Après la Conférence au sommet, les questions d’endettement restent sans réponse
PERSONNEL D’ADF
Lors d’une allocution très attendue sur le Web, le président chinois Xi Jinping a promis de soutenir l’Afrique pendant et après la crise du Covid-19.
« Je suis convaincu que l’humanité vaincra finalement le virus et que les peuples chinois et africain sont prêts à connaître un avenir meilleur », a déclaré M. Xi en mandarin, entouré d’une rangée de drapeaux nationaux du continent, dans le cadre d’une conférence au sommet virtuelle Chine-Afrique sur le Covid-19.
Mais le discours du 17 juin n’a pas offert de plans concrets et les observateurs se demandent quelle est la signification de cette noble promesse. Il est prévu que les économies d’Afrique se contracteront d’au moins 3 % en 2020 à cause de la pandémie, selon le Fonds monétaire international (FMI), et beaucoup de gens espéraient des mesures radicales.
« Le temps est venu maintenant pour que la Chine démontre sa soi-disant “générosité” envers l’Afrique, par des actions, et non pas seulement par des mots », selon un article du réseau d’information panafricain Afrique Média.
- Xi a abordé le sujet de l’annulation des dettes en répétant sa promesse d’éliminer les prêts sans intérêt accordés aux pays africains et a encouragé les institutions financières chinoises à organiser des « consultations amicales » avec les pays africains concernant les autres dettes, tout en continuant à respecter les « principes du marché »,
Mais les observateurs mettent l’accent sur le fait que les prêts sans intérêt représentent une fraction du portefeuille total des prêts chinois accordés à l’Afrique : 9 %, selon une estimation.
« Les prêts sans intérêt sont très souvent annulés », déclare Marina Rudyak, maître de conférences à l’Institut des études chinoises de l’Université de Heidelberg, qui fait le suivi des investissements chinois à l’étranger. « En fait, il semble qu’ils soient toujours annulés lorsqu’un pays déclare qu’il ne peut pas rembourser. » Mme Rudyak résume ainsi le discours de M. Xi : « Au total, il n’y a rien de nouveau. »
Les consultations individuelles entre les créanciers chinois et les pays africains sont une préférence chinoise de longue date. Elles encouragent des négociations séparées sur la restructuration des créances, plutôt que des accords globaux.Dans certains cas, ces négociations conduisent à des concessions supplémentaires. Le journaliste sud-africain Cobus van Staden écrit sur Africa Portal que les prêteurs chinois privés peuvent « faire traîner les choses alors que le temps presse pour que les pays africains trouvent d’autres options avant de courir le risque du non-paiement ».
Romuald Wadagni, ministre de l’Économie et des Finances du Bénin, a déclaré que la proposition d’allègement des dettes ne faisait guère plus que « repousser les difficultés à l’année prochaine ». Il a déclaré à TV5Monde qu’il craignait une longue période de désarroi : « Cela handicaperait notre capacité à avoir accès aux financements dans le futur et à renouer avec le chemin de la croissance. »
Dans son discours de la conférence au sommet virtuelle, le président sud-africain Cyril Ramaphosa a remercié le peuple chinois pour la donation d’équipement de protection individuelle, tout en déclarant qu’une assistance supplémentaire était nécessaire. Il a proposé un moratoire des créances de deux ans et un plan de restructuration des dettes privées et bilatérales, et il a demandé à la communauté internationale de mettre à la disposition de l’Afrique 100 milliards de dollars non utilisés provenant des droits de tirage spéciaux du FMI. « Même si la pandémie de Covid-19 ne perdure pas, ses conséquences pour les gens, les économies et notre planète se feront sentir pendant longtemps », a déclaré M. Ramaphosa.
D’autres font écho à la nécessité de nouveaux investissements pour relancer l’économie.
Lors d’un événement différent, le président nigérien Mahamadou Issoufou souligne que l’offre d’allègement des dettes est nettement insuffisante pour adresser les difficultés économiques provoquées par le virus. « L’ampleur de la crise économique que connaîtront nos États nécessite un soutien financier qui va au-delà d’un simple moratoire [des dettes] », a déclaré le 8 juin M. Issoufou, président intérimaire de la communauté économique des états d’Afrique de l’Ouest, lors d’une allocution. « Nos pays ont besoin de ressources financières fraîches, non seulement pour faire face à la pandémie mais aussi pour relancer l’économie. »
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