6 MENACES MAJEURES POUR LA SÉCURITÉ HUMAINE SONT INTERCONNECTÉES
PERSONNEL D’ADF
Les menaces pour la sécurité ne se mesurent pas toujours en armes, balles et conflits armés. Parfois, les choses qui menacent le plus les communautés, et les pays, sont enracinées dans l’environnement ou dans les interactions au jour le jour entre les personnes et la terre qui les entoure.
De nombreuses menaces pour la sécurité humaine sont en apparence disparates et aléatoires. Mais en y regardant de plus près, on constate que la plupart d’entre elles sont interconnectées. Si l’une d’entre elles devient plus grave ou s’intensifie, cela peut exacerber les effets des autres. Les résultats peuvent être d’aussi grande ampleur et aussi catastrophiques que la guerre ou les troubles civils.
Lorsque l’on se penche sur les changements climatiques, la sécurité alimentaire, la croissance démographique, l’eau potable, la sécurité énergétique et le braconnage des espèces sauvages, les liens deviennent apparents.
Les changements climatiques peuvent entraîner des épisodes de sécheresse. Des épisodes de sécheresse prolongée peuvent assécher des lacs riches en poisson et diminuer le rendement des récoltes. Ceci peut conduire à une insuffisance de la sécurité alimentaire dans des pays ou des régions entières, parallèlement à la réduction des sources de nutrition.
Simultanément avec ces développements, certaines projections indiquent que la population de l’Afrique pourrait doubler et ultérieurement quadrupler d’ici à la fin du siècle. Lorsqu’une région ne peut plus subvenir aux besoins d’une population, souvent ses habitants migrent, pesant de la sorte sur la sécurité alimentaire dans de nouvelles régions.
L’augmentation des besoins en matière d’eau potable reflètera la progression de la croissance démographique. Les besoins d’approvisionnement en eau, en particulier pour satisfaire à la fois les agriculteurs et les communautés pastorales, mènent souvent aux troubles civils et à la violence. Avec les changements climatiques, le niveau des précipitations peut diminuer, mettant en danger les récoltes, la sécurité alimentaire et la disponibilité de l’eau.
La croissance démographique accroîtra également la demande d’électricité et de sécurité énergétique. De nombreux pays africains seront soumis à rude épreuve pour fournir les infrastructures nécessaires à la production et à la transmission d’électricité fiable à des populations croissantes.
Enfin, le braconnage des espèces sauvages peut ne pas paraître lié à d’autres enjeux de sécurité humaine, mais les changements climatiques aggravent manifestement les risques pour les animaux menacés d’extinction. La fluctuation des niveaux de précipitations peut engendrer des inondations et des épisodes de sécheresse, forçant les animaux à s’aventurer hors des réserves naturelles ou de leur habitat naturel en quête de nourriture ou d’eau. De tels déplacements peuvent les rendre plus vulnérables aux braconniers. Le massacre résultant de cette situation, qui par moments se produit quasiment à une échelle industrielle, pèse sur le tourisme.
Voici une perspective statistique des six menaces pour la sécurité humaine.
L’Afrique est le deuxième continent le plus sec de la Terre. Au fur et à mesure que la population continuera à augmenter et que les températures mondiales s’élèveront, la disponibilité de l’eau potable et de l’eau pour l’agriculture, sera une source d’inquiétude majeure.
Il y a de nombreux défis à relever. Seules 15 pour cent des ressources hydriques renouvelables de l’Afrique sont des eaux souterraines, mais près de 75 pour cent de la population en dépend pour ses besoins en eau potable, comme le montre Africa Water Atlas du Programme des Nations Unies pour l’environnement. De nombreux aquifères africains, tels que l’aquifère des grès de Nubie, perdent de l’eau à un rythme dépassant celui de leur reconstitution.
De nombreux pays africains rencontrent des difficultés pour assurer l’amélioration des sources hydriques. En 2015, moins des trois quarts des populations de la Guinée équatoriale, de l’Érythrée, de la Mauritanie, du Soudan du Sud et du Soudan avaient accès à une source d’eau potable améliorée, selon la Banque mondiale. De telles sources améliorées incluent l’eau courante à domicile, dans les parcelles ou enclos, les robinets publics ou les bornes publiques, les puits tubulaires et les trous de forage, les puits creusés protégés, la collecte d’eau de pluie et les sources protégées.
Les vastes superficies de l’Afrique incluent au moins huit zones climatiques, dont les forêts tropicales humides, le désert, la zone subtropicale, la savane, les hautes terres et la zone maritime. La pluviométrie peut s’échelonner de 5 centimètres par an dans le désert jusqu’à 4 mètres dans les forêts tropicales.
Les conditions climatiques sont en évolution dans l’ensemble du continent. Les épisodes de sécheresse deviennent plus courants à travers le Sahel, et au fur et à mesure que les températures augmentent, le Sahara s’étend vers le sud. Cette désertification est la plus répandue dans les zones où les habitants ont abattu les arbres et les forêts pour en faire des terres agricoles ou obtenir du bois pour faire du feu.
