PERSONNEL D’ADF
La Somalie et l’Éthiopie sont deux pays voisins qui essaient de mettre fin à la violence qui affecte la Corne de l’Afrique depuis des dizaines d’années. Certains pensent que l’apaisement doit commencer au niveau de la communauté et se transmettre d’une personne à l’autre.
Il y a des efforts communautaires pour institutionnaliser la justice et la réconciliation transitionnelles dans la région afin de mettre fin au cycle de tragédie, en reconnaissant les fautes du passé et affrontant les doléances profondément enracinées.
« La justice transitionnelle peut aider à transformer une société en faisant face aux injustices historiques, encourageant l’inclusion et promouvant une culture des droits de l’homme », a déclaré Patience Chiradza, directrice de la Gouvernance et la Prévention des conflits de l’Union africaine, lors de la cérémonie d’ouverture du 8ème forum africain sur la justice transitionnelle le 11 septembre à Port-Louis (Maurice).
Après trente années d’efforts de justice transitionnelle sur le continent, avec un mélange de succès et d’échecs, l’UA et les experts du maintien de la paix international demandent aux organisations de la société civile (CSO) locales de faire une différence dans la Corne de l’Afrique. Les deux pays portent toujours les cicatrices de plusieurs années de guerre civile. En Somalie, les divisions et les rivalités entre les clans persistent et le terrorisme continue à s’intensifier, alors que l’Éthiopie affronte des tensions ethniques et une violence récurrente.
Les experts de la réconciliation Saron Hirpa Abu et Eden Matiyas Mulugeta ont récemment écrit dans un article de blog pour l’institut de recherche Wilson Center : « La Somalie et l’Éthiopie ont toutes les deux lancé des processus pour faire face aux doléances historiques, promouvoir la prise de responsabilité et améliorer la paix. [Leurs processus] se concentrent sur le dialogue inclusif, la consultation publique et l’engagement avec diverses parties prenantes telles que les [CSO], les chefs traditionnels, les femmes et les jeunes. Les deux structures cherchent à reconstruire la confiance, améliorer la gouvernance et établir la fondation pour une paix durable. »
Avec leur but de prévenir la violence, la justice et la réconciliation transitionnelles peuvent aider ces sociétés déchirées par la guerre à passer du conflit à la paix et la stabilité grâce à une gouvernance plus inclusive. Sans ces processus, les doléances non résolues et le manque de confiance pourraient alimenter les conflits en cours, selon la politique de justice transitionnelle de l’UA.
Les efforts nationaux en Éthiopie et en Somalie ont fait face à des critiques. Dans le sillage de l’accord de paix de novembre 2022 qui a stoppé la guerre civile dévastatrice de l’Éthiopie dans la région du Tigré, les responsables fédéraux ont promis d’établir une politique nationale de justice transitionnelle. Les victimes éthiopiennes des crimes de guerre et des nettoyages ethniques documentés continuent à attendre que le débat politique se transforme en dialogue véritable.
Le journal Addis Standard écrit dans un éditorial du 17 mai : Un « problème criant qui sape le processus de justice transitionnelle est la participation à la main lourde de l’état, accusé de commettre des atrocités, non seulement dans la formulation de la politique mais aussi dans sa mise en œuvre imminente. L’ingérence omniprésente de l’état rend le processus inefficace et encourage la méfiance du public et des autres parties prenantes. »
La Somalie a lancé son cadre de réconciliation nationale (NRF) en 2017 mais il a été reporté et il fut relancé cette année.
Les groupes locaux des deux pays cherchent à restaurer l’élan lorsque les efforts nationaux stagnent ou n’ont plus la confiance du peuple. On a des espoirs renouvelés dans le processus de Somalie, qui est le résultat de consultations nationales, y compris avec les CSO.
Saron Hirpa Abu et Eden Matiyas Mulugeta écrivent : « Le but du NRF est de faire face aux doléances historiques et aux injustices structurelles en promouvant la réconciliation nationale, restaurant la confiance et reconstruisant la foi dans le gouvernement. Il intègre les méthodes traditionnelles et modernes de résolution des conflits pour encourager la paix et contrer l’extrémisme. »
Dans leur article de blog, ils recommandent une participation plus grande de la part des CSO et d’autres groupes locaux qui ont déjà créé la confiance au sein de leurs communautés et servent des groupes historiquement marginalisés.
Ils écrivent : « Les deux pays peuvent tirer profit des réseaux CSO pour étendre leur portée au sein des communautés. Les CSO sont bien placées pour conduire des initiatives de dialogue communautaire, d’éducation civique, de divulgation de la vérité et de réconciliation. Pour améliorer ces efforts, les gouvernements doivent établir des plateformes authentiques et ouvertes qui soutiennent activement les initiatives conduites par les CSO qui font avancer ces politiques gouvernementales importantes grâce à l’inclusion des voix des communautés. »