Africa Defense Forum

Le retrait de l’ONU en RDC présente de nombreux risques

PERSONNEL D’ADF

Sur demande de la République démocratique du Congo (RDC), le retrait de la mission de maintien de la paix des Nations unies a commencé.

Mais les experts déclarent qu’il est probable que le départ de l’ONU créera une opportunité pour les groupes armés de l’Est, ce qui pourrait aggraver la violence.

Le secrétaire général de l’ONU António Guterres a dit que la mission, appelée MONUSCO, effectuera un « retrait accéléré » et qu’elle est entrée dans sa « phase finale ».

Toutefois, il a averti que les problèmes de sécurité qui tourmentent l’Est de la RDC depuis des dizaines d’années « se détériorent fortement. »

« Le départ prématuré de la MONUSCO pourrait avoir des conséquences pour les civils qui comptent sur la mission pour leur protection et leur sécurité », a-t-il dit dans un rapport fourni au Conseil de sécurité de l’ONU le 10 août. « Les tensions régionales ont empiré encore plus. La situation humanitaire s’est considérablement détériorée. Des centaines de milliers de civils ont été forcés à partir ».

Un rapport récent par le groupe d’experts de l’ONU sur la RDC accuse le Rwanda d’envoyer illégalement ses soldats en RDC pour soutenir le groupe rebelle des M23 dirigé par l’ethnie tutsi. Le Rwanda a nié plusieurs fois ces allégations.

Dans son rapport, M. Guterres déclare que les combattants M23 ont « saisi de vastes régions », « établi des administrations parallèles illégales » et effectué « des arrestations arbitraires et des exécutions extra-judiciaires ».

« Le nombre d’actes de violence sexuelle contre les enfants a plus que doublé de 2021 à 2022 », écrit-il.

La pire violence dans l’Est de la RDC s’est produite dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, où plus de 100 groupes armés sont actifs et environ 4 millions de personnes ont été déplacées.

Guterres avertit aussi de la prolifération des milices locales qui sont de plus en plus alignées aux côtés de l’armée congolaise (FARDC) dans les combats

« La multiplicité des groupes d’autodéfense constitués de citoyens armés, appelés aussi Wazalendo, qui affirment lutter contre les M23 pour défendre l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo, soulève d’autres problèmes de sécurité et pourrait contribuer à un nouveau cycle de violence, y compris des attaques et des représailles motivées par l’ethnie », écrit-il dans le rapport.

La MONUSCO, qui avait commencé son déploiement il y a 25 ans, possédait environ 19.000 soldats sur le terrain, à un coût annuel d’environ 1 milliard de dollars, avant le début du retrait.

Au cours des dernières années, les Congolais ont été de plus en plus mécontents à cause de l’incapacité de la mission pour protéger les civils ou faire des progrès importants vers la paix ou les solutions politiques.

« La MONUSCO continue à être le focus du mécontentement populaire et de la frustration concernant la perception de son inaction », déclare M. Guterres.

La recrudescence des M23 dans l’Est de la RDC vers la fin 2021 a déclenché une vive réaction contre les Casques bleus. La MONUSCO déclare que ses gardiens de la paix ne pouvaient pas continuer à soutenir les FARDC dans la lutte contre les M23 parce que les rebelles sont mieux équipés.

Les responsables congolais et les citoyens étaient indignés.

Quatre Casques bleus et 32 civils ont été tués lors de manifestations violentes en juillet 2022, ce qui a incité la RDC à réévaluer les plans de départ de la  MONUSCO à la fin 2024, plans qui sont basés sur certaines conditions.

Ndeye Khady Lo, porte-parole de la MONUSCO, a déclaré en 2022 : « Le plan de transition a été élaboré en 2022. L’environnement politique et sécuritaire un an plus tard s’est modifié considérablement. »

L’ONU a prolongé le mandat de la MONUSCO en décembre 2022 malgré les demandes du gouvernement congolais pour un retrait accéléré. Le nouveau calendrier de retrait annoncé par M. Guterres à la fin 2023 met un terme à toute possibilité de discussion supplémentaire pour prolonger le mandat.

Plusieurs bureaux de la MONUSCO ont déjà fermé leurs portes.

Les manifestations de 2022 ont conduit la MONUSCO à partir de Butembo, dans le Nord-Kivu. Les soldats de l’ONU dans la province du Tanganyika au Sud-Est du pays sont partis en juin 2022. En 2023, la MONUSCO s’est retirée des provinces du Kasaï et du Kasaï-Central dans la région centrale de la RDC.

Les FARDC ont eu des difficultés pour protéger les civils au cours des trente années de combat dans l’Est du pays. Bientôt, des milliers de soldats et de policiers de la MONUSCO ne seront plus là pour fournir de l’aide.

La force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est reste déployée dans la région orientale et la Communauté de développement d’Afrique australe projette aussi d’intervenir.

Lors d’une visite du 7 juin à Kinshasa, capitale de la RDC, le sous-secrétaire de l’ONU pour les Opérations de paix Jean-Pierre Lacroix a déclaré que la MONUSCO devrait se retirer « aussitôt que possible… mais le faire de façon responsable ».

« Il ne doit pas exister de vide sécuritaire, qui serait fatal pour ces populations », a-t-il dit.

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