PERSONNEL D’ADF
La pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN) a continué à coûter cher au continent en 2022.
Ce fait a été souligné dans un rapport d’octobre 2022 publié par la Financial Transparency Coalition (FTC), montrant que les poissons attrapés illégalement font perdre au continent près de 11,5 milliards de dollars par an.
L’étude révèle que le tiers des navires pratiquant la pêche illégale en Afrique sont chinois et que près de la moitié des chalutiers industriels et semi-industriels du monde qui pratiquent la pêche illégale sont actifs en Afrique.
« Les pays en développement perdent aussi des milliards de dollars liés aux mouvements illégaux de capitaux dus à la pêche illicite ; pourtant, les propriétaires des navires continuent à agir en toute impunité, en se servant des structures d’entreprise complexes et autres montages pour cacher leur identité et échapper aux poursuites judiciaires, déclare Matti Kohonen, directeur exécutif de la FTC, sur le site web de la coalition.
Les plus grands problèmes provoqués par la pêche IUU se trouvent en Afrique de l’Ouest, qui perd annuellement 9,4 milliards de dollars à cause de la pêche illégale, et qui est sujette à 40 % de la pêche IUU mondiale, selon la FTC. La pêche illégale cause aussi l’insécurité alimentaire et menace les moyens de subsistance des 5,2 millions de personnes qui travaillent dans les entreprises de pêche africaines de petite échelle.
Mais en 2022, les pays africains ont invoqué la technologie et mis à profit des partenariats stratégiques pour riposter.
Armé par la technologie
Le Kenya a commencé en 2022 à bâtir une base de données ADN pour ses espèces marines afin de conserver ses ressources maritimes en présence de la pêche illégale généralisée.
L’exercice inclut la collecte des espèces et leur catalogage pour aider le gouvernement à intenter des poursuites pour pêche illégale. Depuis le début du programme, le Kenya a produit des codes-barres pour environ 115 espèces, y compris des requins, des raies, des crustacés et des mollusques.
« Avec cet exercice scientifique, nous pourrons revendiquer nos ressources. En effet, bien que les poissons se ressemblent physiquement, chacun possède une identification moléculaire spéciale associée à une certaine région », déclare Thomas Mkare, scientifique de recherche principal à l’Institut de recherche marine et des pêches du Kenya, au journal The East African.
En 2022 également, l’Afrique du Sud a commencé à employer des hydrophones pour lutter contre la pêche illégale.
Les hydrophones peuvent enregistrer les sons, depuis les bulles des adeptes de la plongée bouteille jusqu’aux moteurs de navire et aux bombes utilisées dans la pêche à l’explosif. Les hydrophones avertissent les systèmes informatiques exploités par des agences de police si les sons indiquent la possibilité d’un crime dans ou près d’une zone marine protégée (MPA).
À la fin de l’année, les hydrophones ont été stratégiquement submergés dans les MPA du pays. L’académie FishFORCE de l’université Nelson Mandela a lancé ce projet.
Des partenariats établis
FishFORCE a aussi collaboré avec Sea Monster, société du Cap engagée dans les technologies immersives, pour développer un jeu virtuel conçu pour le personnel de la police des pêches. Ce jeu offre aux policiers une série de scénarios pour leur enseigner comment effectuer des inspections de navire afin qu’ils ne perdent pas les procès liés à la pêche illégale à cause de vides de procédure.
Il est mis à la disposition des partenaires de l’académie : les Comores, le Kenya, Madagascar, Maurice, le Mozambique, la Namibie, la Réunion, les Seychelles et la Tanzanie. L’Afrique australe et l’Afrique de l’Est perdent annuellement plus de 717 millions de dollars à cause de la pêche INN, selon des recherches conduites par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture.
Le Bénin est le premier pays africain ayant décidé de partager ouvertement ses données sur les vaisseaux de pêche actifs dans ses eaux territoriales en établissant un partenariat avec Global Fishing Watch (GFW) en mai dernier.
Le Bénin a créé un système de surveillance de navire (VMS) et partage ses données par l’intermédiaire de la carte de GFW. Jusqu’à l’établissement du système VMS du Bénin, le partenariat a aidé à traquer tous les vaisseaux de pêche actifs dans les eaux béninoises en employant un système d’identification automatique, ainsi que les navires situés dans les eaux adjacentes hors de la zone économique exclusive du Bénin.
Gaston Cossi Dossouhoui, ministre béninois de l’Agriculture, du Bétail et de la Pêche, a déclaré dans une annonce de presse : « Grâce à notre partenariat avec Global Fishing Watch, nous pouvons renforcer nos capacités de surveillance des activités de pêche, appliquer la loi et démontrer notre engagement envers la transparence pour soutenir l’économie des océans. »
En 2022 aussi, le centre régional de surveillance, contrôle et vigilance (RMCSC) a aidé le Bénin, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Liberia, le Nigeria et le Togo à gérer leur secteur de la pêche. Le centre situé à Tema (Ghana) est équipé de systèmes de traque des navires et peut collecter des données sur les vaisseaux de pêche autorisés dans la région.
« L’établissement du RMCSC nous rapproche d’une stratégie coordonnée pour entreprendre des actions communes, y compris les patrouilles pour améliorer la sécurité dans le domaine maritime de notre région », déclare Séraphin Dédi, secrétaire général du Comité des pêcheries pour le golfe de Guinée Centre-Ouest.