AGENCE FRANCE-PRESSE
Quelque chose d’extraordinaire se trouve à l’intérieur d’un tiroir en bois, dans un bureau situé derrière le Musée national de Nairobi. C’est une mâchoire monstrueuse avec des crocs gigantesques, seuls restes connus d’un méga-carnivore préhistorique qui fut déclaré être une nouvelle espèce en 2019.
« Ceci est unique », déclare le paléontologue kényan Job Kibii, en montrant les os datant de 23 millions d’années de Simbakubwa kutokaafrika.
Pendant près de 40 ans, les spécimens prouvant l’existence du plus grand prédateur qui ait jamais vécu en Afrique, un carnivore de 1.500 kilos qui éclipsait les lions, sont restés dans un tiroir au centre-ville de Nairobi.
Comment ces fossiles, qui ont été excavés pour la première fois lors de fouilles dans l’Ouest du Kenya au début des années 1980, ont pu rester méconnus pendant si longtemps ?
M. Kibii, qui préside le service de paléontologie des Musées nationaux du Kenya, en a une idée. « Nous avons des tonnes de spécimens… qui n’ont pas été analysés, déclare-t-il. Il existe définitivement des choses qui attendent d’être découvertes. »
Un système de classement basé sur cartes est utilisé pour chercher des fossiles particuliers. Mais la collection a augmenté exponentiellement, à un rythme que M. Kibii et son équipe ne peuvent pas suivre.
Entre 7.000 et 10.000 nouveaux fossiles arrivent au labo chaque année, déclare M. Kibii, ce qui submerge les 15 employés de son équipe qui doivent nettoyer et classer chaque spécimen. La loi exige que les fossiles découverts au Kenya soient envoyés au musée pour qu’ils puissent être accédés : étiquetés, enregistrés et rangés pour les générations futures.
Si un expert n’est pas disponible pour identifier un spécimen, il peut être mal classé ou ne pas être suivi.
« Nous avons des fossiles des années 1980 qui n’ont pas été classés », déclare Francis Muchemi, responsable des collections.
Simbakubwa a connu un sort similaire. Pensant qu’il s’agissait d’un type de hyène, on l’avait mis de côté dans une arrière-salle et ignoré pendant plusieurs décennies.
M. Kibii est l’un des sept paléontologues du Kenya. Il a été formé en Afrique du Sud parce qu’il n’existait pas de cours offerts chez lui. Il espère acquérir des étagères démontables pour avoir davantage de place pour les collections.
Un microtomodensitomètre serait encore meilleur : cet outil performant à l’origine de grandes avancées dans le monde de la paléontologie permettrait d’examiner d’une nouvelle façon les recoins les plus oubliés du musée.
« Je me demande toujours ce qui se trouve sur certaines de ces étagères », déclare M. Kibii.
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