Cette souveraine de la région connue aujourd’hui comme l’Angola a repoussé les conquérants potentiels pendant des décennies
PERSONNEL D’ADF
Dans le Sud-Ouest africain, nul ne fut un défenseur plus acharné que la reine Nzinga du Ndongo lorsqu’elle régnait sur la région qui constitue aujourd’hui l’Angola. Elle lutta pour protéger son peuple des marchands d’esclaves pendant la majeure partie de sa longue vie.
Il faut dire qu’elle maîtrisait parfaitement le sujet. L’expert américain John Henrik Clarke la décrit comme « le plus grand stratège militaire qui ait jamais confronté les forces armées du Portugal ».
Ana Nzinga naquit vers 1580 à Kidonga, capitale du royaume. Son père était roi et il fut succédé au trône par son fils, Ngola Mbande. « Ngola » veut dire « roi », mais les Portugais comprirent par erreur qu’il s’agissait du nom du pays : d’où le nom d’Angola.
À l’époque, les Anglais et les Français décidèrent de s’immiscer dans la traite d’esclaves du Portugal sur l’Atlantique. Les Portugais répondirent en se rendant dans d’autres régions d’Afrique. C’est ainsi qu’en 1617, ils décidèrent de construire un fort et d’établir une colonie sur la côte du sud-ouest, là où se trouve aujourd’hui la ville de Luanda. Cinq années plus tard, ils invitèrent Mbande à entamer des négociations pour la paix, mais celui-ci décida d’envoyer sa sœur à sa place.
Les rencontres se déroulèrent dans un contexte exceptionnellement difficile. Les Portugais contrôlaient déjà le Congo voisin, et Nzinga dut négocier un moyen pour que le royaume de son frère puisse continuer à traiter avec le Portugal sans pour autant être mis sous sa coupe. Pour la première réunion, ses hôtes fournirent une chaise destinée uniquement au gouverneur portugais. On s’attendait à ce qu’elle s’asseye sur un tapis placé au sol, dans une position subordonnée. Or Nzinga ne voulut rien savoir et ordonna à un membre de son entourage de se mettre à quatre pattes pour qu’elle puisse s’asseoir sur son dos en guise de chaise.
En 1626, son frère mourut. Selon une version de l’histoire, il s’agissait d’un suicide car il ne pouvait pas faire face aux demandes du Portugal concernant la traite des esclaves. Nzinga hérita alors du trône et prit des mesures agressives, en créant des alliances avec les états rivaux. En 1627, elle attaqua les Portugais, lançant une guerre qui dura 30 ans.
Nzinga fut un chef militaire ingénieux au sein d’une guerre étendue et intermittente. Elle offrit un sanctuaire aux esclaves en fuite et aux soldats déserteurs. Elle créa un système sous lequel les jeunes hommes renonçaient à leurs familles pour être élevés dans des fraternités de soldats.
En 1641, la reine Nzinga s’allia aux Néerlandais, qui avaient pourtant été des rivaux de son royaume par le passé. Ensemble, ils écrasèrent les Portugais en 1647. Le Portugal battit les Néerlandais un an plus tard, ce qui força ces derniers à abandonner certaines portions de l’Afrique. Cela n’arrêta pas la reine, qui continua de mener le combat contre le Portugal, conduisant souvent elle-même ses troupes à la bataille, et ce même lorsqu’elle avait plus de 60 ans.
La reine Nzinga mit en œuvre des tactiques de guérilla contre son ennemi. Le Portugal et ses alliés répondirent à ces attaques en essayant de trouver et de détrôner la reine. Néanmoins, elle resta éternellement insaisissable et finit par décéder de mort naturelle en 1663, plusieurs années après la fin des combats, alors qu’elle était octogénaire.
Aujourd’hui, on se souvient d’elle comme une diplomate brillante, une experte en tactiques militaires et un persécuteur perpétuel de ses conquérants potentiels. Les historiens déclarent que l’indépendance de l’Angola en 1975 trouve son origine dans les tactiques de guérilla déployées par Nzinga. En 2002, l’Angola consacre une statue de Nzinga à Luanda pour célébrer les 27 ans d’indépendance du pays.