PERSONNEL D’ADF
La mort de deux soldats sud-africains déployés en République démocratique du Congo (RDC) incite certains observateurs à se demander si la mission de la Communauté de développement d’Afrique australe (CDAA) pour contrôler les rebelles du M23 dans le Nord-Kivu est équipée adéquatement pour cette tâche.
Les soldats de la Force nationale de défense d’Afrique du Sud (SANDF) ont été tués lorsqu’un obus de mortier a été lancé contre leur base dans l’Est de la RDC. Trois autres ont été blessés. Ils faisaient partie d’un déploiement de 2.900 soldats sud-africains, assistés par 2.100 autres soldats en provenance du Malawi et de Tanzanie, qui sont venus aider les forces armées de la RDC (FARDC) en décembre après l’expulsion par les responsables de la RDC des troupes de la Force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est (FR-CAE), qui les ont qualifiées d’inefficaces.
Le contingent sud-africain du déploiement de la CDAA représente environ 10 % de son armée de 30.000 soldats, ce qui en fait l’un des plus grands déploiements à l’étranger dans l’histoire de ce pays.
Malgré cela, la taille du contingent de la CDAA est environ le tiers de celle de la mission de maintien de la paix des Nations unies MONUSCO qui est active dans l’Est de la RDC depuis 1999 et qui se retirera complètement en décembre prochain. Le déploiement de la CDAA est aussi considérablement plus faible que les 6.500 à 12.000 soldats que la FR-CAE avait initialement projeté d’envoyer dans la région avant d’être expulsée après un peu plus d’un an.
Malgré son récent entraînement dans la guerre de jungle, les observateurs déclarent que la mission de la CDAA en RDC, appelée SAMIDRC, est probablement mal équipée pour confronter les forces du M23 armées de missiles sol-air, de mortiers à guidage GPS et d’autres armements de haute technologie qui sont rares pour ce type de milice.
L’analyste de l’armée sud-africaine Helmoed Heitman déclare au quotidien de Johannesbourg The Citizen qu’il est probable que le déploiement en RDC va dépasser la capacité de la SANDF sans l’aide d’autres partenaires comme l’Angola, qui déploie le plus grand contingent militaire de la CDAA.
« Comment peut-on s’attendre à ce que 5.000 soldats ou moins réussissent là où environ 15.000 de la MONUSCO ont échoué, dit-il au Citizen. Je ne vois aucune mention réelle du soutien aérien que les troupes auront : reconnaissance, mobilité et combat. Le fait est qu’une force de 15.000 à 20.000 avec un vrai soutien aérien serait nécessaire. »
De nombreuses années de réductions budgétaires provoquent un découplage entre le désir des responsables sud-africains pour déployer l’armée du pays à l’étranger et la capacité militaire pour le faire, selon Piers Pigou de l’Institut d’études de sécurité.
« Il semblerait exister une discordance entre les engagements politiques de nos responsables politiques et la capacité réelle que l’on peut livrer sur le terrain », a récemment déclaré M. Pigou sur la chaîne sud-africaine Eyewitness News.
La faiblesse majeure de SAMIDRC est son manque d’une couverture aérienne suffisante car les contraintes budgétaires ont cloué au sol un grand nombre d’hélicoptères d’attaque sud-africains Denel Rooivalk, selon Pikkie Greeff, défenseur de l’Union de défense nationale d’Afrique du Sud.
« Quiconque connaît tant soit peu les combats sait que le soutien aérien est très important, en particulier si vous affrontez quelqu’un qui se cache dans la jungle », a dit récemment M. Greeff à SABC News.
Lors de déploiements précédents contre les rebelles du M23, les hélicoptères ont contribué au cessez-le-feu qui a été rapidement sollicité par les rebelles, déclare Guy Martin, rédacteur de DefenceWeb, à Newzroom Afrika.
Greeff dit que les forces armées n’ont pas les fonds nécessaires pour maintenir les aéronefs et leur permettre de décoller.
Les capacités de l’Afrique du Sud, plus grand contributeur au déploiement de SAMIDRC, seront cruciales pour le succès ou l’échec de la mission, qui est passée du maintien de la paix à l’éradication du M23 et des groupes similaires, selon M. Greeff.
« Il n’y a plus de maintien de la paix. La nouvelle mission qui a été lancée vise tout simplement à neutraliser les forces armées actives dans l’Est de la RDC. »
Dans ce but, les contraintes budgétaires de la SANDF pourraient limiter en large mesure ce que SAMIDRC peut accomplir, déclare l’analyste des forces armées sud-africaines Jasmine Opperman sur SABC News. Dans ce contexte, elle se dit « sceptique ».
« Je n’ai pas de grandes attentes, simplement parce que les compressions budgétaires ne permettent pas une capacité suffisante », dit-elle.
Elle compare le potentiel de la mission en RDC à celui du déploiement de la SANDF contre les rebelles dans la province mozambicaine du Cabo Delgado. Au Mozambique, les Forces spéciales de l’armée étaient l’aspect le plus réussi d’un déploiement qui a échoué à cause des problèmes financiers, remarque-t-elle.
On ignore si les Forces spéciales enregistreront un succès similaire dans l’environnement plus complexe de la RDC, ajoute-t-elle.
Autre complication : le fait que les groupes rebelles sont étroitement intégrés aux communautés de l’Est de la RDC, ce qui rend très difficile de savoir à qui on peut faire confiance.
« Si vous dites que notre déploiement en cours fera une différence, ce n’est pas une solution miracle. Ils sont catapultés dans un environnement complexe qui, je le crains, pourrait devenir un déploiement à long terme avec de lourdes pertes. »