PERSONNEL D’ADF
Les défenseurs des droits de l’homme déclarent que les combattants des Forces de soutien rapide (FSR) du Soudan ont assassiné des centaines de civils dans l’État d’Al-Jazirah pour se venger de la désertion d’un commandant FSR de haut rang dans cette région.
Les combattants FSR ont attaqué la localité d’Al-Sireha en octobre dernier après la défection d’Abu Aqla Kikal, ex-officier militaire qui avait rejoint les FSR au début de leur conflit avec les Forces armées soudanaises (FAS) en avril 2023.
Dans une vidéo affichée sur les réseaux sociaux en octobre 2024, les combattants FSR ont montré près de 70 personnes, certains avec des vêtements ensanglantés, qui étaient détenues à une intersection dans cette petite commune agricole.
Le combattant FSR qui filmait la vidéo déclare en langue arabe : « Kikal…, regarde, c’est ton peuple » ; puis il force les prisonniers à émettre des bruits d’animaux.
Human Rights Watch (HRW) a confirmé l’authenticité de la vidéo, affichée en compagnie d’une seconde montrant des actes des combattants FSR en réponse à la désertion du général Kikal.
Ce dernier a rejoint les FAS avec des membres de son état-major et des sympathisants. Selon le Sudan Tribune, il a reçu l’amnistie offerte par le chef des FAS à toute personne qui quitte les FSR.
Après sa défection le 20 octobre, les combattants FSR ont passé cinq jours à semer la panique dans trente localités du Nord et de l’Est de l’État d’Al-Jazirah, région axée sur l’agriculture. On estime que 130.000 personnes se sont enfuies pour chercher la sécurité dans d’autres zones du Soudan.
Les combattants FSR ont attaqué les civils d’Al-Sireha, petite localité entourée de champs cultivés. Le groupe soudanais de défense des droits Middle Call a documenté au moins 124 tués et 150 kidnappés à Al-Sireha entre le 20 et le 25 octobre.
Le Sudan Protection Cluster signale que les attaques ont tué environ 300 civils à Tamboul, à approximativement 100 km d’Al-Sireha. Plus de 46.500 personnes se sont enfuies de Tamboul lorsque les combattants FSR prirent en embuscade les soldats des FAS et les chassèrent de la localité.
HRW a vérifié des vidéos montrant les combattants FSR qui détenaient des hommes à Al-Sireha et a étudié des images satellitaires révélant la possibilité de nouveaux charniers dans le village.
Amy Pope, directrice générale de l’Organisation internationale pour les migrations, a déclaré à l’Associated Press : « Les assassinats et les effroyables violations des droits de l’homme dans [l’État] d’Al-Jazirah intensifient le coût humain inacceptable que ce conflit impose au peuple du Soudan. »
Les témoins déclarent aux enquêteurs onusiens que les combattants FSR ont tiré au hasard sur les civils et ont violé les femmes et les jeunes filles de la communauté. Les combattants ont aussi pillé les marchés, brûlés les récoltes et empoisonné les approvisionnement alimentaires, en assassinant 50 personnes de plus, selon des témoins.
Une résidente de Tamboul âgée de 55 ans a dit à HRW que les combattants des FSR avaient réuni les hommes et les jeunes garçons lorsqu’ils étaient entrés dans la localité.
« J’ai vu un soldat FSR tirer une balle dans la poitrine d’un homme. Ils ont continué à hurler en nous disant de partir de la commune. Ils ont dit que ceux qui resteraient ici ne seraient pas considérés comme des civils. »
Un autre résident de Tamboul déclare que les combattants FSR sont allés dans chaque maison pour chercher les membres de la famille du général Kikal.
Il dit à HRW : « Ils ont menacé de tuer tous les membres de sa famille. »
Le général a quitté les FSR lorsque le groupe paramilitaire a perdu une série de batailles contre les FAS. Ces dernières ont passé la majeure partie de 2024 à reconquérir le terrain qu’elles avaient perdu contre les FSR au début de la guerre.
Au cours des dernières semaines, les FAS ont gagné une victoire importante lorsqu’elles ont reconquis Wad Madani, capitale de l’État d’Al-Jazirah. La ville était contrôlée par les FSR depuis décembre 2023.
Les défenseurs des droits de l’homme ont condamné le massacre de plusieurs centaines de civils par les combattants FSR.
Clémentine Nkweta-Salami, coordinatrice humanitaire des Nations unies pour le Soudan, déclare à Middle East Eye : « Ce sont des crimes atroces. Je suis choquée et profondément consternée que les violations des droits de l’homme telles que celles constatées au Darfour l’an dernier, notamment le viol, les attaques ciblées, la violence sexuelle et les massacres, se répètent dans l’État d’Al-Jazirah. »