PERSONNEL D’ADF
Des tests de dépistage des stupéfiants conduits récemment par des cliniques sud-africaines montrent que le fentanyl, opioïde synthétique puissant, se propage rapidement dans le pays.
Le fentanyl a été détecté chez des jeunes du Cap-Oriental et du KwaZulu-Natal. La drogue qui produit une euphorie intense mais de courte durée est environ 100 fois plus forte que la morphine et 30 fois plus forte que l’héroïne. Elle a aussi été trouvée dans les eaux usées du pays, ce qui fait craindre aux analystes l’arrivée d’une crise.
Les toxicomanes du fentanyl semblent parfois s’endormir pendant qu’ils marchent ou avancer au milieu du trafic. Certains font une overdose et meurent.
Le Dr Alanna Bergman, scientifique infirmière aux États-Unis, a reçu un financement de l’université Johns Hopkins pour importer des tests hautement précis de drogue dans l’urine en Afrique du Sud. Les tests montrent qu’environ 32 % des personnes testées s’avèrent positives pour le fentanyl, selon un reportage de l’agence de presse sud-africaine GroundUp.
La drogue est utilisée médicalement pour traiter les patients souffrant de douleurs intenses après une intervention chirurgicale, mais les dossiers médicaux suggèrent qu’aucun des utilisateurs testés par le Dr Bergman n’avait obtenu d’ordonnance légale de fentanyl.
Elle a déclaré à GroundUp en décembre : « Je pense que nous avons aujourd’hui 320 personnes qui ont été testées. Le taux de fentanyl reste élevé. Chaque jour, quelques personnes de plus sont ajoutées à la liste de prélèvement. »
La production des drogues synthétiques illicites en Afrique du Sud est en hausse depuis le milieu des années 90, selon les propos de Jason Eligh, expert principal de la Global Initiative Against Transnational Organized Crime (GI-TOC), au réseau de télévision New Tang Dynasty (NTD).
On sait que les cartels mexicains sont actifs dans le pays mais M. Eligh déclare que la Chine est aussi un acteur dans le commerce illicite du fentanyl, en pleine croissance en Afrique du Sud.
Il déclare à NTD : « La Chine est le partenaire commercial numéro un de l’Afrique du Sud. Si nous ajoutons à cela le fait que le crime organisé chinois s’est vraiment bien établi avant la fin de l’époque de l’apartheid, vous aurez une idée des antécédents de la présence chinoise, et du large volume de commerce d’origine chinoise entrant dans le pays. »
Malgré la popularité croissante du fentanyl et autres drogues synthétiques chez les toxicomanes et les trafiquants, la crise d’Afrique du Sud a essentiellement « échappé à l’attention » des autorités et du public, déclare le Dr Lucy Hindle, médecin de salle d’urgence à Johannesbourg, dans un podcast en décembre dernier à la station radio sud-africaine Power FM.
Le Dr Hindle déclare : « L’Afrique du Sud est tout à fait intégrée dans le commerce mondial des stupéfiants. Nous sommes une route de passage pour les drogues à destination d’autres pays mais nous sommes aussi un marché. Cela ne me surprend pas que le fentanyl [ait été] détecté précédemment dans les eaux usées d’Afrique du Sud et donc qu’il était ici auparavant. … Cela indique qu’il ne s’agit pas de fentanyl légalement fabriqué. »
Le Dr Andrew Scheibe, chercheur de l’université de Pretoria, est le co-auteur d’une étude récente pour le Journal of Illicit Economies and Development concernant la valeur marchande de l’héroïne, de la cocaïne et de la méthamphétamine en Afrique du Sud. Le fentanyl est couramment mélangé avec ces drogues, en particulier l’héroïne.
L’étude montre qu’environ 400.000 personnes prennent l’héroïne quotidiennement, à un coût d’environ 1,8 million de dollars. La valeur combinée des marchés de cocaïne, héroïne et méthamphétamine calculée dans l’étude est d’environ 3,5 milliards de dollars. Une grande partie de cet argent est reçue par les cartels de drogues, les syndicats internationaux et les bandes locales.
L’ajout du fentanyl à d’autres drogues dures est particulièrement dangereux parce que son emploi illicite n’est pas réglementé. Une dose peut coûter aussi peu que 35 rands (1,87 dollar). Le Dr Scheibe déclare que le coût faible des opioïdes restera probablement au même niveau ou baissera à mesure qu’ils deviendront plus disponibles.
Le Dr Scheibe déclare que la puissance de la drogue dépend du lieu de sa fabrication.
« Est-elle fabriquée dans un laboratoire de pointe avec un contrôle qualité, où est-elle fabriquée dans l’arrière-cour de quelqu’un sans contrôle qualité ? La personne qui l’achète connaît-elle la force de ce qu’elle consomme ? C’est ça le risque. Sur le marché noir, vous ne savez pas ce que vous achetez et vous ne savez pas la force. »
Il note que la naloxone, drogue utilisée pour inverser les overdoses d’opioïde, n’est généralement pas disponible en Afrique du Sud.
Selon le Dr Hindle, dont les sous-spécialités incluent les soins critiques et la toxicologie, le fentanyl « affectera votre niveau de conscience et, chose dangereuse, il affectera votre [système] respiratoire et votre capacité de respirer ». Lorsque les gens consomment trop de fentanyl, « leur niveau de conscience baisse, ils respirent moins et cela peut provoquer une overdose et la mort ».
Le Dr Scheibe affirme que les approches actuelles pour combattre la consommation illicite des drogues en Afrique du Sud sont inefficaces et il fait appel à une approche pansociétale pour répondre à ce fléau.
« Nous devrions soutenir les gens, même ceux qui consomment les drogues de façon problématique. L’approche punitive de mise en application de la loi est très nuisible. Nous avons besoin de réponses de santé publique et de société. »