L’Éthiopie et le Nigeria s’associent pour développer des drones fabriqués en Afrique et capables d’être utilisés pour des applications civiles aussi bien que militaires.
Au cours des dernières semaines, des responsables éthiopiens ont accueilli des membres de l’Armée de l’air du Nigeria pour visiter les installations éthiopiennes de fabrication et de maintenance d’aéronefs. Le Nigeria a promis d’organiser de façon réciproque des visites éthiopiennes des établissements de formation militaire nigérians.
Ces visites dénotent la plus récente étape visant à accroître le nombre de véhicules aériens sans humain à bord (UAV) en Afrique, dans un marché sujet à l’afflux de la technologie importée de Chine, d’Iran et de Turquie.
Cette collaboration fait partie d’une demande plus vaste énoncée maintes fois lors de la conférence des chefs d’état-major africains de la défense à Nairobi (Kenya) : les pays africains doivent développer leur propre industrie de la défense pour qu’elle soit compétitive sur le marché mondial et pour réduire leur dépendance à l’égard des autres pays.
Le Nigeria est devenu un centre de fabrication de drones. L’UAV Tsaigumi, premier drone du pays, a été inauguré en 2018 à des fins de renseignement, surveillance et reconnaissance. Plus récemment, le Nigeria a développé un drone kamikaze appelé Damisa au sein d’un partenariat avec la société technologique nigériane Briech UAS. TerraHaptix, la plus grande usine de drones d’Afrique, peut produire 10.000 drones par an ; elle est située à Abuja, la capitale du pays.
L’Éthiopie a inauguré la société d’état SkyWin Aeronautics Industries en mars dernier pour commencer à fabriquer des drones dans une usine d’Addis-Abeba. Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a qualifié les nouvelles capacités de drone de son pays comme étant « inimaginables il y a seulement quelques années ».
« Notre capacité de produire des drones avec diverses caractéristiques, conçus et construits par nos jeunes professionnels, est un jalon important », déclare M. Abiy sur X.
L’Éthiopie a employé une variété de drones importés dans sa guerre contre les rebelles du Tigré en 2022. Depuis lors, les drones sont devenus une composante clé de la stratégie éthiopienne visant à faire face à d’autres rébellions dans les régions Amhara et Oromia.
L’Afrique du Sud, l’Égypte, le Kenya et le Soudan produisent aussi leur propres drones. Le Maroc a établi une usine en 2024 pour assembler les drones israéliens WanderB et ThunderB. Le Maroc a utilisé des UAV dans des missions de reconnaissance, renseignement et acquisition de cibles.
Les drones sont devenus des composantes vitales des opérations des forces gouvernementales aussi bien que celles des groupes d’insurgés sur le continent au cours des dernières années. Au Sahel, les belligérants ont utilisé des drones pour la collecte de renseignement et les attaques aériennes. Les drones ont joué un rôle proéminent dans les attaques des rebelles contre les forces gouvernementales au Mali. Le Nigeria a déployé des drones sur sa frontière Nord pour traquer les mouvements de Boko Haram et de la Province d’Afrique de l’Ouest de l’État islamique, alors même que ces deux groupes utilisent leurs propres drones pour observer les soldats nigérians.
Les deux belligérants de la guerre civile du Soudan ont aussi déployé des drones, notamment en mai lorsque les Forces de soutien rapide ont lancé de multiples drones kamikazes contre Port-Soudan, la ville principale des Forces armées soudanaises pendant la guerre.
En mettant leurs ressources en commun, deux constructeurs et utilisateurs de drones parmi les plus expérimentés du continent peuvent développer une solution locale à la demande des pays africains pour la technologie de drone, selon les analystes Ekene Lionel et Patrick Kenyette. Cela peut aussi inspirer d’autres pays africains à créer des co-entreprises similaires.
Les deux analystes ont récemment écrit pour Military Africa : « Ce partenariat s’accompagne de conséquences qui dépassent de loin l’objectif immédiat de co-production d’UAV. Il représente un modèle pour la façon dont les nations africaines peuvent faire face à des défis communs grâce à la coopération, en exploitant leurs points forts pour réaliser collectivement des progrès. »