L’Inde établit une base militaire à Maurice pour contrecarrer la présence des Chinois
PERSONNEL D’ADF
Le petit archipel d’Agaléga est un territoire mauricien qui n’a pas été affecté par le tourisme ou l’industrie. Depuis des générations, ses quelque 300 habitants vivent principalement de l’exploitation de la noix de coco et du poisson.
Les deux îles sont situées à environ 1.000 km au Nord de l’île principale du pays, dans une région du Sud-Ouest de l’océan Indien traversée par quelques-unes des plus importantes voies navigables commerciales du monde. Jusqu’en 2021, les îles avaient seulement un quai pour l’amarrage des bateaux de pêche et un petit aérodrome, mais cela a changé.
L’Inde a récemment construit un grand complexe de piste d’atterrissage et de débarcadère sur l’île du Nord, la plus grande île de l’archipel. Selon la chaîne d’actualité indienne WION, la Marine indienne enverra au moins 50 officiers et gardes au nouvel aérodrome, qui peut accommoder les aéronefs de surveillance et de lutte anti-sous-marine Boeing P-8I des Forces armées indiennes.
Les installations de l’archipel permettront aussi de conduire des patrouilles maritimes dans le Canal du Mozambique et la base permettra à la Marine indienne d’observer les voies maritimes commerciales autour de l’Afrique australe.
« Cette base à Agaléga ancrera la présence de l’Inde dans le Sud-Ouest de l’océan Indien et répondra à son souhait de projection dans cette région », écrit Samuel Bashfield, officier de recherche au Collège national de la sécurité de l’Université nationale australienne, pour le groupe de réflexion australien Lowy Institute.
Elle fera aussi obstacle à la présence croissante de la Chine dans une région où Pékin a fait de grands investissements en infrastructure. Les ports construits par la Chine en Angola, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, à Djibouti, en Mauritanie et au Mozambique sont devenus des exemples de la façon dont ces projets peuvent perturber les écosystèmes aquatiques et nuire aux communautés pratiquant la pêche artisanale, selon un rapport produit par le Centre mondial de politique de développement à l’Université de Boston.
Au Kenya, le chemin de fer Standard Gauge Railway construit par la Chine avait été promu comme un agent majeur de stimulation économique qui bénéficierait à la région. Toutefois, six ans après sa mise en service, le chemin de fer est considéré comme un fardeau financier, à un moment où les relations entre le Kenya et la Chine s’enveniment.
L’archipel d’Agaléga a aussi une valeur militaire stratégique, dans une région où la Chine a graduellement augmenté sa présence au cours des 25 dernières années.
Cette période a coïncidé avec une forte augmentation de la taille de la marine chinoise, a déclaré le ministre indien des Affaires étrangères Subrahmanyam Jaishankar pendant une discussion au Council on Foreign Relations en septembre à New York. Il a dit que les autorités indiennes surveillaient étroitement les ports construits par la Chine au Pakistan, au Sri Lanka et dans d’autres zones de la région de l’océan Indien.
« Du point de vue de l’Inde, je dirais qu’il est tout à fait raisonnable pour nous d’essayer de nous préparer à une présence chinoise dépassant ce que nous avions constaté auparavant. Les préoccupations maritimes ne concernent pas nécessairement celles entre deux pays aujourd’hui. Si vous considérez les menaces maritimes, la piraterie, la contrebande ou le terrorisme, dans l’absence d’une autorité, d’une surveillance, d’une force sur place pour assurer réellement le respect de l’état de droit, vous avez un problème. »
Greg Poling, Senior Fellow pour l’Asie du Sud-Est au Centre d’études stratégiques et internationales, a qualifié la présence croissante de la Chine dans l’océan Indien de « préoccupation stratégique » pour les analystes indiens de la sécurité.
« Ils continuent à être préoccupés par le Pakistan, et ils le seront probablement toujours, mais je pense que c’est de plus en plus la Chine qui empêche les stratèges indiens de dormir », a-t-il déclaré à Al Jazeera.
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