PERSONNEL D’ADF
Une investigation de trois mois conduite par l’Environmental Justice Foundation (EJF, Fondation pour la justice environnementale) a conclu que 90 % des vaisseaux de pêche actifs au Ghana appartiennent à des sociétés chinoises.
L’EJF, organisation non gouvernementale qui suit les questions liées à l’environnement, accuse les chalutiers chinois pour la chute des stocks de poissons au Ghana. Les propriétaires de ces navires utilisent des stratagèmes complexes pour créer des sociétés de façade dans le pays. L’investigation de l’EJF est basée sur des interviews avec des experts de la pêche et l’analyse des archives et des documents financiers des sociétés.
Les stocks de petits poissons pélagiques tels que la sardinelle ont baissé de 80 % au Ghana au cours des vingt dernières années. L’une de ces espèces appelée sardinella aurita a entièrement disparu. La Chine est le pire contrevenant mondial de la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN), selon l’Indice de pêche INN.
« Tout déclin additionnel sera catastrophique et aura un coût socio-économique énorme », déclare Steve Trent, directeur exécutif d’EJF, dans un rapport sur ghanaweb.com.
Le problème est courant dans les pays d’Afrique de l’Ouest où la pêche illégale représente 37 % de toutes les prises de poisson, ce qui fait perdre à la région 1 milliard de dollars par an, selon l’EJF. Cette dernière estime que le Ghana perd 50 millions de dollars par an à cause d’accords opaques avec des sociétés chinoises telles que la Shandong Zhonglu Oceanic Fisheries Co.
Shandong Zhonglu a créé trois sociétés de façade qui détiennent cinq licences de pêche au Ghana, selon l’EJF qui critique le ministère du Développement des Pêches et de l’Aquaculture pour avoir accordé les licences.
Francis Adam, président de l’Association des pêcheurs de la région centrale, déclare que les demandes de réforme dans le secteur de la pêche sont largement ignorées, même après l’émission par l’Union européenne d’un « carton jaune » au Ghana l’an dernier. L’UE a conclu que le niveau de développement et d’engagement contre la pêche INN au Ghana était insuffisant. Ce carton jaune est un avertissement indiquant que des sanctions pourraient être imposées si le pays n’améliore pas ses efforts pour mettre fin à la pêche INN.
« Le ministre en exercice et les responsables précédents n’ont pas démontré un engagement suffisant pour affronter la participation chinoise au secteur de la pêche et l’impact sur les pêcheurs locaux », a déclaré Francis Adam sur ghanaweb.com.
Mavis Hawa Koomson, ministre des pêches du Ghana, n’a pas répondu aux demandes d’information de l’EJF dans le cadre de son investigation.
Les chalutiers chinois au Ghana utilisent une tactique illégale mais courante appelée le « saiko », selon laquelle un chalutier industriel transfère sa prise sur une grande pirogue capable de transporter environ 450 fois plus de poisson qu’une pirogue de pêche artisanale.
En 2017, le saiko a permis de capturer 100.000 tonnes de poisson dans les eaux du Ghana, ce qui a fait perdre au pays des millions de dollars de revenus et a menacé la sécurité alimentaire et les emplois, selon EJF.
Ekua Kokuwa, commerçante poissonnière à Ankaful, a déclaré à l’EJF : « Le saiko a détruit notre océan. Il nous préoccupe parce que les chalutiers attrapent tous les poissons qui auraient été attrapés par nos époux et les utilisent pour le saiko. Le gouvernement doit soutenir les communautés côtières en stoppant le saiko parce que nous souffrons vraiment. »
Plus de 200 villages côtiers du Ghana dépendent de la pêche comme source principale de revenus. Le revenu annuel moyen par pirogue artisanale a baissé jusqu’à 40 % au cours des quinze dernières années, selon l’EJF.
Pour aider à préserver les stocks de poissons, le Ghana a exhorté les pays voisins en décembre dernier à mettre en œuvre des périodes de fermeture de pêche coordonnées. Le même mois, le Ghana a conclu un accord avec le Bénin et le Togo pour mettre en œuvre un programme conjoint d’observation des pêches pour réduire la pêche INN dans la région.