LES FORCES ARMÉES DU PAYS SOUHAITENT JOUER UN RÔLE PLUS IMPORTANT DANS LE MAINTIEN DE LA SÉCURITÉ EN AFRIQUE DE L’EST
PERSONNEL D’ADF
Lorsque les forces de l’Afrique, de l’Europe et des États-Unis ont mené le septième exercice maritime Cutlass Express en 2018, elles ont été rejointes par la police maritime de Somalie. C’était la première fois en près de 30 ans que la Somalie participait à un exercice de sécurité quelconque hors de ses frontières.
Cette participation à un exercice de formation militaire constitue une étape importante pour la Somalie. Le pays peine à venir complètement à bout des extrémistes d’Al-Shebab et compte sur 22.000 gardiens de la paix de la mission de l’Union africaine en Somalie provenant de six autres pays africains. En août 2018, le Conseil de sécurité de l’ONU a prolongé la mission jusqu’en mai 2019.
Le ministre somalien de la Sécurité intérieure Mohamed Moalin Hassan a reconnu les problèmes de son pays pendant le commencement de l’exercice à Djibouti.
« D’une certaine façon, notre participation ici à Cutlass Express constate le long chemin que la Somalie a parcouru au cours des dernières années, déclare-t-il. Mais ceci doit également être modéré par la constatation du long chemin de croissance que nous devons suivre avant que nos droits et que l’architecture de notre sécurité ne soient complètement rétablis. »
La stabilité en Somalie est cruciale pour la sécurité dans la région et au-delà. Le pays possède une côte de 3.000 kilomètres, la plus longue d’Afrique continentale, et relie l’Afrique de l’Est au Moyen-Orient. Malgré les menaces de piraterie, des milliards de dollars en cargo traversent ses eaux tous les ans. Les ressources abondantes du pays, notamment le fer, le cuivre, et l’uranium, sont pour la plupart inexploitées et les scientifiques pensent également qu’il existe d’énormes gisements marins de pétrole.
Le passé militaire du pays est glorieux. Dans les années qui suivirent l’unification du protectorat britannique du Somaliland et de la colonie de Somaliland italienne administrée par l’ONU pour créer un pays en 1960, la Somalie était stable et relativement prospère. Avant le début de la guerre civile, le pays possédait l’une des plus grandes armées du continent.
« Alors que les politiciens galvanisaient le sentiment nationaliste au nom d’une Grande Somalie, le pays cherchait à construire une armée formidable, connue localement sous le nom des “lions d’Afrique” » écrit la journaliste Amanda Sperber pour foreignpolicy.com. « À l’époque, les académies militaires du pays avaient tant de ressources qu’elles disposaient de chars d’assaut supplémentaires pour la formation pratique. »
Plus tard, le pays sombre pendant des décennies dans la dictature militaire, la guerre civile, et à présent l’insurrection armée. Au cours des dernières années, certains Somaliens s’adonnent à la piraterie.
Selon le rapport « L’état de la piraterie maritime 2017 » d’Oceans Beyond Piracy, l’Afrique de l’Est souffre des plus grandes pertes économiques mondiales dues à la piraterie, s’élevant à 1,4 milliard de dollars, en baisse par rapport à 1,7 milliard en 2016. « Cette menace est posée par les vaisseaux qui y sont détournés plus que dans les autres régions, où la nature des incidents est plus liée aux enlèvements pour rançon, ou la capture des cargaisons et des yachts » selon le rapport.
Les Nations unies déclarent que le manque de stabilité gouvernementale en Somalie contribue au problème de la piraterie.
« La Somalie continue à avoir la réputation d’être le point de départ du terrorisme, de la piraterie, du trafic humain et des opérations de contrebande, ce qui nuit aux efforts de commercialisation des ressources marines somaliennes, selon l’ONU. Entre temps, l’incapacité de la Somalie à résoudre cela est constamment considéré comme une des causes sous-jacentes d’instabilité. »
UNE ASSISTANCE MONDIALE
Les Forces armées nationales somaliennes comptent actuellement environ 12.000 soldats actifs et 24.000 autres en réserve. Ses équipements incluent 140 chars d’assaut et 430 véhicules blindés de combat. L’Armée de l’air se reconstruit peu à peu depuis 2012. Le budget actuel pour la totalité des forces armées du pays est de 58 millions de dollars. Les leaders de la Somalie déclarent qu’ils doivent créer une armée de 28.000 soldats professionnels outre une force de police de 12.000.
Les forces armées du pays reçoivent actuellement une formation et une assistance de provenance mondiale :
Des instructeurs des États-Unis ont participé à la formation d’une force de réaction rapide connue sous le nom de « Gaashaan » ou bouclier. Cette force est à même d’opérer dans des conditions difficiles, comme les combats au sein des lignes ennemies. Les forces américaines apportent leur aide pour planifier les raids somaliens contre Al-Shebab et fournissent les hélicoptères transportant les troupes somaliennes vers leurs cibles.
Les Nations unies ont fourni des mentors en application du droit maritime, en génie et en communications qui ont formé des unités de la police maritime et de la Garde côtière somaliennes. La police maritime somalienne a aussi bénéficié d’une formation avancée aux Seychelles sur les opérations de visite, d’abordage, de perquisition et de saisie. Les mentors de l’ONU examinent fréquemment les conditions de sécurité dans les prisons somaliennes pour réduire le risque d’évasions ou de mauvais traitements, notamment pour les prisonniers sujets au programme de transfert des pirates prisonniers.
