C’était un mercredi récent dans les faubourgs de Johannesbourg lorsque les autorités sud-africaines ont détruit près d’une tonne d’os de lion dans un crématoire pour animaux domestiques.
La destruction de ces parties de corps confisquées s’inscrit dans le cadre des efforts de l’Afrique du Sud pour mettre fin à la reproduction des lions en captivité et au trafic de leurs os pour la médecine traditionnelle chinoise (MTC).
L’Afrique du Sud a essentiellement interdit l’exportation des os de lion cette année en fixant le quota d’exportations pour ces derniers à zéro. On estime que l’Afrique du Sud a 12.000 lions élevés dans des fermes à des fins de chasse, comparé à une population sauvage d’environ 3.000 lions. Les lions tués pendant la chasse sont dépecés et les parties de leur corps sont trafiquées, souvent substituées aux os de tigre utilisés dans les formules de la MTC.
L’Afrique du Sud est depuis longtemps un centre de commerce illicite des os de lion, des cornes de rhinocéros, de l’ivoire d’éléphant et autres parties et produits animaliers, dont beaucoup sont expédiés vers les marchés asiatiques pour être utilisés dans la MTC.
Le gouvernement d’Afrique du Sud a interdit l’exportation des os de lion en 2019 et a annoncé en 2024 qu’il clôturerait les fermes d’élevage de lion du pays, en citant les conditions insalubres dans lesquelles la plupart des animaux vivent. Toutefois, aucune date ferme n’a été fixée pour leur fermeture. Les autorités avaient déclaré à l’époque que la chasse au trophée continuerait pendant une période non précisée.
Selon un nouveau rapport, les chercheurs de la Global Initiative Against Transnational Organized Crime (GI-TOC) ont œuvré avec les organisations de surveillance de la faune sauvage du monde entier pour examiner comment le commerce illicite de la faune sauvage déplace les animaux et les parties des animaux dans le monde, en notant qu’une grande partie de ce trafic est axé sur la Chine.
L’étude a couvert la période entre avril 2024 et août 2025 et a inclus trois pays africains : l’Afrique du Sud, le Cameroun et le Nigeria.
Une proportion considérable du commerce illicite de la faune sauvage a lieu en ligne en pleine vue ; Facebook affiche la majorité de la publicité qui fait la promotion des animaux vivants (en général des oiseaux) et des parties animalières (en général celles des mammifères).
L’étude de GI-TOC a découvert que Facebook accueille près de 84 % des publicités examinées dans le monde, dont le nombre s’élève à plus de 13.200. Ce pourcentage est en baisse par rapport à 95 % il y a quelques années. Deux tiers de ces publicités font la promotion de parties du corps des animaux, et 84 % d’entre elles proviennent d’animaux protégés par la Convention des Nations unies sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES).
« Ceci met en lumière la centralité continue de Facebook pour surveiller les efforts et la mise en application des interventions réglementaires », écrivent les chercheurs de la GI-TOC.
Dans certains cas, les annonceurs ont utilisé des émojis codifiés pour identifier secrètement les produits de faune sauvage qu’ils offrent.
Les chercheurs de la GI-TOC recommandent que Facebook et les autres sites de réseaux sociaux ou d’e-commerce renforcent leurs propres contrôles pour la publicité des produits de faune sauvage en exigeant une documentation qui montre que les produits sont exemptés des interdictions commerciales.
En août, l’Afrique du Sud a inculpé six personnes accusées du trafic de près de 1.000 cornes de rhinocéros vers les marchés asiatiques à l’aide de documents contrefaits. Les autorités déclarent que les trafiquants prétendaient vendre les cornes dans le pays, alors qu’ils les expédiaient en fait à l’étranger.
Le trafic illicite de la faune sauvage implique fréquemment des organisations criminelles transnationales. La hausse des profits à chaque étape du processus de trafic rend cette activité attrayante pour ceux qui la pratiquent. L’étude a utilisé le cas de la Corée du Nord, qui vend des produits MTC contenant une quantité minuscule de corne de rhinocéros afin de contourner les sanctions internationales et réaliser des revenus en devises fortes.
Les chercheurs de la GI-TOC notent que la Corée du Nord utilise depuis de nombreuses années le trafic illicite de la faune sauvage pour produire des revenus. Une enquête des Nations unies suggère que les diplomates de Corée du Nord sont au cœur de la contrebande des cornes de rhinocéros et autres substances illicites de faune sauvage. Un diplomate est accusé d’essayer de trafiquer 65 millions de dollars en cornes de rhinocéros vers la Chine par le biais du Mozambique.
Les cornes de rhinocéros achetées auprès des trafiquants sont vendues sous le nom d’Angong Niuhuang Wan (ANW) avec une majoration de 30 à 40 fois la valeur des cornes originales.
Un seul kilo illicite de corne de rhinocéros trafiquée, acheté à un coût de 22.300 dollars au Vietnam, peut en fin de compte rapporter au pays jusqu’à 830.000 dollars de revenu dans les marchés chinois ou d’autres marchés asiatiques.
« Ceci fait de l’ANW un produit hautement profitable pour les trafiquants et renforce l’incitation à continuer à obtenir des sources d’approvisionnement des cornes de rhinocéros, écrivent les chercheurs de la GI-TOC. Le rôle de la Corée du Nord dans le trafic des cornes de rhinocéros aggrave une situation de défi de conservation en préoccupation de sécurité internationale. »
