PERSONNEL D’ADF
Les coupures d’Internet sont devenues l’outil préféré par un grand nombre de gouvernements qui essaient de museler les manifestations ou contenir les troubles sociaux, parfois à l’encontre de leur propre constitution.
Les défenseurs de l’Internet libre déclarent que jusqu’à 90 % des habitants du continent africain ont éprouvé des perturbations totales ou partielles de l’Internet ordonnées par leur gouvernement au cours des dernières années.
Parmi les coupures les plus notoires, on compte le blocage du site de réseaux sociaux Twitter par le gouvernement nigérian en 2021, qui a duré sept mois. Il a fait perdre au pays plus de 1,6 milliard de dollars sous forme de ventes manquées, selon l’analyste Internet NetBlocks qui suit les coupures de l’Internet.
Felicia Anthonio, directrice de la campagne #KeepItOn chez l’organisme mondial des droits de l’homme Access Now, a déclaré au quotidien nigérian Daily Post : « Dans un nombre croissant de pays africains, les gouvernements mettent en œuvre des coupures d’Internet pour contrôler les populations ou maintenir leur contrôle sur celles-ci. »
« Ces actes de domination injustifiés violent les droits fondamentaux et les libertés démocratiques. »
Selon les activistes de l’Internet, le blocage de Twitter par le Nigeria a violé le droit de réunion et la libre expression des citoyens.
Les pays africains ont effectué 88 coupures totales ou partielles depuis 2015 selon SurfShark, groupe de défense de l’accès à l’Internet basé aux Pays-Bas. Le continent était responsable pour 53 % de toutes les coupures d’Internet en 2021, ce qui en fait la région la plus censurée du monde pour cette année.
Access Now a noté dans un rapport que le Nigeria a coupé l’accès à l’Internet par téléphone mobile dans les régions de Zamfara et Kaduna en 2021 parce que des bandes criminelles se servaient du système pour partager des informations sur les mouvements de troupe du gouvernement.
Les manifestations deviennent une raison majeure pour les coupures d’Internet. Toutefois, des études montrent que les coupures enrayent rarement les manifestations et parfois les aggravent en incitant la population à la colère.
En juin dernier, la junte soudanaise au pouvoir a perturbé le service Internet lorsque les manifestants sont sortis dans les rues pour dénoncer le coup d’état d’octobre 2021 et exiger la transition vers un gouvernement civil.
Le Burkina Faso a coupé deux fois cette année son service Internet à cause des rapports de soulèvement et d’échange de tirs dans les camps militaires.
SurfShark a identifié les pays suivants qui ont interdit ou bloqué les sites de réseaux sociaux en 2021 : Burkina Faso, Éthiopie, Nigeria, Ouganda, République du Congo, Sénégal, Soudan, Soudan du Sud, Tchad et Zambie. C’est en 2021 que les coupures d’Internet ont baissé de 35 % dans le monde, selon le groupe. Dans certains cas, les résidents ont contourné les blocages en utilisant la technologie des VPN (réseaux privés virtuels) pour accéder à l’Internet par d’autres moyens.
Plusieurs de ces pays ont coupé l’Internet pendant les élections, en refusant à leurs citoyens un accès à des informations sur les questions électorales et les candidats, selon les défenseurs de l’Internet. L’Éthiopie a coupé l’accès à l’Internet dans la région du Tigré lorsque les combats y ont éclaté en 2021, afin d’isoler couper effectivement la région du reste du monde.
« Une démocratie authentique ne peut tout simplement pas exister avec des coupures d’Internet », a déclaré Access Now dans un rapport récent.