dette nationale officielle.
Cela soulève la possibilité que la dette de l’Éthiopie soit supérieure à la dette officiellement reconnue, compliquant ainsi son plan d’allègement DSSI, selon Irmgard Erasmus, économiste financier principal chez NKC African Economics.
L’annonce DSSI de l’Éthiopie a provoqué la dévaluation de sa dette extérieure et l’agence de notation Fitch a dégradé la notation du pays de B à CCC, ce qui rend plus difficiles les emprunts ou la renégociation des dettes du gouvernement.
En tant que membre du G20, la Chine fait partie du projet DSSI. Mais jusqu’à présent elle a fourni un allègement seulement pour les petits prêts sans intérêt accordés directement par le gouvernement.
Le G20 a demandé aux prêteurs privés de suivre le plan DSSI mais la question de savoir si cela se produira demeure incertaine. La plus grosse dette de l’Éthiopie, d’un montant de 7,7 milliards de dollars, est due à la Banque chinoise d’importation et d’exportation (Exim), banque soutenue par l’état mais considérée par le gouvernement chinois comme un prêteur commercial privé.
La Banque Exim a accordé 32 prêts à l’Éthiopie entre 2007 et 2018. Ces prêts représentent plus de la moitié de la totalité de l’endettement éthiopien de 13,7 milliards de dollars à l’égard de la Chine, la majeure partie contractée depuis 2010.
La plupart des dettes chinoises de l’Éthiopie ont soutenu des projets d’infrastructure tels que la ligne ferroviaire d’Addis-Abeba à Djibouti et divers projets d’autoroute, ainsi que des entreprises d’état telles que l’Ethiopian Electric Power Corp.
Les banques chinoises considèrent les projets qu’elles financent comme un collatéral de la dette. Le non-paiement ou la demande d’allègement pourrait donc permettre à la banque de prendre possession de l’autoroute, du port ou d’un autre projet dans l’absence d’un remboursement.
En décembre 2019, l’Éthiopie et le Fonds monétaire international ont signé un accord de ligne de crédit d’une valeur de 2,9 milliards de dollars pour aider l’Éthiopie à renforcer son économie. Cet accord place l’Éthiopie dans une meilleure situation, comparé aux autres pays africains qui souhaitent un allègement de leurs dettes.
En même temps, M. Erasmus déclare que l’accord du G20 ne fait que remettre à plus tard l’impact inévitable du remboursement des dettes éthiopiennes.
« Bien que la DSSI ait fourni un répit du point de vue de la liquidité en devises fortes, s’il ne s’accompagne pas d’un remaniement de la gestion de l’endettement, cet exercice sera limité à un événement (fiscal) attentiste », écrit M. Erasmus dans son analyse de la dette éthiopienne.