En 2010, les Nations unies ont établi un fonds financier au soutien des initiatives dans les pays luttant contre la piraterie d’origine somalienne. En 2017, l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime a fait don de 3 nouveau vaisseaux patrouilleurs à l’unité de police maritime. Les yoles sont mieux adaptées aux mers agitées près de Mogadiscio que les boutres qu’elles ont remplacés selon l’ONU. Ces vaisseaux versatiles effectuent à présent des patrouilles autour de Mogadiscio 365 jours par an, après une absence de patrouille régulière de deux décennies.
En 2014, la Somalie a signé des accords de coopération militaire avec l’Italie et les Émirats arabes unis.
En 2016, la Turquie a commencé à construire un nouveau camp militaire à Mogadiscio. La base, où 200 soldats turcs seront situés, est conçue pour la formation des soldats somaliens. La Turquie prévoit également de construire une école militaire.
En mars 2018, la Mission de formation de l’Union européenne en Somalie a conduit une salve d’entraînement utilisant des munitions réelles avec l’unité de police maritime somalienne pour aider celle-ci dans les patrouilles. Les officiers somaliens ont appris la manipulation des fusils et les procédures de champ de tir. L’unité de police maritime a également reçu une formation de l’Union européenne en septembre 2017 qui portait sur les patrouilles et sur l’abordage des vaisseaux. Les formateurs ont déclaré que le but était d’aider la Somalie à protéger son principal port de Mogadiscio, y compris ses abords.
Dans son livre, Modern Maritime Piracy: Genesis, Evolution and Responses (La piraterie maritime moderne : genèse, évolution et réponses), l’auteur Robert C. McCabe écrit qu’un programme d’aide de l’Union européenne mandaté jusque fin 2018 « reflète une évolution au-delà de la piraterie vers une approche plus holistique pour reconstruire et développer les capacités propres de la Somalie en matière de sécurité ».
« La mission étendue fait une priorité du développement des capacités d’application du droit maritime civil pour mener à bien les inspections de pêche et lutter contre le trafic de drogues et la piraterie, écrit M. McCabe. En outre, elle cherche à clarifier la législation pour l’unité de police maritime et la Garde côtière grâce à des programmes de formation et de mentorat dans la “chaîne de justice criminelle” (arrestation, instruction et poursuites), en même temps que la fourniture d’équipement léger. Ce travail est soutenu par des ateliers de formation, des procès simulés et le développement d’un réseau régional de rédacteurs législatifs et de procureurs. »
LES SOMALIENS IMPRESSIONNENT LES FORMATEURS PENDANT CUTLASS EXPRESS
PERSONNEL D’ADF
La participation de la Somalie à Cutlass Express 2018 à Djibouti et aux Seychelles est une preuve de son engagement envers l’amélioration des efforts combinés d’application du droit maritime en Afrique de l’Est et le développement de la sécurité nationale et régionale.
« Que la Somalie fasse partie de tout ceci est absolument phénoménal », déclare le contre-amiral américain Shawn E. Duane. « C’est la première fois qu’ils ont pu participer à un exercice multinational hors de leurs frontières. … Cela reflète d’importants progrès et c’est le type de succès qui est favorisé par Cutlass Express. »
À Djibouti, la Garde côtière des États-Unis et les forces armées turques ont fourni aux participants somaliens un entraînement pratique concernant les missions de visite, d’abordage, de perquisition et de saisie, en plus des abordages de vaisseau à quai et en mer. L’exercice a duré 8 jours et inclus une phase de préparation au port, cinq jours d’exercice et des ateliers aux Seychelles et à Djibouti.
« Nous avons appris ces techniques en classe en Somalie, donc Cutlass Express nous donne l’occasion d’apprendre les applications tactiques avec nos partenaires », déclare le capitaine de la police militaire somalienne Abdulkadir Muktar. « L’application de ce que nous avons appris nous permettra d’améliorer notre objectif de sécurité maritime. »
Selon les instructeurs, les Somaliens ont vite appris et ont montré de quoi ils étaient capables pendant l’exercice final d’abordage.
La Somalie a déjà annoncé qu’elle participerait à Cutlass Express 2019.
Cutlass Express est l’un des trois exercices régionaux de la série Express parrainés par l’état-major unifié des États-Unis pour l’Afrique et menés par les forces navales des États-Unis Europe-Afrique/6ème flotte US. Cet exercice intervient dans le cadre de l’Africa Partnership Station,
un programme cadre pour la série d’exercices Express et les autres soutiens et initiatives de développement des capacités partout en Afrique.
Les pays ayant participé à Cutlass Express 2018 sont : l’Afrique du Sud, l’Australie, le Canada, les Comores, le Danemark, Djibouti, les États-Unis, la France, le Kenya, Madagascar, l’île Maurice, le Mozambique, la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas, les Seychelles et la Turquie.
« Les activités criminelles posent une menace d’envergure pour l’environnement maritime de l’Afrique », déclare Melanie Zimmerman de l’ambassade des États-Unis à l’île Maurice et aux Seychelles. « Il existe des défis qu’aucune nation n’est en mesure de relever seule, mais si nous travaillons ensemble, il devient possible de surmonter ces défis. »