PERSONNEL D’ADF
Lorsque les troupes contrôlées par le général libyen Khalifa Haftar ont récemment battu en retraite aux abords Sud de Tripoli, elles ont laissées derrière elles des mines terrestres piégées dans le but de mutiler et de tuer les résidents qui retournaient chez eux. Un grand nombre de ces mines étaient d’origine russe ou soviétique ; elles portaient la carte de visite des mercenaires appartenant au Groupe Wagner, soutenu par le Kremlin.
L’état-major unifié des États-Unis pour l’Afrique (AFRICOM) a récemment annoncé qu’il possédait des preuves photographiques du rôle du Groupe Wagner dans le minage des quartiers de Tripoli, dans le cadre du soutien russe fourni au général Haftar dans la guerre civile en cours. La milice du général Haftar, appelée Armée nationale libyenne, ainsi que la Chambre des représentants basée à l’Est, opposent le gouvernement d’entente nationale (GNA) basé à Tripoli et reconnu par les Nations unies.
« Des évaluations de l’imagerie et des renseignements montrent comment la Russie continue à interférer dans les affaires libyennes. L’utilisation irresponsable par le Groupe Wagner des mines terrestres et des pièges heurte les civils innocents », déclare le contre-amiral Heidi Berg, directrice du renseignement de l’AFRICOM.
L’AFRICOM confirme ce que Muhammed Barghuth, résident de Tripoli, avait suggéré à la fin mai lorsqu’il avait déclaré à Al Jazeera qu’il était rentré chez lui pour découvrir que sa maison avait été utilisée comme base d’opération par les Russes.
« Nous avons trouvé des articles russes, notamment du papier à lettre militaire et des munitions, partout dans la maison », déclare M. Barghuth.
La Libye n’est pas le seul pays africain affecté par le Groupe Wagner. Des groupes russes de sécurité privée sont actifs dans 15 autres nations du continent, selon l’AFRICOM.
Le quotidien turc Daily Sabah, citant la page Facebook de l’armée libyenne, signale le 21 juillet qu’une mine terrestre laissée par les forces du Groupe Wagner dans la région de Qasr bin Ghashir avait explosé le jour précédent, en tuant un enfant et une autre personne.
Alors que la Libye possédait d’énormes stocks de munitions non contrôlées après le renversement de Mouammar Kadhafi en 2011, des images publiées par les partisans du GNA sur Twitter et Facebook montrent des soldats turcs et libyens qui désarment les mines, dont beaucoup portent des signes en russe.
Les responsables américains déclarent que la Russie a fourni des armements, notamment plus d’une douzaine d’avions de chasse MiG-29 avec leurs inscriptions russes couvertes, à l’encontre de l’embargo d’armes ordonné par les Nations unies en Libye, ce qui a exacerbé encore plus le conflit.
En partie à cause de l’opération de minage, les États-Unis ont aussi sanctionné trois personnes et cinq organisations liées au Groupe Wagner. Elles ont toutes des liens avec Evgueni Prigojine, qui est lui-même un proche du président Vladimir Poutine de Russie et considéré comme le bailleur de fonds du Groupe Wagner.
« Le Groupe Wagner parrainé par la Russie démontre un mépris complet de la sûreté et la sécurité des Libyens », déclare le major-général Bradford Gering, directeur des opérations de l’AFRICOM. « Les tactiques irresponsables du Groupe Wagner prolongent le conflit et provoquent la souffrance et la mort inutiles des civils innocents. La Russie a le pouvoir de les arrêter, mais elle ne le souhaite pas. »
Malgré le retrait de plusieurs centaines de mercenaires du Groupe Wagner hors de Tripoli, la Russie reste presque certainement engagée à soutenir le général Haftar et continuera à fournir un soutien militaire à la LNA, selon Brian Katz, associé du programme de sécurité internationale du Centre pour les études stratégiques et internationales.
Lors d’un briefing le 13 juillet, Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général des Nations unies António Guterres, déclare que 52 personnes ont trouvé la mort et 96 ont été blessées par des pièges explosifs alors qu’elles rentraient chez elles ou lors du déminage des zones pleines de mines.
Quelques jours plus tard le 16 juillet, le site Web du Libya Observer signale que trois jeunes enfants ont été blessés par une explosion de mine terrestre dans une maison de la région d’Al-Khalla à Tripoli.
Les mines terrestres laissées par le Groupe Wagner compliquent encore plus les efforts de la Libye pour résoudre son conflit de longue date et rechercher une solution pacifique pour la vie du pays après le colonel Kadhafi, selon les analystes.
« Cette utilisation toute récente des mines terrestres alourdit le fardeau déjà considérable de la Libye concernant les mines actives, les munitions abandonnées ou non explosées, et les dangers qui affecteront les Libyens pendant de nombreuses années à venir », déclare Stephen Goose, fondateur de la Campagne internationale pour l’interdiction des mines antipersonnel.