PERSONNEL D’ADF
Les Africains qui vivent à Canton en ont assez d’être expulsés de leur foyer, d’être forcés d’obéir à un ordre de quarantaine, de ne pas pouvoir accéder aux hôtels ou aux restaurants, parce que les gens craignent qu’ils vont propager le Covid-19 mortel dans la troisième ville de Chine.
Une étudiante de Sierra Leone a déclaré à la BBC que le traitement discriminatoire des autorités chinoises était suscité par une augmentation des cas de Covid-19 provenant d’autres pays, bien qu’un petit pourcentage seulement de cas positifs ait été noté parmi les Africains. Depuis longtemps, Canton a la plus grande communauté africaine de la Chine.
La femme, qui n’a pas révélé son nom, a déclaré qu’elle avait reçu une lettre de son université selon laquelle tous les Africains devaient être sujets au dépistage pour le Covid-19. Bien que ses analyses aient été négatives à deux reprises, elle a été forcée de rester en quarantaine.
« Avec tout ce qui se passe, les Chinois ont exposé leur racisme et leur discrimination contre les Noirs ici à Canton, déclare la femme. Je connais des gens de mon église qui sont des Blancs non africains et qui ne subissent pas ce que nous subissons : la quarantaine et les analyses multiples. Les hôtels de quarantaine ressemblent à des lieux de détention forcée pour les Noirs. »
Les affichages sur les réseaux sociaux montrent des Africains expulsés de leur foyer et grelottant dans les rues, parfois avec leurs enfants
Une vidéo diffusée sur le canal New Tang Dynasty Television, société de radiodiffusion qui se concentre sur la Chine et couvre souvent des sujets censurés en Chine continentale, montre un grand nombre d’Africains expulsés à tort qui errent sans but dans les rues de Canton en traînant leurs bagages. Ils portent tous des masques pour empêcher la propagation du Covid-19.
« Nous marchons simplement sur la route, déclare un homme. Ils ne peuvent pas nous donner de maison, ils ne peuvent pas nous donner de chambre d’hôtel, ils ne peuvent pas nous fournir d’endroit où nous pouvons rester. »
La réaction à ce mauvais traitement a été rapide de la part des leaders mondiaux : les ministres des Affaires étrangères du Nigeria, de l’Ouganda et du Ghana ont communiqué avec leurs homologues chinois pour mettre fin à cet abus.
« Mon bureau a invité M. Liu Yuxi, ambassadeur de Chine auprès de l’UA, pour exprimer notre extrême préoccupation concernant les allégations de mauvais traitement des Africains à #Guangzhou, et a demandé la prise immédiate de mesures correctives en vertu de nos excellentes relations », a déclaré sur Twitter Moussa Faki Mahamat, président de la commission de l’Union africaine.
Shirly Ayorkor Botchwey, ministre des Affaires étrangères du Ghana, a dénoncé le traitement des Ghanéens et des autres Africains en Chine comme étant « inhumain ».
« Je regrette et condamne fortement cet acte de mauvais traitement et de discrimination raciale », a déclaré Mme Botchwey sur Twitter.
La réponse du Kenya à la discrimination contre ses ressortissants a été également cinglante.
« En réalité, il s’agit d’un résultat tout à fait regrettable. Les Africains, et notamment les Kényans, ont été victimes de discrimination dans le cadre du processus de réponse du gouvernement provincial pour essayer de contrôler la situation à laquelle il faisait face à la suite de la crise », a déclaré Macharia Kamau, secrétaire principal des Affaires étrangères, lors d’une conférence de presse. « Malheureusement, ils se sont montrés discriminatoires et ont ciblé divers étrangers lors de leur réponse. »
Une telle réaction signale que les leaders africains ont « établi de nouvelles limites avec leurs homologues chinois », selon la déclaration de Judd Devermont, directeur du programme Afrique au Centre pour les études stratégiques et internationales, à l’hebdomadaire sud-africain Mail & Guardian.
« Les réprimandes africaines faites à la Chine sont rarement aussi fortes ou aussi publiques, déclare M. Devermont. Les liens africains avec la Chine demeureront étroits, mais cela peut présager certains changements de comportement et de ton. »
Les utilisateurs des réseaux sociaux ont accédé au hashtag #ChinaMustExplain de Twitter pour exprimer leur colère, leur frustration et leurs inquiétudes.
« Les vies africaines ne sont pas au rabais », déclare sur Twitter Mmusi Maimane, politicien sud-africain et ancien chef de l’Alliance démocratique, parti politique sud-africain d’opposition. « Le seul fait que nos ressources soient vendues bon marché ne donne à aucun pays le droit de nous traiter comme des bestiaux. Nous ne pouvons simplement pas détourner les yeux lorsque nos frères et nos sœurs sont stigmatisés et traumatisés. »
Un autre abonné de Twitter utilisant le nom Qweencass a affiché l’histoire d’une femme noire enceinte en Chine qui s’est vue refuser l’admission à un hôpital à cause de sa race.
Qweencass écrit : « Je suis dégoûté par la Chine ! Le fait que les choses aboutissent à ce point extrême est hallucinant et tout le monde se tait. Je ne les vois pas outragés. »
Les Africains de Canton se sont aussi tournés vers les réseaux sociaux pour s’informer mutuellement sur les nombreux hôtels et hôpitaux où les hommes d’affaire, les résidents et les étudiants sont détenus dans la ville, selon un reportage de la BBC. Certains ont affiché les résultats des analyses montrant qu’ils étaient négatifs pour le Covid-19. D’autres ont affiché des factures médicales et d’hôtel qu’ils ne peuvent pas payer.
Les responsables américains ont aussi exprimé leur consternation sur le traitement sévère des Africains en Chine. Tibor Nagy, secrétaire d’état adjoint américain pour les affaires africaines, a exhorté les autorités chinoises à mettre fin à la discrimination.
« Les vidéos et les histoires provenant de #Guangzhou sont épouvantables. L’abus et la xénophobie n’ont pas de place dans notre lutte contre cette pandémie mondiale », a déclaré M. Nagy sur Twitter. « Les autorités chinoises doivent faire davantage d’efforts pour arrêter ces attaques contre les Africains qui vivent et qui travaillent en Chine. »