Les subsides permettent à la flotte de pêche chinoise de continuer à naviguer
PERSONNEL D’ADF
La Gambie a enregistré des progrès dans sa lutte contre la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (IUU) en novembre lorsque les autorités ont arrêté quatre chalutiers dans les eaux territoriales réservées aux pêcheurs locaux. Ces arrestations ont été effectuées avec l’aide de Sea Shepherd Global.
Le fait que ces chalutiers étaient chinois n’est pas surprenant, puisque la majorité des navires arrêtés grâce au partenariat entre la Sea Shepherd et les pays africains appartiennent à des Chinois ou battent pavillon chinois, déclare Peter Hammarstedt, directeur des campagnes de la Sea Shepherd, à ADF dans un e-mail.
La capacité que possède la Chine pour la pêche d’une portée mondiale dépend en grande partie des subsides de son gouvernement. Aucune autre nation ne verse autant de subsides de pêche que la Chine, qui a payé 7,2 milliards de dollars, soit 21 % environ du total mondial, en 2018, selon un rapport de ScienceDirect.com.
Tabitha Grace Mallory, professeur à l’Université de Washington qui se spécialise dans les politiques de pêche chinoises, déclare à ADF dans un e-mail : « La majeure partie, et la partie la plus importante, des subsides de la flotte [chinoise] DWF [de pêche en eaux distantes] concerne les subsides de combustible, parce que le combustible coûte très cher, en particulier lorsque les vaisseaux naviguent sur de grandes distances pour aller pêcher. »
« Toutefois, le gouvernement a aussi soutenu de façon considérable la rénovation des navires de pêche existants et la construction de nouveaux navires », ce qui permet à la flotte DWF chinoise d’attraper davantage de poissons. Le professeur Mallory, qui est aussi fondatrice du China Ocean Institute, ajoute : « Une partie de cet argent est affectée à l’amélioration des vaisseaux de pêche pour qu’ils puissent satisfaire aux normes de sécurité internationales. En 2012, seulement 8 % des navires DWF chinois satisfaisaient à ces normes. »
Les chalutiers chinois ont la réputation d’utiliser des techniques de pêche illégale pour décimer les stocks de poissons, priver les résidents locaux de nourriture et de revenus, et détruire les écosystèmes au large des côtes d’Afrique et dans le monde entier.
Deux des chalutiers chinois arrêtés récemment en Gambie ont été accusés d’utiliser des doubles filets, c’est-à-dire de pêcher avec un filet à l’intérieur d’un autre pour éviter la réglementation concernant la taille des mailles. Un autre vaisseau est accusé de pêcher avec un filet dont les mailles ont une taille incorrecte.
Mar Casariego, capitaine du navire de la Sea Shepherd qui a participé aux arrestations, déclare sur le site Web de l’organisation : « La Gambie impose des spécifications sur la taille des mailles pour assurer que les poissons plus petits ou juvéniles puissent s’échapper, ce qui permet de conserver les stocks de poissons pour atténuer la surexploitation. Mais en mer les patrouilles sont nécessaires pour assurer la conformité et dissuader les chalutiers industriels de pénétrer dans les zones protégées. »
La Chine a imposé chez elle des interdictions de pêche strictes et a réduit les pratiques de chalut destructrices pour essayer de restaurer ses stocks de poissons locaux. Une interdiction de pêche de 10 ans a été instaurée pour le fleuve Yangzi Jiang, d’une longueur de 6.300 kilomètres, en réponse à une baisse importante de la prise de poissons nationale, qui est passée de 7,65 millions de tonnes en 2017 à 6,82 millions de tonnes en 2019.
« Nous ne savons pas si la même importance a été accordée à la réduction de la pêche au chalut pour la flotte DWF chinoise, déclare Mme Mallory. Plus récemment, la Chine a aussi fourni des subsides à la construction de bases DWF à l’étranger, et aussi au transport des [poissons] attrapés par la flotte chinoise pour les importer en Chine. »
Le nombre exact de vaisseaux dans la flotte DWF chinoise est difficile à évaluer, car de nombreux vaisseaux battent pavillon étranger, surtout des pavillons de pays africains, selon la Coalition pour des accords de pêche équitables. La Chine affirme qu’elle limitera sa flotte DWF à un maximum de 3.000 chalutiers, mais des études telles que celle conduite par l’Overseas Development Institute indiquent que ce chiffre est plus proche de 17.000 navires.
Les chercheurs déclarent que, sans subsides, la flotte DWF chinoise serait une fraction de ce qu’elle est actuellement. La suppression des subsides assurerait que les poissons soient plus abondants et moins chers, ce qui aiderait en particulier les pays plus pauvres.
Daniel Pauly, scientifique de la pêche à l’Université de la Colombie-Britannique, déclare au magazine Foreign Policy : « S’ils mettaient fin aux subsides, les prises diminueraient de moitié, les stocks de poissons se rétabliraient rapidement et leur nombre doublerait. Vous pourriez alors doubler de façon durable la prise initiale, ce qui rendrait la pêche plus économique, sans besoin de subsides, et il ne serait pas nécessaire de créer tant d’élevages de poissons. »
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