PERSONNEL D’ADF
Après six mois de retard et des défis logistiques, la Force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est (EACRF) a achevé son déploiement en République démocratique du Congo (RDC) le 3 avril.
Des milliers de soldats sont arrivés ; ils ont pour mission d’instaurer l’ordre au milieu du chaos des provinces orientales tourmentées par la violence, où sévissent plus de 120 groupes armés.
« L’EACRF repositionne ses troupes dans les territoires de Rutshuru et Masisi, ce qui fait du Nord-Kivu un secteur multinational », a déclaré la force le 10 février, en faisant appel au déploiement immédiat de tous les soldats engagés.
Les chefs militaires de la CAE (Communauté d’Afrique de l’Est) ont convenu d’envoyer des soldats dans les zones précédemment occupées par les rebelles du M23 pour superviser un retrait en étapes et protéger les civils. Ils ont répété l’avertissement selon lequel tous les groupes armés de la RDC doivent déposer leurs armes, sinon ils seront attaqués par les forces de toute la région.
Les chefs de la CAE avaient approuvé le premier déploiement d’une nouvelle force régionale le 20 juin 2022, mais ils ont dû attendre jusqu’en novembre pour l’entrée à Goma (capitale du Nord-Kivu) du contingent kényan de 1.000 soldats environ, le premier des quatre contingents qui avaient été promis.
Les M23 dirigés par des Tutsis ont réapparu après dix années d’inactivité en 2021. Ils ont lancé une offensive majeure en 2022 en capturant de vastes territoires du Nord-Kivu et en forçant des centaines de milliers de personnes à s’enfuir.
La RDC et les experts indépendants des Nations unis accusent le Rwanda de soutenir les M23, ce que le Rwanda a nié.
Lorsque les forces kényanes sont arrivées en 2022, les Congolais pensaient que l’EACRF mettrait rapidement en déroute les rebelles du M23 et les chasserait des territoires qu’ils avaient occupés pendant des mois.
Mais à la surprise des responsables gouvernementaux de la RDC, les chefs militaires régionaux ont insisté qu’ils n’étaient pas autorisés à engager les rebelles dans des combats.
Pendant plusieurs semaines au mois de mars, il n’y a pas eu d’affrontement majeur entre les forces congolaises et les M23, mais les rebelles ont été accusés d’exécuter sommairement des civils et ont combattu fréquemment les milices pro-gouvernementales locales.
En date du 5 avril, l’EACRF n’a toujours pas fait feu, selon le journal The East African, mais sa présence s’intensifie et cela fait la différence.
Le Kenya a transporté par avion le premier contingent du Burundi, d’environ 100 soldats, à Goma le 5 mars. Ils ont été déployés dans la commune voisine de Sake à environ 15 km à l’Ouest et ils ont été rapidement attaqués par les rebelles du M23 qui cherchent à encercler la ville.
Après l’arrivée de troupes additionnelles du Burundi le 15 mars, le contingent a avancé plus à l’Ouest pour saisir des emplacements clés occupés précédemment par les rebelles du M23. On pense que les soldats se dirigeront vers le Nord, de Sake à Kitchanga, autre centre commercial crucial.
« Le M23 s’est retiré de Sake, Karuba, Mushaki, Neenero, Kirolirwe, Kibirizi, Mweso et les zones voisines », a déclaré l’EACRF le 23 mars.
Les 2 et 3 avril, le Kenya a transporté par avion le contingent de 340 soldats du Soudan du Sud à Goma ; ceci a marqué l’étape finale du déploiement du block régional.
L’engagement de déploiement des soldats tanzaniens dans le cadre de l’EACRF demeure incertain. Mais on a compté dernièrement en 2022 environ 866 Tanzaniens qui étaient actifs dans la mission de maintien de la paix de l’ONU en RDC (MONUSCO).
Depuis son arrivée à Goma, l’EACRF a sécurisé l’infrastructure critique, notamment l’aéroport international et son voisinage, où se trouvent de nombreux camps improvisés de réfugiés.
Des rapports indiquent que les personnes déplacées ont commencé à « retourner en grand nombre » dans leur foyer en mars, alors que les routes de commerce et d’approvisionnement ont été ouvertes et l’aide humanitaire a recommencé à traverser les territoires libérés.
Le 4 avril, le major-général Jeff Nyagah, commandant de l’EACRF, s’est réuni avec son homologue de la MONUSCO pour créer une collaboration concernant les limites opérationnelles, le contrôle de l’espace aérien, le soutien logistique, l’ouverture des routes principales d’approvisionnement, et le partage et la surveillance des renseignements.
Pendant les mois précédant le plein déploiement de l’EACRF, plusieurs cessez-le-feu conclus avec les M23 avaient échoué. Maintenant qu’une force plus large est déployée dans la zone, on espère que les processus de paix du Kenya ou de l’Angola auront des résultats.
Une quatrième session du processus de Nairobi entre le gouvernement de la RDC et divers groupes armés est prévue à Kinshasa pour la fin avril ; ensuite, des négociations dans les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et de l’Ituri sont prévues.
La RDC considère que les M23 sont un groupe terroriste et refuse d’engager un dialogue avec eux avant qu’ils ne soient désarmés.
Peter Mathuki, secrétaire général de la CAE, a déclaré en février en marge d’un événement de l’Union africaine à Nairobi : « Le processus dans l’Est de la RDC doit être résolu par des voies politiques. Notre force armée [est] là pour renforcer le processus politique. »
Le premier des deux contingents ougandais de l’EACRF a franchi la frontière pour entrer en RDC le 31 mars, avec 1.000 soldats dans des véhicules et des chars d’assaut. Trois jours plus tard, les Ougandais ont déclaré la libération de la ville frontière de Bunagana après plus de neuf mois d’occupation par les M23.
Trupti Agrawal, analyste principale de l’Afrique de l’Est pour l’Economist Intelligence Unit, a déclaré que le retrait de Bunagana par les M23 était une étape positive dans ce qui sera probablement un long processus.
« Ce retrait est un signe de progrès pour les efforts régionaux de médiation, mais c’est en lui-même un processus hautement fragile », a-t-elle déclaré à The Associated Press.