PERSONNEL D’ADF
Golden Top Support Services, située dans un quartier chic de Lusaka (Zambie), se faisait passer pour un centre d’appels normal. Mais c’était en fait une opération criminelle cyber appartenant à des Chinois, qui utilisait WhatsApp, Telegram et d’autres plateformes de communication pour voler l’argent des personnes.
Les autorités zambiennes ont arrêté plus de 90 personnes ayant participé aux arnaques : 77 lors du raid des bureaux de Golden Top au début avril et 17 autres le 23 avril. Parmi les gens arrêtés dans les deux incidents, on compte 35 ressortissants chinois ainsi que 70 employés zambiens au début de la vingtaine. Certains des Zambiens ont été plus tard libérés sous caution. Des ressortissants vietnamiens et camerounais ont aussi été détenus au cours des raids.
Parmi les ressortissants chinois arrêtés lors du deuxième incident, neuf au moins étaient dans le pays illégalement, sans papiers, ou travaillaient illégalement, selon les autorités zambiennes.
« Nous souhaitons avertir les ressortissants étrangers qui entrent intentionnellement dans le pays sous de mauvais prétextes qu’ils seront arrêtés, traduits en justice et déportés du pays », a déclaré Namati Nshinka, porte-parole du service d’immigration, au moment de l’annonce des arrestations du 23 avril.
Parmi les articles saisis dans le raid de Golden Top se trouvent des dispositifs qui camouflaient l’emplacement des appels sortants du centre d’appels, ainsi que 2 armes à feu, 78 munitions, 97 ordinateurs de bureau, 42 ordinateurs neufs et plus de 13.000 cartes SIM fabriquées par Airtel, MTN et Vodafone. Au cours des arrestations du 23 avril, les autorités ont saisi près de 100 cartes SIM additionnelles, ainsi que des véhicules et plus de 1.000 dollars en espèces.
Les investigateurs ont aussi trouvé 11 boîtes SIM qui permettent aux appelants de contourner les réseaux téléphoniques. Les autorités ont saisi six propriétés liées à Golden Top, notamment une maison de luxe en bordure d’un lac.
Les victimes de l’arnaque de Golden Top provenaient de toute l’Afrique, en plus de gens situés dans des pays tels que les Émirats arabes unis, le Pérou et Singapour.
« La Zambie est un pays pacifique et les Zambiens accueillent tous ceux qui veulent faire des affaires avec eux. Les acteurs malveillants en profitent », a écrit le chercheur en cybersécurité Ali Kingston Mwila sur LinkedIn après la première série d’arrestations.
Au cours des dernières années, la Zambie a commencé à réprimer la cybercriminalité sur son territoire. La loi n°2 de 2021 sur la cybersécurité et les cybercrimes a créé un système pour répondre aux incidents de cybercriminalité et un comité pour orienter la politique sur la cybercriminalité dans le but de protéger les citoyens zambiens et leurs données contre les arnaqueurs.
Une étude de 2023 conduite par des chercheurs de Liquid Intelligence Technologies, basée à Lusaka, a découvert que la cybercriminalité était en hausse en Zambie malgré les efforts du gouvernement pour la contrôler.
À mesure que l’utilisation de l’Internet augmente en Zambie, il en est de même de la cybercriminalité, en grande mesure parce que les nouveaux internautes zambiens n’ont pas les connaissances suffisantes des arnaques potentielles pour pouvoir se protéger, selon les chercheurs Gerry Mutibo Siampondo et Bwalya Chansa.
Dans un article pour le Journal of Information Security, ils ont noté que les chiffres du gouvernement montrent que plus de 10 millions de cyberattaques ont pris pour cible des habitants et des commerces zambiens en 2021. Ces attaques ont conduit à 50.000 investigations de cybercriminalité. En 2022, le nombre d’investigations a doublé pour atteindre 100.000.
« La montée du nombre de cas signalés indique que la cybercriminalité représente un danger croissant pour la Zambie », écrivent les chercheurs.
La Zambie a répondu à l’augmentation de la cybercriminalité en créant des agences telles que l’autorité de la technologie de l’information et des communications de Zambie et l’unité de cybersécurité et de cybercriminalité du service de police de Zambie. Bien que ces organismes aient enregistré des succès contre les cybercriminels, les efforts d’ensemble contre la cybercriminalité restent mal financés et mal pourvus en personnel, selon les chercheurs.
Le cadre judiciaire existant de la Zambie doit être mis à jour pour faire face aux menaces cybernétiques en évolution, selon les chercheurs.
« Grâce à l’encouragement des collaborations entre les entités publiques et privées, le gouvernement peut maîtriser l’expertise et les avancées technologiques du secteur privé pour améliorer globalement la résilience du pays en matière de cybersécurité », ont écrit les chercheurs dans leur rapport.
Mwenge Mulenga, porte-parole de la commission zambienne de mise en application des lois sur la drogue, a déclaré après le raid contre Golden Top que le gouvernement s’était engagé à soumettre par la force les cybercriminels.
« Nous allons arrêter ces criminels, déclare-t-il. Nous ne céderons absolument pas. Il n’y aura pas de vaches sacrées. »