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LA CHASSE AUX BRACONNIERS QUI S’ATTAQUENT AUX RHINOCÉROS

AGENCE FRANCE-PRESSE

Équipés de treillis de camouflage, fusils d’assaut, jumelles de vision nocturne, appareils d’imagerie thermique et radios, les gardes forestiers de la réserve d’Ol Jogi, au Kenya, se préparent pour la patrouille de nuit, dans la « guerre » contre le braconnage.

« Cela semble fou, mais c’est réellement une guerre », explique Jamie Gaymer, responsable de la sécurité de la vaste réserve. « Le braconnage est lié au crime organisé au niveau international et est totalement hors de contrôle. Et ces gars sont en premier ligne, au péril de leur vie, pour protéger ces animaux ».

À travers la brousse épaisse, 20 hommes, recrutés dans les communautés locales, se répartissent en binômes dans la réserve, qui couvre 240 kilomètres carrés. Certains passeront la nuit à patrouiller à travers la forêt, d’autres prendront des positions embusquées.

Formés par le Service kenyan de la faune et par la police, les membres de la force de sécurité sont aussi des policiers de réserve, ce qui les autorise à porter une arme. Les équipes ont eu une formation militaire, pour pouvoir riposter à des attaques potentiellement meurtrières d’un « ennemi bien équipé », a expliqué Jamie Gaymer.

Chaque nuit, ils risquent leur vie. Les braconniers qu’ils traquent tirent à vue, mais le danger peut aussi venir des animaux eux-mêmes : éléphants, buffles et léopards.

« C’est dangereux. Mais ce danger me donne un emploi et me permet de manger », déclare le garde Joseph Nang’ole, 27 ans. « J’ai des enfants et si nous ne protégeons pas ces animaux, mes enfants n’auront pas l’occasion de les voir ».

Les conditions sont rudes, la nuit est froide et souvent pluvieuse. Mais pour le chef de l’unité, Benson Badiwa, la protection des rhinocéros est essentielle. Leur mission est de veiller à la sécurité des rhinocéros à Ol Jogi dont 20 rhinocéros blancs du Sud et 46 rhinocéros noirs de l’Est, espèce en danger critique d’extinction, dont il reste moins de 800 individus, essentiellement au Kenya.

Sur le marché noir, la corne de rhinocéros vaut deux fois plus que l’or : jusqu’à 80.000 dollars le kilo au Moyen-Orient ou en Asie. Un braconnier recevra de 10.000 à 15.000 dollars le kilo, une fortune pour une nuit de travail. Leurs armes sont parfois louées entre 200 et 300 dollars à des policiers ou militaires peu scrupuleux.

En juillet 2014, Ol Jogi a connu le pire massacre de rhinocéros depuis plus de 15 ans au Kenya. Quatre rhinocéros ont été tués dans une double attaque simultanée, du jamais vu au Kenya, selon Jamie Gaymer, qui suspecte que le gang avait bénéficié de complicités.

Comme dans toute guerre, le renseignement est une arme cruciale et Jamie Gaymer entretient un réseau d’informateurs locaux qui le renseignent sur d’éventuels complices des braconniers. À Ol Jogi, environ 130 personnes veillent à la sécurité des rhinocéros, les frais de fonctionnement sont en partie couverts par le tourisme.

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