Des gens se sont fait passer pour des recruteurs professionnels et ont promis des emplois lucratifs au Canada, mais leurs victimes se retrouvèrent bientôt détenues contre leur gré en Côte d’Ivoire et forcées d’attirer de nouvelles victimes dans le piège.
Au total, 33 ressortissants du Bénin, Burkina Faso, Ghana et Togo ont été induits à payer jusqu’à 9.000 dollars à de faux recruteurs dans une opération de traite humaine qualifiée de montage pyramidal par les enquêteurs. Les victimes ont été détenues dans des conditions abusives à Abidjan où les trafiquants les ont forcées à afficher sur les réseaux sociaux des photos d’elles dans des hôtels de luxe ou autres cadres prestigieux similaires pour attraper au piège d’autres personnes. Les trafiquants ont menti à leurs victimes en donnant des informations de contact au Canada et en limitant ce qu’elles pouvaient dire aux amis et à leur famille, selon les enquêteurs.
L’enquête conjointe du Ghana et de la Côte d’Ivoire a été coordonnée par Interpol et conduite par la police ivoirienne. Deux trafiquants ont été arrêtés.
Valdecy Urquiza, secrétaire général d’Interpol, a loué l’opération en la qualifiant de modèle pour les actions futures contre le trafic.
Il a déclaré : « Ce succès auquel ont participé la Côte d’Ivoire et le Ghana est un excellent exemple de l’importante de la coopération policière pour combattre les escroqueries liées à la traite humaine. À cause de leurs efforts conjoints, les victimes ont été secourues et les responsables seront maintenant traduits en justice. »
La traite humaine reste un fléau dans de nombreuses régions d’Afrique, et l’identité des victimes dépend de la région. En Afrique de l’Est, les hommes en sont fréquemment victimes. En Afrique australe, ce sont les femmes. En Afrique de l’Ouest, la plupart des victimes de la traite sont les enfants. L’Indice global du crime organisé classe la Côte d’Ivoire en 19ème place et le Ghana en 20ème place parmi les pays africains pour la traite humaine. Les deux pays ont fait des progrès dans la lutte contre la traite humaine en adoptant des lois qui l’interdisent à des fins d’emploi ou sexuelles, entre autres.
Au cours des dernières années, la Côte d’Ivoire a créé six unités de police chargées de réduire la traite humaine, avec un focus particulier sur le travail infantile forcé. Le Ghana a aussi créé une unité anti-traite humaine au sein de ses services de police, qui se concentre sur le type de stratagème de recrutement que les autorités ont démantelé à Abidjan, entre autres.
Malgré ces succès, les observateurs déclarent que les deux pays ont du travail à faire pour financer les efforts de mise en application de la loi, former les enquêteurs et soutenir les victimes.
« Bien que des améliorations soient visibles, davantage de financement et de ressources aideront à renforcer les efforts anti-trafic dans le pays », écrit l’analyste Raphaëlle Copin pour le Projet Borgen, organisation non gouvernementale (ONG) engagée à combattre la pauvreté extrême sur la planète.
Les enquêteurs ont pris connaissance du montage de recrutement ivoirien lorsqu’une victime ghanéenne s’est échappée en retournant chez elle dans sa famille. Interpol caractérise les montages pyramidaux basés sur l’emploi, comme celui découvert en Côte d’Ivoire, de menace croissante.
« Une fois pris au piège par les trafiquants, leurs documents personnels sont confisqués et ils sont souvent sujets à une gamme d’abus horribles, notamment le travail forcé, l’extorsion, la violence physique ou l’exploitation sexuelle », déclarent les autorités d’Interpol.
Le montage du recrutement a été accompagné de nombreux signes avant-coureurs définis par Interpol comme montages potentiels de traite humaine, notamment la demande d’un paiement immédiat et une offre qui semblait trop belle pour être vraie.
Youssouf Kouyate, directeur général de la Police nationale de Côte d’Ivoire, a déclaré que la coopération avec le Ghana et Interpol a démontré la puissance des partenariats régionaux. Il a aussi loué les victimes pour avoir parlé franchement.
« Je voudrais féliciter le courage des victimes qui se sont présentées pour assister cette investigation et réaffirmer notre engagement visant à poursuivre et démanteler les réseaux qui commettent ces crimes », a-t-il dit.