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La piraterie et les enlèvements sont en hausse dans le golfe de Guinée

PERSONNEL D’ADF

Le Methane Princess, navire-citerne transportant du gaz naturel liquéfié, était amarré près de Malabo (Guinée équatoriale) le 17 octobre lorsque des pirates l’ont attaqué. Ils ont ignoré la cargaison et ont pris quelque chose de plus précieux : deux membres d’équipage.

Bien que la piraterie ait baissé dans le monde, elle augmente dans le golfe de Guinée. Les attaques ont augmenté de 40 % depuis le début de l’année.

Contrairement au golfe d’Aden, où des décennies de piraterie ont forcé les équipages à se défendre contre les attaques, les navires du golfe de Guinée sont plus légèrement armés et moins préparés aux assauts des pirates, déclare Onyekachi Adekoya, directeur général de PR24 Security du Nigeria, à TVC News Nigeria.

La pandémie de Covid-19 a changé les tactiques des pirates. Une surabondance de pétrole a fait baisser la valeur de la marchandise volée, aussi les pirates ont commencé à pratiquer l’enlèvement des membres d’équipage pour les rançonner, en gagnant jusqu’à 50.000 dollars par personne. Le golfe de Guinée est responsable pour 90 % des enlèvements en 2020, selon le rapport « Examen de la sécurité et du fret maritime 2020 » d’Allianz Global Corporate & Security.

En juillet, les pirates ont laissé le Curacao Trader à la dérive après avoir enlevé 13 des 19 membres d’équipage russes et ukrainiens. L’équipage a été libéré en août avec l’aide des responsables nigérians.

90 % des importations et exportations africaines sont expédiées par voie maritime.

« Ce qui se passe dans le golfe de Guinée est important pour tout le monde ici », a déclaré Simeón Oyono Esono Angüe, ministre des affaires étrangères de Guinée équatoriale, au Conseil de sécurité des Nations unies en 2019.

Les experts de la sécurité maritime déclarent que plusieurs facteurs contribuent à la hausse de la piraterie dans le golfe de Guinée :

Le cadre juridique

En août dernier, le Nigeria a condamné ses premiers pirates en vertu d’une loi anti-piraterie adoptée en 2019. Les trois hommes appartenaient à une bande qui avait détourné le pétrolier MV Elobey VI au large des côtes de Guinée équatoriale et rançonné l’équipage à hauteur de 200.000 dollars.

Pour que la lutte contre la piraterie ait du succès, les voisins du Nigeria doivent suivre son exemple, selon l’expert en sécurité Thierry Vircoulon, qui a assumé des postes à l’International Crisis Group et l’Institut français pour les relations internationales.

« Le travail de police en mer requiert un corpus juridique aussi complet et complexe que celui de la police terrestre », écrit M. Vircoulon dans Politique étrangère. « À ce titre, un travail considérable de mise à niveau du droit national doit être effectué dans tous les États du golfe de Guinée. »

La coopération régionale

La Commission du golfe de Guinée a été formée en 2001 pour adresser les questions suscitant une préoccupation commune, y compris la piraterie.

25 pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale ont signé le Code de conduite de Yaoundé en 2013. Il fournit la structure pour les opérations conjointes, le partage du renseignement et l’harmonisation des cadres juridiques. Le code comprend cinq zones, deux centres régionaux et un centre de coordination inter-régional qui surveille 6.000 kilomètres de côte et 12 ports principaux.

La Charte de Lomé de 2016 de l’Union africaine exhorte les pays à travailler ensemble pour la sécurité maritime en comblant les lacunes dans les capacités de sécurité de chaque pays.

Ce qui se passe sur terre

La Charte de Lomé encourage la pêche artisanale et le développement économique pour stopper la piraterie avant qu’elle ne commence.

« Lorsque vous parlez des questions de sécurité maritime, vous parlez du côté terre », déclare M. Adekoya à TVC News Nigeria. « Il existe un certain nombre de questions qui affectent la façon de vivre normale des gens. Les gens doivent donc chercher des façons de pourvoir à leurs propres besoins. »

La pêche illégale pratiquée par les énormes flottes de pêche industrielle de Chine et d’ailleurs nuit aux pêcheurs qui travaillent dans le golfe de Guinée. Il en est de même de la détérioration de l’environnement provoquée par la pollution près des installations pétrolières. À mesure que les prises baissent, les pêcheurs peuvent devenir désespérés et s’engager dans la piraterie, déclare M. Adekoya.

Dans la Conférence mondiale sur la sécurité maritime de 2019 à Abuja (Nigeria), les nations ont demandé aux pays du golfe de Guinée d’assister les résidents de la côte dont la subsistance est menacée.

« Vous devez adresser les menaces provenant du côté terre », déclare M. Adekoya.

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