Dans une vidéo affichée sur les réseaux sociaux, un soldat soudanais tire un homme par la jambe qui est cassée dans un fossé à la périphérie de la ville d’Omdourman et l’achève. Ensuite, il utilise un long couteau pour couper la tête de l’homme alors que ses compagnons applaudissent.
Cette exécution et profanation font partie de plusieurs incidents dans lesquels des membres des Forces armées soudanaises (FAS) et leurs milices alliées sont accusées d’avoir commis des crimes de guerre, alors qu’ils s’engagent dans la reconquête du territoire anciennement saisi par leurs adversaires, le groupe paramilitaire des Forces de soutien rapide (FSR).
Après avoir reconquis Khartoum et Omdourman des mains des FSR en mars, les soldats soudanais et leurs milices alliées ont cherché les personnes originaires du Darfour et les Noubas, ainsi que les résidents sud-soudanais de Khartoum, et les ont tués, selon le Sudan War Monitor. Ces trois groupes avaient été accusés d’être liés aux FSR.
« Les crimes de guerre de ce type ont lieu depuis le début de la guerre, mais le nombre de victimes a augmenté récemment à mesure que de vastes territoires changent de main », ont récemment écrit les chercheurs du Monitor.
La décapitation à Omdourman était le deuxième acte de ce type commis par les soldats des FAS et vérifiés par les chercheurs du Monitor depuis le début de la guerre civile. En 2024, les soldats soudanais avaient décapité deux civils.
« Après cet incident, l’armée soudanaise a affirmé qu’elle allait conduire une enquête, mais aucune action ni arrestation ultérieure n’a été annoncée en rapport avec l’investigation », selon les chercheurs du Monitor. Depuis le début de la guerre au Soudan entre les FAS et les FSR, les deux belligérants ont été accusés maintes fois d’assassinat de civils, d’exécution des combattants capturés et de mutilation de cadavres, parmi d’autres crimes de guerre.
Dans bien des cas, les crimes ont été photographiés ou filmés et téléchargés sur les réseaux sociaux. Les chercheurs pensent que ces comptes-rendus publiés représentent seulement une petite portion de tous les crimes de guerre en cours. Dans une vidéo des FAS après la reconquête de Khartoum, les soldats ont exécuté un homme habillé en civil devant un café alors que certains spectateurs applaudissaient, selon le Monitor qui a utilisé la vidéo pour identifier le lieu de l’exécution.
Dans une autre vidéo, les soldats soudanais ont exécuté six captifs sur les rives du Nil dans une zone sans doute au Sud de Khartoum. Les plus récents crimes de guerre suivent un modèle qui remonte aux premiers jours de la guerre, qui s’est déclenchée le 15 avril 2023.
En juin 2024, le Monitor a publié un reportage selon lequel les soldats soudanais avaient tué trois combattants des FSR capturés. Ils ont mutilé leur cadavre et les ont jetés dans un canal de l’État de Sannar qui se déverse dans le Nil Bleu. Un agent influent proéminent des FAS sur les réseaux sociaux a affiché sur X que les combattants FSR serviraient de « nourriture pour les crocodiles ». Ses commentaires ont plus tard été supprimés.
En août 2024, Human Rights Watch (HRW) a signalé un incident selon lequel des soldats soudanais ont bandé les yeux de trois prisonniers torse nu qui semblaient être des enfants ; ils les ont poussé dans une fosse et leur ont tiré dessus maintes fois.
« Ils commettent des atrocités sans peur des conséquences », écrivent les chercheurs de HRW concernant les deux parties, dans leur rapport.
Le rapport HRW de 2024 note que les chercheurs ont analysé vingt vidéos et une photo remontant à 2023. Sur la plupart, la majorité des assassins et des victimes portaient des uniformes militaires. Dans quelques-unes, les victimes portaient des vêtements civils. Dans tous les documents, les victimes n’étaient pas armées.
Des incidents similaires se sont produits à Khartoum et dans les États d’Al-Jazirah, du Kordofan du Nord et du Kordofan du Sud ; ce sont tous des lieux où les combats se sont intensifiés à mesure que les forces nationales cherchent à reconquérir les zones conquises par les combattants FSR au début de la guerre.
Depuis que les forces nationales soudanaises ont reconquis Wad Madani, capitale de l’État d’Al-Jazirah, les soldats et les miliciens sont soupçonnés d’avoir tué au moins 200 personnes, notamment des prisonniers de guerre, des membres de l’ethnie des Kanabi et des ressortissants du Soudan du Sud. Les morts étaient des civils et des combattants.
Bien qu’il n’y ait pas eu de rapport de mutilation ou de profanation de ces cadavres, les chercheurs notent que de tels comportements sont devenus généralisés. Bien que les lois soudanaises n’interdisent pas la profanation des cadavres en période de guerre, le droit international l’interdit.
Les chercheurs du Monitor écrivent : « Malgré cela, le manque de respect pour les morts est devenu fréquent pendant la guerre, ce qui est troublant. Ces incidents suggèrent un mode plus vaste de non-respect pour les morts et de mutilation des cadavres, qui est devenu accepté et popularisé parmi les soldats de l’armée. »