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Les experts notent une différence cruciale dans le coup d’État du Gabon

PERSONNEL D’ADF

Le 29 août au petit matin, les autorités gabonaises ont annoncé que le président Ali Bongo avait gagné des élections contestées qui lui accordaient un troisième mandat controversé.

Gyldas A. Ofoulhast-Othamot, professeur adjoint en sciences politiques à St. Petersburg College (États-Unis), déclare qu’il existe de nombreuses indications que le processus électoral était certainement déficient, et peut-être truqué.

« Immédiatement après le vote, l’Internet a été coupé et un couvre-feu a été instauré, ce qui n’est pas généralement le signe d’un régime qui est certain d’avoir remporté le scrutin », a-t-il écrit le 1er septembre dans une analyse pour le site web The Conversation Africa.

Quelques heures plus tard, un groupe d’officiers militaires de haut rang est apparu à la télévision pour annoncer qu’ils avaient renversé M. Bongo et désigné le général Brice Oligui Nguema comme chef d’un gouvernement de transition.

À première vue, le plus récent coup d’État africain ressemble à la série récente de prises de pouvoir par les militaires sur le continent. Toutefois, malgré de nombreuses similarités, le soulèvement du Gabon présente quelques différences cruciales.

Le professeur Ofoulhast-Othamot déclare que les récents coups d’État au Sahel sont plutôt axés vers la sécurité.

« Avec le terrorisme, la situation sécuritaire était un facteur très important pour les coups d’État au Sahel, dit-il  à ADF. Le problème au Gabon était surtout national. Il s’agissait plutôt d’assurer que la famille Bongo perde le pouvoir. Je ne classerais pas ce coup d’État avec les autres. »

« Il y a une grande différence en termes de mécontentement avec le statu quo. Au Mali et au Burkina Faso, il y avait une situation sécuritaire très grave où les gens étaient tués. »

À l’exception du coup d’État au Soudan en 2021, toutes les autres prises de pouvoir par les armées africaines depuis 2020 ont reçu un certain niveau de soutien populaire.

Toutefois, plusieurs chefs des coups d’État récents en Afrique, tels que ceux du Mali et du Soudan, ont démontré un intérêt minime pour restaurer le régime civil.

Au Gabon, la dynastie des Bongo avait gouverné le pays pendant 56 ans. Avant son décès en 2009, le président Omar Bongo était resté au pouvoir pendant près de 42 ans, l’une des plus longues périodes au monde pour un chef d’état non monarchique.

La même année, il a été succédé par Ali Bongo, son fils, qui a remporté des élections contestées.

« Beaucoup de gens pensaient qu’André Mba Obame, son rival principal aux élections, était probablement le vrai vainqueur », écrit Paul Melly, Consulting Fellow au programme Afrique du groupe de réflexion Chatham House, pour la BBC le 31 août.

Les experts ont documenté une série de problèmes concernant les élections gabonaises sous l’égide des Bongo. Toutes ces élections ont été contestées et accompagnées de violence. M. Melly a lié d’autres coups d’État au mécontentement concernant les dirigeants civils.

« Il existe un ressentiment profond sur la façon dont un grand nombre de dirigeants civils manipulent le processus électoral ou le régime constitutionnel pour prolonger leur mandat, écrit-il. L’élimination des limites de mandat d’un président, à la suite d’amendements controversés apportés à la constitution, est une source particulière de sentiments aigris. »

Mike Agbedor Abu Ozekhome, militant des droits de l’homme basé à Abuja (Nigeria), déclare que certains coups d’État ont signalé un changement vers l’autoritarisme, mais que cela n’est pas le cas au Gabon.

« Il devrait être évident aujourd’hui que le coup d’État au Gabon n’était pas le fruit d’un échec de la démocratie, mais une rébellion furieuse contre la famille qui avait saisi fermement le pouvoir, et qui a fait l’objet d’une résistance par les gens de bonne foi », écrit-il pour le journal nigérian The Authority le 10 septembre.

Une coalition ayant soutenu l’adversaire principal d’Ali Bongo au cours des dernières élections a déclaré qu’Albert Ondo Ossa était le vainqueur légitime et devrait être président du Gabon.

« Nous étions contents lorsqu’Ali Bongo a été renversé, mais… nous espérons que la communauté internationale soutiendra la république et l’ordre démocratique au Gabon en demandant à l’armée de rendre le pouvoir aux civils », déclare Alexandra Pangha, porte-parole d’Albert Ondo Ossa, à la BBC.

Ozekhome est préoccupé par un cercle vicieux sur le continent, selon lequel les troubles prolongés perpétuent les conditions favorisant la saisie du pouvoir.
« Cela ne fait pas de doute, les pays africains ont toujours été un terrain fertile pour les coups d’État : pauvreté, mauvaise performance économique, insécurité, corruption, excès de patience, entre autres », écrit-il.

« Nous pouvons nous attendre à d’autres coups d’État en Afrique si la bonne gouvernance n’est pas respectée et si les présidents élus ou sélectionnés décident capricieusement et arbitrairement de rester collés au pouvoir comme les papillons attirés au nectar des fleurs. »

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