PERSONNEL D’ADF
Les chalutiers étrangers qui pratiquent la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (IUU) aux larges des côtes d’Afrique de l’Ouest sont en train de décimer les populations jadis abondantes de poissons, en dévastant les écosystèmes locaux et en menaçant la subsistance de plus de 7 millions d’Africains, dont un grand nombre ont des familles qui dépendent depuis des générations de la pêche artisanale.
On estime que la pêche IUU et d’autres pratiques maritimes commerciales illégales pourraient se traduire, pour les pays d’Afrique de l’Ouest, par des pertes de « près de 1,95 milliard de dollars sur la chaîne de valorisation des poissons et des pertes de revenus ménagers de 593 millions de dollars par an », selon un reportage de The Africa Report.
Le coût de la pêche illicite est particulièrement élevé pour les pêcheurs artisanaux de la Gambie, pays de seulement 2,25 millions d’habitants où plus de 200.000 d’entre eux dépendent de la pêche locale pour leur subsistance.
Les chalutiers chinois sont parmi les pires navires criminels dans les eaux d’Afrique de l’Ouest. Peter Hammarstedt, un capitaine de l’organisation sans but lucratif Sea Shepherd Conservation Society, déclare qu’il existe deux méthodes par lesquelles les navires chinois obtiennent des permis de pêche auprès des pays africains, qui ont des difficultés pour observer, contrôler et surveiller des milliers de kilomètres de voies navigables côtières et fluviales.
« [Ou bien ] les vaisseaux de pêche [chinois] font partie de la flotte de pêche des eaux distantes, qui est fortement subventionnée par le gouvernement chinois, et ces bateaux versent des droits de pêche, ou bien ils appartiennent à une société de pêche nationale [qui est] essentiellement une coopérative entre les Chinois et les intérêts commerciaux locaux », écrit le capitaine Hammarstedt à ADF dans un e-mail. « Dans ce dernier cas, les navires de pêche battent le pavillon du pays africain côtier/insulaire mais la Chine est le propriétaire bénéficiaire. Dans les deux cas, ils comptent sur des agents locaux. »
Depuis le début de l’opération conjointe entre la Sea Shepherd et la Marine et le ministère des Pêcheries de la Gambie, les autorités ont arrêtées des membres d’équipage de 16 chalutiers illégaux. L’un de ces navires battait pavillon chinois et la Chine était propriétaire bénéficiaire de 11 autres navires. La Sea Shepherd conduit des opérations en cours au Bénin, au Liberia et au Gabon.
Les braconniers chinois essaient d’éviter les amendes liées à la pêche IUU en utilisant de nombreuses techniques. Ils éteignent leur transpondeur de localisation, ils transmettent des positions et des données d’identification frauduleuses, ils manipulent les filets de pêche pour contourner les exigences concernant la taille des mailles, ils menacent les observateurs de pêche locaux ou ils leurs offrent des pots-de-vin, et ils transbordent leur prise d’un navire à un autre en pleine mer, déclare le capitaine Hammarstedt.
Ils « mentent [aussi] dans leur déclaration de capacité de pêche sur leur demande de permis. Puisqu’ils paient à la tonne, ils peuvent déclarer un volume de soute plus faible que le volume réel. »
Les braconniers préparent des journaux de bord incorrects concernant leur pêche, ce qui ne permet pas aux inspecteurs locaux de déterminer le lieu de la prise. Des pratiques de déception, notamment le déchargement des prises dans les pays voisins pour éviter les inspections appropriées et la mise en commun des permis entre les navires, sont aussi utilisées.
Ils peuvent aussi recevoir « l’autorisation de pêcher un type de poisson [par exemple le thon] mais ils pratiquent plutôt la pêche clandestine d’autres espèces entièrement différentes [telles que] les requins », déclare le capitaine Hammarstedt. Lorsque leurs actions sont décelées, les braconniers déclarent en général que ce n’était pas intentionnel, ajoute-t-il.
La pêche IUU aide aussi à soutenir les usines de farine de poisson appartenant à la Chine, en Gambie et dans d’autres pays africains. Les usines emploient seulement quelques douzaines de personnes, dont la plupart, et peut-être toutes, sont chinoises, et ces usines émettent des contaminants. Avant l’ouverture des usines, les pêcheurs locaux vendaient leurs poissons sur les marchés locaux pour qu’ils soient transformés en farine de poisson.