PERSONNEL D’ADF
Le Somaliland est un état autonome et sécessionniste au Nord de la Somalie qui a aspiré continuellement à l’indépendance depuis 33 ans. Il a des institutions d’état, une armée et des systèmes politique et économique qui fonctionnent.
Le Royaume-Uni avait accordé l’indépendance au Somaliland britannique pour former l’État du Somaliland le 26 juin 1960. Cet état s’était volontairement uni avec la Somalie italienne pour former la République somalienne le 1er juillet 1960, date considérée comme fête de l’indépendance de la Somalie.
L’indépendance du Somaliland a duré « seulement cinq jours », écrit la chercheuse Natasha Matloob pour le magazine Modern Diplomacy. « Ensuite, il a fusionné avec la Somalie d’aujourd’hui. Cette fusion a reçu de vives réactions de rejet de la part de nombreux habitants du Somaliland qui ont perdu leurs postes dans le gouvernement et les forces armées. »
Le Somaliland aspire toujours à célébrer sa propre fête de l’indépendance.
« On peut dire que le facteur le plus important empêchant la reconnaissance de la part des pays africains est l’engagement inébranlable de l’Union africaine visant à préserver les frontières coloniales du continent », selon Mme Matloob.
« La position de l’UA provient d’une préoccupation selon laquelle l’altération de ces frontières pourrait déclencher des mouvements sécessionnistes imprévisibles dans l’ensemble du continent, ce qui pourrait conduire à une dynamique géopolitique inattendue. »
La question de l’indépendance du Somaliland a suscité un intérêt accru lorsqu’il a signé le 1er janvier un accord pour louer 20 km de bande côtière à l’Éthiopie, pays sans littoral.
Murithi Mutiga, directeur du Crisis Group pour l’Afrique, a déclaré dans un épisode du podcast du groupe Hold Your Fire le 3 février : « Cet accord a retenti comme un coup de tonnerre le jour de l’An. Il a été géré très maladroitement. »
Aleksi Ylönen, professeur à l’université internationale des États-Unis à Nairobi qui a étudié les aspirations d’indépendance du Somaliland, déclare que la relation entre l’état sécessionniste et la Somalie est compliquée.
« Elle est turbulente, dit-il sur le site web The Conversation Africa. Des négociations sur la relation ont lieu de façon intermittente depuis 2012, mais les progrès sont faibles. Les liens entre l’Éthiopie et le Somaliland sont robustes depuis plusieurs décennies. »
Toutefois, l’accord d’accès portuaire avec l’Éthiopie « a dégradé encore plus les relations entre le Somaliland et la Somalie ».
On peut dire la même chose des relations entre la Somalie et l’Éthiopie, laquelle a des antécédents de litiges frontaliers et de conflits militaires régionaux.
Lorsque le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed et le président du Somaliland Muse Bihi Abdi ont annoncé et signé l’accord d’accès portuaire, cela a indigné les responsables somaliens écartés et déclenché des craintes de guerre régionale dans la région déjà instable de la Corne de l’Afrique.
Les autorités de Mogadiscio ont déclaré que l’accord était « nul et non avenu » et représentait un signe « d’agression » éthiopienne vis-à-vis de la Somalie. L’accord a suscité rapidement des réprimandes de presque tous les pays voisins et des organisations régionales et internationales.
L’accord de location, qui n’a pas été ouvertement publié, inclut une participation non spécifiée que le Somaliland recevrait dans Ethiopian Airlines ou EthioTelecom. Mais la principale motivation du Somaliland est la promesse éthiopienne d’évaluer et de considérer sérieusement l’objectif de reconnaissance internationale du Somaliland.
« Ceci ferait de l’Éthiopie le premier état membre de l’Union africaine à la reconnaître, déclare le professeur Ylönen. Cela donnerait au Somaliland ce qu’il recherche plus que tout. La reconnaissance aiderait à ouvrir les portes du financement public international et rehausserait le statut du Somaliland dans la région. »
L’Éthiopie a publié une déclaration selon laquelle son gouvernement n’a pas encore reconnu l’indépendance, mais les autorités du Somaliland insistent que la question de la reconnaissance a déjà été tranchée. Les responsables éthiopiens, notamment Mesganu Arga, officiel du ministère des Affaires étrangères, et Redwan Hussein, conseiller à la sécurité nationale, semblent appuyer l’interprétation de l’accord par le Somaliland.
« L’accord est bénéfique pour les deux parties et l’Éthiopie partagera son expérience militaire et ses renseignements avec le Somaliland pour que les deux états puissent collaborer dans la protection de leurs intérêts communs », a déclaré M. Hussein lors de la signature de l’accord le 1er janvier. « Pour faciliter cela, l’Éthiopie établira une base militaire au Somaliland, ainsi qu’une zone maritime commerciale. »
Il va sans dire que la perspective d’une coopération militaire entre l’Éthiopie et le Somaliland décontenance les responsables du gouvernement de Somalie. C’est la raison pour laquelle l’aspiration à la reconnaissance du Somaliland, ambition et objectif de ses responsables depuis plus de trente ans, continue à demeurer aujourd’hui de plus en plus incertaine.
« La plupart des états, y compris les grandes puissances et les puissances intermédiaires, craignent que la reconnaissance du Somaliland ne soit déstabilisatrice, déclare le professeur Ylönen. Ils ont choisi de soutenir l’unité et la paix, et le développement de la Somalie en tant qu’état fédéral. »