PERSONNEL D’ADF
Le continent africain, où se trouvent près de la moitié des opérations de maintien de la paix des Nations unies, a enregistré un grand nombre de succès, de défis et de leçons durement apprises.
Dans le but de partager quelques-unes de ces leçons, dix responsables de haut rang ont collaboré à un livre nouvellement publié, intitulé « La diplomatie militaire : expérience et leadership des anciens commandants des forces des Nations unies au service de la paix. »
Souhaitant faire avancer l’architecture de sécurité régionale en Afrique, les anciens commandants des forces de l’ONU ont partagé leurs expériences et conclusions lors d’un panel de discussion hébergé par le Centre d’études stratégiques de l’Afrique (CESA) et l’Université suédoise de la défense le 22 octobre.
Le major-général Salihu Zaway Uba du Nigeria (à la retraite) était le huitième et dernier commandant des forces de la mission des Nations unies au Liberia (MINUL). Depuis le début de son mandat en 2015 jusqu’à la clôture de la mission en 2018, il a supervisé le retrait des troupes dans ce qui est généralement considéré comme l’une des missions de maintien de la paix les plus réussies de l’histoire de l’ONU.
Il a déclaré à l’événement : « Nous avions au total 15.000 soldats environ et près de 1.200 policiers, plusieurs diplomates, des conseillers politiques et des employés. Nous avons œuvré indépendamment et conjointement avec tous ces groupes de personnes. Nous voulions collaborer avec eux sur plusieurs problèmes. »
Il a décrit les complexités liées à la supervision du transfert des responsabilités de sécurité entre la MINUL et les forces libériennes, qui s’est produit en 2016, et à la préparation des élections nationales en 2017. Les deux efforts ont été accomplis pendant un retrait accéléré des troupes, en laissant une force résiduelle de 1.240 soldats et 606 policiers.
« Il y a eu une réduction des troupes sur le terrain, sans réduction correspondante des tâches affectées à la mission, dit-il. Nous avions moins d’effectifs mais davantage de tâches. »
La planification opérationnelle était cruciale.
Le général Uba explique : « Nous devions nous assurer d’être pratiquement partout, en particulier dans les bureaux du centre d’analyse conjoint de la mission, pour pouvoir être capables de gérer toute situation avant qu’elle ne se produise et de planifier en conséquence. »
Le lieutenant-général suédois Dennis Gyllensporre (à la retraite) était commandant des forces de la mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) entre août 2018 et 2021.
Il commandait plus de 13.000 soldats et a dirigé la mise en œuvre de l’accord de paix entre les trois parties : le gouvernement de transition de la junte militaire malienne, le groupe d’opposition La Plateforme et une coalition de rebelles principalement touaregs appelée la Coordination des mouvements de l’Azawad.
Le général Gyllensporre a aussi fait face à une multitude de facteurs politiques, notamment la diminution du soutien des responsables du pays hôte et les campagnes de désinformation prenant pour cible les opérations de maintien de la paix. Son plus grand défi, et sa plus grande leçon, étaient le rôle que la diplomatie militaire joue dans les missions complexes. C’est maintenant le sujet de ses recherches universitaires en tant que chercheur invité à l’université d’Oxford.
« Il n’existe pas d’approche unique à la médiation, déclare-t-il. Il y a différents outils que vous pouvez et devriez utiliser en tant que diplomate militaire. J’ai essayé de donner quelques indications sur ce qui a bien marché et ce qui n’a pas marché pour moi, lorsque je faisais face aux conflits et lorsque nous avions des affrontements violents entre les différentes parties. »
Alors que les Maliens demandaient à la MINUSMA de se charger des tâches difficiles telles que les opérations anti-terroristes, le général dirigeait aussi la mise en application d’un accord de paix fragile.
« En tant que commandant, j’avais la tâche officielle de superviser l’accord de paix. J’ai présidé à des réunions avec les groupes signataires et les représentants du gouvernement pour faire avancer l’accord de paix. J’ai découvert qu’il existait beaucoup de synergisme, parce que je disposais de 13.000 soldats pour vérifier les engagements que nous prenions à la table de discussion et dans certains cas pour dissuader une éruption de violence. Je pense que c’était une bonne combinaison. »
Le major-général australien Cheryl Pearce, autre intervenante et co-auteure du livre, a offert sa perspective en tant qu’ancien commandant des forces et aujourd’hui conseillère militaire par intérim de l’ONU. Elle déclare qu’un aspect critique du poste de commandant est d’encourager un état d’esprit d’intégration des équipes.
« La plupart du temps, je porte des vêtements civils. Je ne me vois pas comme militaire. J’ai des aptitudes particulières. Ma carrière est axée sur les études, les connaissances, l’attitude. Mais j’y pense en fait selon une approche d’équipe. Comment puis-je soutenir le chef du maintien de la paix, le chef des opérations, et soutenir les missions ? Cette coordination est donc vraiment cruciale et cet état d’esprit d’intégration dans tout ce que nous faisons, cela se reflète dans la mission, et aussi au quartier général. »
En tant que femme commandant les forces, le général Pearce a appliqué les leçons de sa carrière pour forger un style de leadership qui est fortement axé sur la transparence, l’inclusion et le respect pour des antécédents diverses.
« Dans une mission multinationale et multidimensionnelle, vous avez un certain nombre d’états membres et de pays contributeurs de soldats, et ils proviennent tous d’antécédents diverses en termes d’éducation, de culture, de croyance, de sexe et de langue. C’est une dimension humaine du leadership qui réunit vraiment les équipes. »