La sévérité des effets du changement climatique sur les niveaux de la pauvreté en Afrique sera déterminée en grande partie par les orientations publiques ou les politiques économiques concernant les emplois, la technologie et le développement, selon une étude du Groupe de la Banque mondiale parue en 2016.
La sécurité alimentaire peut être affectée par toute une série de problèmes liés à la sécurité humaine. Les changements climatiques et les variations météorologiques du type d’El Niño peuvent peser lourdement sur les rendements agricoles et précipiter une crise dans les approvisionnements et les coûts alimentaires régionaux.
Le climat amplifie la faim et la pauvreté, problèmes déjà endémiques en Afrique : 1 personne sur 4 en Afrique subsaharienne est sous-alimentée.
L’Afrique a également sa part de conflits. Ces troubles contribuent à la pauvreté et à la faim. « Les taux de pauvreté sont de 20 pour cent plus élevés dans les pays affectés par des cycles répétés de violence au cours des 30 dernières années », selon un rapport de 2011 de la Banque mondiale. « Les gens qui vivent dans des pays actuellement affectés par la violence sont deux fois plus susceptibles d’être sous-alimentés et sont 50 fois plus susceptibles de vivre dans la pauvreté ».
BRACONNAGE DES ESPÈCES SAUVAGES
Éléphants, rhinocéros et autres animaux exotiques sont victimes des braconniers à un rythme alarmant en Afrique. L’ivoire et la corne de rhinocéros rapportent d’énormes sommes d’argent sur le marché noir, en particulier dans les pays asiatiques tels que la Chine et le Vietnam.
Ce commerce illégal met en danger certains des animaux considérés comme les plus précieux de l’Afrique et qui rapportent beaucoup d’argent par le biais du tourisme national.
Les éléphants et les rhinocéros ne sont pas les seuls animaux victimes du braconnage en Afrique. Plusieurs espèces d’oiseaux, dont les canards et les perroquets, sont visées par les braconniers, ainsi que les papillons, les pangolins, les singes, les chimpanzés, et même les requins.
Les pertes sont stupéfiantes. Selon un rapport paru en août 2015 dans le National Geographic, le Parc national Zakouma, au Tchad, a perdu près de 90 pour cent de ses éléphants depuis 2002, et jusqu’à 3.000 entre 2005 et 2008. En 2012, des braconniers soudanais et tchadiens ont pénétré à cheval dans le Parc national de Bouba N’Djidah au Cameroun, où ils ont tué jusqu’à 650 éléphants en quatre mois.
Le World Wildlife Fund rapporte que le braconnage est le cinquième commerce illicite le plus lucratif au monde, rapportant jusqu’à 10 milliards de dollars par an.
Un signe certain d’un développement efficace est le nombre de personnes ayant accès à l’électricité. L’Afrique a un remarquable potentiel dans ce domaine, mais beaucoup reste à faire. La demande énergétique en Afrique subsaharienne a augmenté d’environ 45 pour cent de 2000 à 2012, mais plus de 620 millions de personnes de cette partie du continent n’ont toujours pas accès à l’électricité, selon un rapport de 2014 de l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
En réalité, en 2012, moins de 10 pour cent de la population de cinq pays africains avait accès à l’électricité : le Burundi, le Tchad, le Liberia, le Malawi et le Soudan du Sud, d’après la Banque mondiale.
Toutefois, il y a des raisons de garder bon espoir : d’ici à 2040, 950 millions de personnes en Afrique subsaharienne devraient obtenir l’accès à l’électricité. Les résidents urbains seront connectés au réseau, et les populations rurales y auront accès par l’intermédiaire de solutions hors réseau et d’énergies renouvelables, lesquelles encouragent l’investissement privé, selon l’AIE.
L’Afrique est le deuxième continent le plus peuplé au monde, derrière l’Asie. Toutefois, elle est sur le point de connaître une croissance démographique à un taux exceptionnel d’ici à la fin du siècle.
Les populations de 28 pays africains, c’est-à-dire plus de la moitié des pays du continent, devraient plus que doubler entre 2015 et 2050, selon les « Perspectives de la population mondiale : Révision de 2015 ». D’ici à 2100, 10 pays africains devraient voir leur population multipliée au moins par cinq : l’Angola, le Burundi, la République démocratique du Congo, le Malawi, le Mali, le Niger, la Somalie, la Tanzanie, l’Ouganda et la Zambie.
Les évolutions démographiques seront probablement au cœur de divers défis à relever en termes de sécurité humaine. Des migrations se produiront dans les zones de conflits et là où les retombées des changements climatiques seront les plus sévères. L’accroissement de la densité démographique peut intensifier la propagation des maladies et mettre à l’épreuve les ressources hydriques. Enfin, si la croissance démographique n’est pas accompagnée d’une croissance économique, la frustration peut gagner les jeunes gens au chômage. Ceci les rend plus vulnérables au recrutement par des groupes extrémistes ou peut les inciter à risquer leur vie en tant que migrants.