PERSONNEL D’ADF
Lorsque Jacob Zuma, ex-président d’Afrique du Sud, s’est rendu à la police le 7 juillet pour purger une peine de prison de 15 mois, des centaines de sympathisants se sont regroupés près de chez lui dans la province du Kwazulu Natal, certains armés d’un fusil, d’une lance ou d’un bouclier.
Ce long drame judiciaire a pris fin lorsque M. Zuma a été déclaré coupable d’outrage au tribunal, et s’est transformé rapidement en violence qui a défié la capacité du pays à faire prévaloir l’état de droit.
Durant neuf jours, l’Afrique du Sud a été l’objet des pires troubles civils qu’elle avait connu depuis la fin de l’apartheid en 1994. Les experts déclarent que cette violence a exposé les faiblesses du pays dans le secteur de la sécurité.
Ils espèrent que cela servira de coup de semonce pour instaurer des réformes.
Jakkie Cilliers, fondateur de l’Institut pour les études de sécurité (ISS) basé en Afrique du Sud, écrit sur le site web de l’institut : « Avec un taux de chômage élevé, l’inégalité, la pauvreté, la xénophobie et le racisme, le pays va affronter des problèmes de sécurité intérieure pendant plusieurs années. »
« Ajoutez à cela le déclin de la stabilité régionale du fait de l’insurrection dans la province mozambicaine de Cabo Delgado et les événements d’Eswatini, et il est clair que le système de sécurité sud-africain doit être reformulé de toute urgence pour les tâches à accomplir. »
Les émeutes, les pillages et les incendies criminels généralisés ont commencé le 9 juillet. Le service de police sud-africain (SAPS), affecté par un manque d’armes non létales, a eu des difficultés pour maîtriser les dommages. Les troubles se sont rapidement propagés à Johannesbourg et dans la province environnante du Gauteng, région la plus petite mais la plus peuplée du pays.
Le 12 juillet, le président Cyril Ramaphosa a autorisé le déploiement de 2.500 soldats de la Force nationale de défense d’Afrique du Sud (SANDF) pour aider la police. Cette action, appelée « opération Prosper », s’est élargie à 25.000 soldats dans le but de rétablir l’ordre.
Après neuf jours de troubles, la police a signalé 3.407 arrestations en date du 18 juillet. Le 22 juillet, le SAPS a déclaré que 337 personnes étaient décédées.
Dans une allocution nationale le 18 juillet, M. Ramaphosa a appelé ces événements une tentative d’insurrection.
« Il est aujourd’hui évident que les événements de la semaine dernière n’étaient rien d’autre qu’une attaque délibérée, bien planifiée et bien coordonnée, contre notre démocratie, dit-il. Ils n’ont pas obtenu le soutien populaire de nos citoyens. Les Sud-Africains les ont rejetés. »
Dans un article d’opinion publié dans le journal sud-africain The Citizen le 14 août, le général de brigade Gerald Pharo a déclaré que l’une des leçons à tirer est la nécessité d’une formation conjointe avec le SAPS et le service de renseignements militaire.
Ce directeur des opérations conventionnelles de la SANDF écrit : « Nous devons chercher des moyens d’améliorer les communications à tous les niveaux et de créer une compréhension commune des différents secteurs et domaines de responsabilité entre les différentes agences : militaire, police et renseignements. L’une des carences de notre formation est le fait que nous nous sommes concentrés sur le maintien de la paix et les opérations extérieures offensives, plutôt qu’une formation de contre-insurrection. »
Au début août, M. Ramaphosa a remanié son cabinet en créant un nouveau ministère de la Sécurité d’état et en désignant un nouveau ministre de la Défense pour qu’il se joigne au ministre de la Police dans le cadre de l’équipe de sécurité modernisée du pays.
Toutefois, les analystes tels que M. Cilliers soulignent le besoin de combler les lacunes qui existent toujours, par exemple la formation de la police anti-émeute et la coordination des renseignements dans plusieurs ministères pour anticiper les troubles.
« Les services de détection et les renseignements sur la criminalité devraient être priorisés pour permettre l’alerte précoce, la détection et les poursuites des crimes complexes tels que ceux commis par les planificateurs de la récente insurrection et le crime organisé à l’état naissant, écrit M. Cilliers. La capacité de riposter aux manifestations publiques avec des policiers suffisamment formés et équipés pour cette tâche est aussi cruciale. »
Selon l’ISS, la réduction des budgets de la police et des forces armées en 2021 est un facteur critique dans la réponse inefficace du SAPS, qui a nécessité une intervention militaire.
L’économiste Duma Gqubule en convient, déclarant que la pandémie du Covid-19 et la mauvaise réponse du gouvernement ont intensifié les maux sociaux existants.
Il a déclaré au journal sud-africain Daily Maverick : « Ce sont les résultats de l’austérité. Elle affecte profondément notre capacité de réponse à la violence. Vous avez une crise à la fois humanitaire et économique. Nous ne devrions pas la confondre avec une crise uniquement sécuritaire. »