Selon l’ONU, l’or de contrebande alimente la guerre au Soudan
PERSONNEL D’ADF
Dans sa bataille en cours pour le contrôle du Soudan, le groupe paramilitaire des Forces de soutien rapide (RSF) s’appuie fortement sur l’or passé en contrebande hors du pays et ses liens étroits avec le groupe Wagner de Russie, appelé aujourd’hui Africa Corps, selon une analyse des Nations unies.
« Des réseaux financiers complexes établies par les RSF avant et pendant la guerre les ont permis d’acquérir des armes, de payer les salaires, de financer des campagnes médiatiques, d’exercer des pressions et d’acheter le soutien d’autres groupes politiques et armés », écrivent les experts de l’ONU.
L’or de contrebande du Soudan aboutit aux Émirats arabes unis (EAU), où il entre sur le marché mondial. L’or du Soudan a établi la base de la relation entre les RSF et la Wagner, pour qui l’or des mines soudanaises est devenu une source de revenu cruciale pour financer la guerre de la Russie contre l’Ukraine.
Au Soudan, la contrebande de l’or par les Émirats a fait du général Mohamed Hamdan Dogolo alias « Hemeti », commandant des RSF, l’un des hommes les plus riches du Soudan et lui a permis de financer les combats des RSF pour le contrôle du Soudan contre les Forces armées soudanaises (SAF). Hemeti a utilisé ses ressources pour créer au moins une cinquantaine de sociétés dans plusieurs secteurs industriels, au Soudan et à l’extérieur du pays. Il a de l’argent dans les banques des Émirats et base la propagande des RSF sur les réseaux sociaux de ce pays.
L’or a permis à Hemeti d’acheter un allié fiable : selon le rapport de l’ONU, les Émirats sont devenus un conduit pour les armes et autres fournitures, souvent sous couvert de livraisons d’assistance humanitaire.
Selon l’ONU, un négociant en or soudanais à Dubaï associé aux RSF a reçu 50 kg d’or en mai 2023, un mois après le début des combats entre les RSF et les SAF.
Peu après, les combattants RSF ont commencé à recevoir des livraisons d’armes lourdes, notamment des lance-missiles portables sol-air appelés MANPADS, par l’intermédiaire de la Libye grâce au groupe Wagner et au maréchal Khalifa Haftar, lequel avait reçu un soutien des Émirats et des RSF dans sa lutte contre le gouvernement reconnu internationalement de Tripoli.
Les armes arrivant au Soudan ont aidé les RSF à poursuivre leur lutte contre les SAF, qui sont plus lourdement armées. Les RSF ont tué des dizaines de milliers de civils dans la capitale de Khartoum et la région occidentale du Darfour. Seulement dans la ville d’El Genena (capitale du Darfour occidental), l’ONU pense aujourd’hui que jusqu’à 15.000 civils sont morts depuis le déclenchement des conflits en avril 2023, soit 25 % de plus que son estimation précédente de 12.000 décès.
Les observateurs de l’ONU signalent qu’ils ont découvert des preuves selon lesquelles les Émirats ont fourni aux RSF du matériel plusieurs fois par semaine par l’intermédiaire d’un hôpital de campagne financé par les Émirats à Amdjarass (Tchad). Le général soudanais Yassir al-Atta, adjoint du chef des SAF, a signalé à la fin 2023 que les Émirats avaient envoyé des avions aux RSF.
Les Émirats continuent à nier qu’ils fournissent des armes à l’un ou l’autre belligérant du conflit soudanais, malgré des rapports contraires.
L’analyste Elfadil Ibrahim a récemment écrit dans le magazine National Interest que si les Émirats prenaient le parti des RSF, cela pourrait faire courir un risque à leurs investissements au Soudan. Les Émirats sont prêts à construire le complexe portuaire proposé d’Abu Amama sur la mer Rouge, d’une valeur de 6 milliards de dollars. Ils possèdent aussi 2.800 km carrés de terre agricole soudanaise, dont un grande partie est située dans des états toujours contrôlés par les SAF.
« Pour les Émirats, miser sur les RSF est une initiative malheureuse, pour un grand nombre de raisons », écrit M. Ibrahim.
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