PERSONNEL D’ADF
La vice-secrétaire générale des Nations unies Amina Mohammed était l’un de plusieurs intervenants qui ont fourni des évaluations sombres sur la violence extrémiste à la conférence au sommet sur le contre-terrorisme d’Abuja (Nigeria) cette année.
Elle a déclaré : « La situation en Afrique, et particulièrement au Sahel, est désastreuse, et certains groupes terroristes parmi les plus violents y sont actifs ; la région enregistre aujourd’hui près de la moitié de tous les décès dus au terrorisme dans le monde. »
Le président de la Commission de l’Union africaine Mousa Faki Mahamat a cité les données du Centre africain d’études et de recherche sur le terrorisme en Algérie et a mis en évidence quelques statistiques qui donnent à réfléchir : en moyenne, il y avait 8 incidents et 44 victimes par jour sur le continent en 2023.
On a enregistré plus de 16.000 morts en 2023, y compris plus de 7.000 civils et 4.000 membres des forces de sécurité.
Il a déclaré : « Le terrorisme et l’extrémisme violent sont les plus grands maux de notre époque ; ils se propagent dans toutes les cinq régions d’Afrique. »
Les menaces posées par les organisations extrémistes violentes sur le continent évoluent constamment, à mesure que les deux organismes principaux, Al-Qaïda et l’État islamique, exploitent « un déficit des capacités de contre-terrorisme », selon un rapport du 13 août par un panel d’experts onusiens.
« La situation devient de plus en plus complexe par suite du couplage des différends ethniques et régionaux avec le programme et les opérations de ces groupes. »
Une série d’infographie publiée par le Centre d’études stratégiques de l’Afrique (CESA) le 13 août montre la montée en flèche du nombre de gens tués par la violence des militants extrémistes dans certaines régions au cours des dernières années, alors que les chiffres sont en baisse dans d’autres régions.
Le Sahel : La région qui recensait le nombre le plus faible de morts il y a dix ans est celle qui en a enregistré le plus au cours des droits dernières années.
Le CESA déclare : « Les 11.200 personnes tuées au Sahel en 2024 [jusqu’au 30 juin], soit trois fois plus qu’en 2021, représentent aujourd’hui plus de la moitié de toutes les victimes signalées sur le continent. La violence des forces de sécurité contre les civils provoque toujours une augmentation du recrutement par les groupes extrémistes violents. Les juntes militaires sahéliennes et leurs milices alliées ont tué plus de civils l’an dernier (2.430) que ne l’ont fait les groupes islamistes (2.050). »
Les experts de l’ONU soulignent « un déficit des capacités de contre-terrorisme » qu’Al-Qaïda et l’État islamique continuent à exploiter.
La Somalie : Les chebabs sont présents depuis trente ans et ont transformé ce pays chancelant en deuxième champ de bataille sur le continent au cours des trois dernières années.
Le centre écrit : « Les 6.590 morts signalés en 2024 sont plus du double des morts signalés en 2020. »
Les chebabs continuent à avoir une présence paralysante, alors que Daech-Somalie représentait moins d’un pour cent des activités terroristes en Somalie et au Kenya cette année. Malgré des pertes importantes dues aux frappes aériennes et aux opérations militaires, « les chebabs restent résilients ». Les experts onusiens estiment qu’ils ont entre 7.000 et 12.000 combattants et qu’ils perçoivent 100 millions de dollars par an, principalement sous forme d’impôts, à Mogadiscio et dans le Sud de la Somalie.
Le bassin du lac Tchad : Il y a une dizaine d’années, cette région était l’épicentre de la violence terroriste en Afrique avec 67 % de tous les décès, soit 13.670 par an selon le CESA.
Le rapport déclare : « Au cours des dix dernières années, la violence islamiste militante dans le bassin du Tchad (qui inclut le Nord-Est du Nigeria et les zones frontalières du Cameroun, du Niger et du Tchad) a eu des hauts et des bas. Les deux dernières années ont constaté une hausse des événements violents, après une période de déclin. Toutefois, le nombre annuel de morts liés à ces événements est resté relativement stable, en général entre 3.500 et 3.800. »
Le Mozambique : La province septentrionale du Cabo Delgado a constaté avec horreur l’émergence d’une insurrection locale en 2017, laquelle s’est transformée en groupe meurtrier de Daech-Mozambique. Des opérations militaires multinationales ont dégradé les capacités du groupe mais le nombre d’événements violents et de décès a augmenté au cours des douze derniers mois.
« Les 250 événements et 460 morts anticipés à la fin 2024 représenteraient près du double de la violence de l’année précédente », écrit le centre.
L’Afrique du Nord : Du 30 juin 2014 au 30 juin 2015, on a recensé 3.650 morts dus au terrorisme : c’est le deuxième chiffre le plus élevé du continent. Aujourd’hui, cette région a le nombre le plus bas de décès signalés parmi les cinq régions.
Le CESA écrit : « Cette année est la première depuis 2010 où il n’y a pas eu d’événements violents liés aux groupes islamistes militants en Égypte. Les Nations unies pensent que Daech-Libye et Al-Qaïda ont toujours des combattants dans la partie Sud du pays, mais ils semblent se concentrer sur les profits de l’économie illicite. »
Bien que Mme Mohammed reconnaisse la triste situation du continent, elle fait appel aux pays qui abritent ces points sensibles, et à leurs voisins, pour œuvrer avec l’ONU et les autres organisations internationales afin de traiter les causes profondes du terrorisme. Elle ajoute que les gouvernements du continent doivent renouer leur « contrat social » avec les communautés et le peuple.
« Les terroristes sont accueillis par les gens qui sont profondément déçus, exclus et désespérés. Lorsque nous créons un environnement dans lequel les jeunes peuvent prospérer, nous pouvons dissuader la désillusion qui conduit certains à penser que rejoindre les groupes terroristes tels que la PAOEI [Province d’Afrique de l’Ouest de l’État islamique] ou Boko Haram offre de meilleures opportunités pour le développement de leur communauté et leur continent. »