PERSONNEL D’ADF
La décision par l’Union africaine de déployer des soldats en Somalie en 2007 a été prise après seize années d’anarchie dans ce pays, alors que d’autres missions internationales avaient échoué dans leur tentative de restauration de l’ordre. Dans les seize années écoulées depuis l’intervention de l’UA, la Somalie a rétabli un gouvernement et chassé les terroristes d’un grand nombre de régions du pays.
La mission de transition de l’Union africaine en Somalie (Atmis), appelée précédemment AMISOM, est l’une des dizaines de missions de maintien de la paix sous l’égide africaine déployées sur le continent depuis près d’un quart de siècle. Le nombre de missions de l’UA ou des communautés économiques régionales du continent, telles que la Communauté économique des états d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a augmenté alors que les opérations de maintien de la paix des Nations unies enregistrent un déclin.
« Le succès de l’AMISOM semble confirmer l’optimisme émergent des académiciens et des politiciens concernant le potentiel de l’Afrique pour résoudre ses problèmes de paix et de sécurité grâce à des réponses centrées sur l’Afrique », a écrit le politicologue ougandais Sebastiano Rwengabo dans l’African Solutions Journal publié par l’Institut pour les études de paix et de sécurité basé en Éthiopie.
Avec le départ des Casques bleus du Mali ordonné par la junte au pouvoir, et l’ordre similaire de départ de la mission de l’ONU en République démocratique du Congo, l’UA et les missions régionales jouent un rôle croissant dans la gestion des conflits sur le continent.
L’UA et les missions régionales répondent plus rapidement aux crises et leurs règles de déploiement sont plus polyvalentes. Contrairement à l’ONU, l’UA n’exige pas d’accord de paix précédant le déploiement, comme le démontre l’AMISOM.
« La volonté de l’UA pour défier la doctrine internationale du maintien de la paix a permis aux acteurs régionaux de s’adapter aux conflits armés du 21ème siècle d’une façon que l’ONU n’a pas émulé », a récemment écrit l’analyste Nate Allen pour le Centre d’études stratégiques de l’Afrique (CESA).
Grâce à leurs capacités de réponse rapide, à leur polyvalence, à l’amélioration de la coordination régionale et de l’engagement envers la politique de non-indifférence de l’UA face aux violations des droits de l’homme, les opérations de paix sous l’égide africaine comblent les vides laissés par les opérations internationales, selon le Dr Allen.
« Elles illustrent le rôle singulier que les acteurs régionaux peuvent jouer pour relever des défis de sécurité communs. »
Depuis 2000, l’UA et les groupes régionaux ont créé 38 missions de maintien de la paix. Leur taille varie d’une douzaine ou moins de participants à 22.000 soldats déployés au sein de l’AMISOM. En 2022, l’AMISOM a été rebaptisée l’Atmis, mission de transition de l’UA en Somalie, pour refléter les progrès du pays vers la restauration de l’ordre et l’auto-défense.
L’Atmis projette de retirer progressivement ses gardiens de la paix jusqu’à la fin 2024. En septembre, le gouvernement somalien a demandé à l’UA de reporter de trois mois le premier retrait pour donner aux forces somaliennes le temps de se regrouper après les attaques des shebabs.
Malgré leurs succès, les missions de maintien de la paix sous l’égide africaine continuent à affronter des défis importants, selon les analystes.
Le plus grand défi semble être l’argent. Les grandes missions telles que l’AMISOM/Atmis dépendent presque entièrement du financement des Nations unies, de l’Union européenne et d’autres donneurs internationaux.
Le fonds pour la paix de l’UA, établi pour financer les missions de maintien de la paix, a recueilli un peu plus de la moitié des 400 millions de dollars qu’il espère collecter. Selon le Dr Allen, ce montant est « à peine suffisant pour financer un déploiement expéditionnaire de taille modeste pendant un an ».
Le plan de l’UA visant à créer une force africaine en attente (FAA) continentale à réponse rapide reste aussi en-deçà de ses objectifs car les pays refusent de fournir des troupes en faveur des blocs régionaux tels que la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), déclare le Dr Allen. En plus de cela, les forces déployées dans les missions de l’UA ou les missions régionales ont parfois été accusées de violer les normes de professionnalisme en pratiquant la corruption, les abus sexuels et les assassinats extra-judiciaires, ajoute-t-il.
Malgré ces défis, les opérations de maintien de la paix sous l’égide africaine ont montré qu’elles pouvaient s’adapter aux nombreux problèmes de sécurité variés sur le continent, écrit le Dr Allen.
« L’innovation continue dans les opérations de paix sous l’égide africaine sera cruciale pour améliorer leur efficacité à affronter les conflits armés plus complexes du continent. »