Sous couvert de l’obscurité, un petit groupe de combattants de l’État islamique au Mozambique (ISM) a pris pour cible un quartier dans les faubourgs de Mocímboa da Praia, dans la province du Cabo Delgado, le 22 septembre.
Ils sont allés d’une maison à l’autre, apparemment pour chercher certaines personnes particulières, avant de décapiter quatre hommes de l’ethnie des Makondés. C’était l’une des quelque 30 attaques dans la province en septembre, ayant conduit à la mort d’au moins 39 civils et au déplacement forcé d’environ 20.000 personnes chassées de leur foyer.
Peu avant le 5 octobre, anniversaire de la première attaque des insurgés contre trois postes de police à Mocímboa da Praia en 2017, des rumeurs ont été diffusées concernant d’autres attaques qui seraient effectuées ultérieurement. Les résidents ont été pris de panique et beaucoup ont envisagé de s’enfuir.
Au cours des huit années suivant la première attaque, la riposte du Mozambique s’est appuyée sur les forces de sécurité d’état, complémentées par des troupes régionales et étrangères, ainsi que deux partenariats avec des sociétés militaires privées. Cette stratégie axée sur l’armée a jusqu’à présent échoué pour endiguer le déferlement persistant de violence.
Le chercheur-consultant Borges Nhamirre basé au Mozambique l’appelle une « stratégie militaire ratée ».
Il écrit pour l’Institut pour les études de sécurité d’Afrique du Sud le 7 octobre : « La cause principale de l’échec dans la lutte contre l’insurrection est l’absence d’une stratégie holistique qui répond aux causes fondamentales du conflit. Bien qu’elle soit soutenue par l’État islamique, l’insurrection du Cabo Delgado est en grande mesure due à des facteurs locaux, notamment l’exclusion sociale, politique et économique par le gouvernement central à Maputo. »
L’ISM exploite les perceptions et les doléances locales pour recruter des combattants et justifier leurs actions violentes. Sa propagande cherche à présenter le groupe terroriste comme protecteur des communautés musulmanes qui se sentent opprimées par le gouvernement mozambicain, et vise à gagner un attrait religieux en notant que le leadership du pays est historiquement chrétien.
« Les questions d’identité telles que les tensions ethniques entre les groupes locaux principaux (Makondés, Mwani, Makua) sont aussi mentionnées, en particulier en ce qui concerne l’accès inéquitable aux ressources de l’état. Ces disputes ethniques chevauchent les divisions religieuses, car certains groupes sont à majorité musulmane alors que d’autres sont principalement chrétiens. »
Depuis la première attaque du groupe en 2017, l’ISM a assassiné 6.257 personnes, selon un rapport du 1er octobre 2025 par le projet ACLED (Armed Conflict Location and Event Data). Les Nations unies estiment qu’environ 1,3 million de Mozambicains sont devenus des déplacés internes depuis le début de l’insurrection, et plus de 461.000 d’entre eux étaient toujours déplacés en date de mars 2025.
En 2021, le Rwanda a envoyé environ 1.000 soldats et policiers pour soutenir les forces mozambicaines, et une mission militaire créée par la Communauté de développement d’Afrique australe a déployé près de 2.000 soldats.
Trois ans plus tard, le bloc régional retira ses forces en affirmant avoir atteint son objectif. Plus de 5.000 soldats rwandais restent dans le pays, et la Tanzanie a un contingent d’environ 300 soldats dans le district de Nangade, province du Cabo Delgado, pour protéger la frontière.
« Si le pays continue avec son approche exclusivement militaire, l’insurrection pourrait durer des dizaines d’années, comme les Chebabs et Boko Haram en Afrique de l’Est et de l’Ouest, avertit M. Nhamirre. En présentant l’insurrection uniquement comme du terrorisme international, le Mozambique limite encore plus les opportunités de négociation. »
Le président Daniel Chapo a récemment suggéré que son administration pourrait explorer des moyens d’identifier le leadership du groupe et ses motivations, afin de faciliter des pourparlers de paix.
Il a déclaré dans une interview du 26 septembre avec Al Jazeera : « Nous étudions actuellement deux solutions. L’une consiste à continuer la lutte contre le terrorisme sur le terrain, avec l’appui de la région et d’autres partenaires. »
« Nous pouvons aussi poursuivre la voie du dialogue et chercher une solution qui pourrait conduire à la fin de l’insurrection. Le dialogue est une base pour résoudre tous les conflits. »
