La loi interdit aux navires de pêche de jeter le poisson indésirable dans les eaux ghanéennes mais la pratique continue, ce qui provoque des déchets, une détérioration écologique et une perte de revenu pour les pêcheurs artisanaux.Selon un rapport récent de l’Environmental Justice Foundation (EJF), les commandants rejettent habituellement les poisons juvéniles de faible valeur pour faire de la place aux espèces de plus grande valeur. Les poissons pélagiques en général ciblés par les pêcheurs artisanaux sont souvent déjà morts lorsqu’ils sont jetés à l’eau.
Le déversement des poissons augmente au Ghana depuis que le pays a interdit le « saiko », ou transbordement illégal des poissons en mer, en 2021.
« [Nous] jetons trop de poisson », déclare le marin anonyme d’un chalutier chinois à l’EJF. « Parfois, on a du poisson et le bateau est plein mais ils [lancent] toujours [les filets]. C’est de l’avidité. Ils veulent trop nous faire travailler, je ne sais pas – ils lancent à nouveau les filets – ils lancent les filets et attrapent beaucoup de poissons, puis ils les jettent tous. »
En 2022, un observateur de pêche ghanéen a estimé que près de 50 tonnes de poisson avaient été déversées par un chalutier sur une période d’environ 45 jours en mer. L’EJF déclare qu’au Ghana, 90 % des bateaux de pêche illégaux appartiennent à la Chine.
Les chalutiers chinois commettent des actes de pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN) au Ghana et autour de l’Afrique de l’Ouest depuis des dizaines d’années. À cause de la surexploitation et des autres pratiques illégales, les populations de petits poissons pélagiques du Ghana telles que la sardinelle ont chuté de 80 % au cours des vingt dernières années. L’une de ces espèces appelée sardinella aurita a entièrement disparu.
Plus de 100.000 pêcheurs et 11.000 pirogues sont actifs dans le pays, mais le revenu annuel moyen a baissé jusqu’à 40 % par pirogue artisanale au cours des quelque 15 dernières années, selon la fondation. La pêche illégale décime aussi les stocks de poissons en faisant grimper les prix et provoquant l’insécurité alimentaire.
La Chine régit la flotte en eaux distantes la plus vaste du monde ; c’est aussi le pire contrevenant mondial de la pêche illégale, selon l’indice de pêche INN. Des dix sociétés les plus importantes pratiquant la pêche illégale dans le monde, huit sont chinoises.
Les pêcheurs ghanéens ont aussi déclaré à la fondation que les chalutiers industriels de Chine et d’autres pays pêchent de plus en plus dans la zone d’exclusion côtière (ZEC) du pays, réservée aux pêcheurs artisanaux.
L’objet de la ZEC est de fournir un accès sûr aux ressources de pêche mais les pêcheurs artisanaux disent qu’ils sont souvent blessés et que leur équipement est endommagé lorsque les chalutiers industriels font intrusion.
Un pêcheur artisanal anonyme a déclaré à l’EJF : « Ce que font ces chalutiers, c’est d’éteindre leurs feux et d’empiéter dans la ZEC pendant la nuit. Ils prennent tous les types de poisson, y compris les petits pélagiques. Ils s’avancent souvent et détruisent notre équipement de pêche. C’est ce que j’utilise pour nourrir ma famille et éduquer mes enfants. Donc, si ces chalutiers étrangers détruisent mon équipement de pêche, que vais-je faire pour faire vivre ma famille ? »
En 2021, le Ghana a reçu son deuxième « carton jaune » de la part de l’Union européenne pour un manque de coopération dans la lutte contre la pêche illégale. La Commission des pêches du Ghana a répondu en ordonnant aux sociétés actives dans l’industrie de la pêche au chalut dans le pays à renouveler leur demande de permis de pêche pour continuer à travailler dans les eaux locales.
En mars 2023, le Ghana a annoncé qu’il essaiera de réaliser 100 % de transparence dans les pêches industrielles de sa zone économique exclusive à partir de 2025. Pour atteindre cet objectif, des systèmes de surveillance électronique ou EMS avec notamment des caméras vidéo, des capteurs à distance, des systèmes mondiaux de positionnement et des disques durs, seront installés sur les vaisseaux de pêche pour surveiller leur prise.
Mavis Hawa Koomson, ministre des Pêches et du Développement de l’aquaculture du Ghana, a déclaré à l’occasion de la conférence Our Ocean 2023 : « Ceci aidera notre objectif visant à prévenir, dissuader et éliminer la pêche illégale, non déclarée et non réglementée au Ghana. Cela soutiendra nos efforts continuels pour fournir une source stable d’emploi et de moyens de subsistance aux millions de Ghanéens qui comptent sur la pêche pour les marchés nationaux et internationaux ; pour que cela dure, nous devons gérer les ressources de façon responsable et ne plus surexploiter. »