Africa Defense Forum

Le retrait accéléré de la MONUSCO pourrait mettre en danger les Congolais

PERSONNEL D’ADF

Lorsqu’il s’est exprimé devant la réunion de l’Assemblée générale des Nations unies le 20 septembre, le président Félix Tshisekedi de la République démocratique du Congo (RDC) a demandé un retrait accéléré de la mission de l’ONU appelée MONUSCO.

« Le moment est venu pour notre pays de saisir le plein contrôle de son destin et devenir l’acteur principal de sa propre stabilité », a-t-il déclaré.

Mais les experts disent que, pour plusieurs raisons, il est imprudent de faire avancer d’un an le calendrier à la fin 2023, au lieu de la fin 2024.

« Ils vont être remplacés par des forces régionales et je ne pense pas que le résultat soit nécessairement meilleur », déclare Tara O’Connor, fondatrice et directrice exécutive d’Africa Risk Consulting, dans un panel de discussion sur Al Jazeera.

« Le vrai risque sera la forte augmentation du mercantilisme, comme on l’a vu avant que les Casques bleus n’arrivent. Il s’agit d’une région avec d’énormes richesses minérales qui intéressent beaucoup un grand nombre d’acteurs des régions et des pays. »

Elle dit que la MONUSCO a été « gravement affectée » par le manque d’engagement, de la part du gouvernement de la RDC, pour affronter les problèmes sous-jacents d’une vaste région située à près de 2.000 km de la capitale de Kinshasa.

« Du point de vue militaire, la région est largement ingouvernable. Le terrain est impossible et l’infrastructure est insuffisante. »

Depuis longtemps, les observateurs se demandent s’il est raisonnable de s’attendre à ce que l’ONU maintienne la paix dans une région qui a seulement connu le conflit pendant des dizaines d’années.

Thomas Mandrup, du Security Institute of Governance and Leadership in Africa à l’université Stellenbosch, déclare que les forces régionales qui remplaceront la MONUSCO et qui proviennent de la CAE (Communauté d’Afrique de l’Est) et la CDAA (Communauté de développement d’Afrique australe) trouveront les mêmes problèmes.

« La question est de savoir s’ils pourront venir et combler le vide laissé par la MONUSCO, a-t-il dit à la South African Broadcasting Corp. Pour le moment, il est tout à fait improbable que nous les verrons gérer cela, si les Congolais ne veulent pas assumer eux-mêmes cette responsabilité. »

Le 5 septembre, la CAE a prolongé le mandat de sa Force régionale (FR-CAE) d’une durée de trois mois jusqu’au 8 décembre.

Bien qu’elle n’ait pas annoncé de date de déploiement, on anticipe que la force régionale de la CDAA (SAMIDRC) adoptera une posture plus offensive pour combattre les nombreux insurgés et groupes armés dans l’Est de la RDC.

Dans un rapport du mois d’août, le secrétaire général de l’ONU António Guterres a proposé de retirer toutes les unités de la MONUSCO dans le Nord-Kivu et un bataillon dans le Sud-Kivu, ainsi que certains spécialistes, observateurs militaires et officiers d’état-major de la mission.

Son rapport a aussi noté « le besoin d’ajuster le mandat de la MONUSCO pour permettre à la mission de tirer profit de ses capacités opérationnelles et logistiques afin de soutenir la FR-CAE et peut-être la SAMIDRC lorsque cette dernière sera déployée ».

Certains membres du Conseil de sécurité de l’ONU n’acceptent pas l’idée d’un retrait accéléré de la MONUSCO.

Dans un briefing du Conseil de sécurité le 28 septembre sur la RDC, l’ambassadeur adjoint britannique James Kariuki a déclaré que l’ONU devrait envisager seulement une réduction du nombre de gardiens de la paix.

« Nous devons considérer avec soin les implications du retrait de la MONUSCO pour la population civile, a-t-il dit. Les conséquences d’un départ précipité pourraient être graves. »

Après le briefing, la cheffe de la MONUSCO Bintou Keita a déclaré qu’elle devait toujours se réunir avec le Premier ministre congolais Jean-Michel Sama Lukonde pour parler des quatre jalons restants qui doivent être atteints « afin d’effectuer un retrait de façon progressive et responsable ».

« Nous parlons toujours de la protection des civils, a-t-elle dit aux journalistes. Nous parlons toujours de la mise en œuvre du désarmement, de la démobilisation, de la réinsertion communautaire et de la stabilisation ; nous parlons aussi de la réforme du secteur de la sécurité. »

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