PERSONNEL D’ADF
Le parcours d’Abebe Bikila jusqu’à la célébrité internationale a commencé par accident. Abebe Bikila voulait disputer l’épreuve du marathon pour l’Éthiopie aux Jeux olympiques d’été de 1960 à Rome. Cependant, son meilleur temps personnel enregistré pour le marathon était meilleur que celui du record du monde de l’époque, ce qui laissait sceptiques les responsables de l’épreuve. Il fut écarté en faveur d’un autre coureur, qui par la suite se fit une fracture de la cheville en jouant au football. Abebe Bikila, qui était alors un simple soldat dans l’Armée impériale de Haïlé Sélassié, n’a été retenu dans l’équipe qu’à titre de remplacement de dernière minute.
Les chaussures de sport d’Abebe Bikila pour les Jeux olympiques n’étaient pas bien ajustées à ses pieds, lui causant des ampoules. Il a décidé de courir pieds nus, comme il l’avait souvent fait dans les hautes plaines d’Éthiopie. Même au sein du groupe de marathoniens élancés, Abebe Bikila ressortait nettement du lot. Avec ses pieds nus et sa constitution bien particulière — pour une taille de 1,78 mètres, il ne pesait que 57 kilos — il avait une silhouette bien singulière.
À moins de la moitié de l’épreuve de 42 kilomètres, Abebe Bikila et le Marocain Rhadi Ben Abdesselam s’étaient détachés du reste des coureurs. Au moment de son retour dans la ville, Abebe Bikila, avançant au clair de lune, avait pris de l’avance sur le Marocain. Il termina l’épreuve en 2 heures, 15 minutes et 16 secondes — établissant un record du monde. Pendant que les autres coureurs arrivaient les uns après les autres, claudiquant pour cause d’épuisement, Abebe Bikila s’étirait et esquissait même des pas de danse.
Les photos d’Abebe Bikila aux pieds nus en vinrent à symboliser l’ensemble des Jeux olympiques de 1960. En une seule course, il devint le plus célèbre Africain de la planète à cette époque. Il a été le premier Africain de l’Est à gagner une médaille olympique.
L’année suivante, Abebe Bikila a disputé des marathons en Grèce, au Japon et en Tchécoslovaquie. Il les remporta tous.
Cependant, Abebe Bikila n’allait pas en rester là. En 1964, 40 jours avant de disputer l’épreuve des Jeux olympiques d’été de Tokyo, il s’effondra de douleur à l’entraînement. Une appendicite aiguë fut diagnostiquée, et il dut être opéré sur le champ. On ne prévoyait pas qu’il puisse se rétablir à temps pour les Jeux olympiques.
Et pourtant il se rétablit, et il disputa à nouveau l’épreuve du marathon, cette fois-ci en portant des chaussures de sport. Et de même qu’en 1960, il commença à se détacher de la plupart de ses concurrents à environ mi-course. Après 30 kilomètres, il avait 40 secondes d’avance sur son concurrent le plus proche. Il finit en 2 heures, 12 minutes et 11 secondes — encore un record olympique — et avec une avance de plus de 4 minutes sur son plus proche concurrent. Il devint le premier homme à remporter le marathon olympique deux fois.
Quatre ans plus tard, en disputant le marathon des Jeux olympiques de Mexico, Abebe Bikila abandonna l’épreuve suite à une fracture du genou. Le vainqueur a déclaré plus tard qu’Abebe Bikila était parti pour remporter l’épreuve s’il n’avait pas été blessé.
Un an après, Abebe Bikila eut un accident de la route à Addis-Abeba après avoir perdu le contrôle de sa berline Volkswagen. Cet accident le rendit tétraplégique. Avec le temps, il regagna l’usage de ses bras et reprit la compétition, cette fois-ci dans la discipline de la course en fauteuil roulant. En 1973, à l’âge de 41 ans, il décéda d’une hémorragie cérébrale, une complication liée à son accident de voiture. Environ 75.000 personnes assistèrent à ses funérailles.
Aujourd’hui, les coureurs de fond africains constituent l’élite mondiale — 13 Africains ont remporté des médailles à l’épreuve du marathon hommes depuis Abebe Bikila. Les Africains dominent encore davantage dans les épreuves du 10.000 mètres et du 5.000 mètres, de même que les Africaines.
L’homme aux pieds nus originaire d’Éthiopie leur a ouvert le chemin.