Le président Hassan Sheikh Mohamoud de Somalie se rendait à l’aéroport international de Mogadiscio le 18 mars lorsque les militants chebabs lancèrent une attaque à la bombe contre son convoi.
M. Mohamoud est sorti indemne de l’attaque et a continué son voyage pour rejoindre les soldats qui se battaient en première ligne dans l’État de Hirshabelle, mais les militants ont tué au moins quatre civils près d’une zone hautement fortifiée de Mogadiscio.
« Avec l’unité de notre peuple et le soutien de nos partenaires internationaux, nous assurerons la paix et la stabilité durables pour la Somalie », a déclaré par la suite le ministère de l’Information du pays.
Cette attaque effrontée s’est produite huit jours après l’avertissement exprimé par Abdisalam Guled, ex-directeur adjoint de l’Agence nationale de renseignement et de sécurité (NISA) de Somalie, selon lequel les chebabs représentaient une menace croissante. Ils avaient aussi essayé d’assassiner M. Mohamoud lors de son premier mandat de président en 2014, lorsqu’ils avaient attaqué à la bombe un hôtel où il prononçait un discours.
M. Guled a déclaré sur le site web d’actualité somalien Hiiran Online que le groupe modifiait ses méthodes pour gagner la confiance du public tout en renforçant ses positions au centre et au Sud de la Somalie, en particulier dans Hirshabelle. Il a dit que les chebabs menacent la souveraineté de la Somalie et souhaitent établir leur propre autorité gouvernementale.
« Ils essaient de faire ce que le Taliban a fait en Afghanistan », a-t-il dit sur le site web. Il a aussi exhorté le gouvernement à assurer aux civils que ses efforts contre cette organisation terroriste liée à Al-Qaïda sont efficaces et continuels.
Adam Daud Ahmed, analyste de politique et sécurité dans la Corne de l’Afrique, a averti que les chebabs ne lancent plus d’attaques intermittentes ; ils capturent des localités stratégiques et se rapprochent de Mogadiscio.
Il écrit sur le site web d’actualité éthiopien Addis Standard : « Pendant des années, les chebabs étaient définis par leurs attaques féroces à la bombe et leurs assassinats, mais quelque chose a changé. Ce n’est plus simplement une insurrection terroriste ; c’est le début d’une alternative de gouvernement. »
Les chebabs mettent en application les lois islamiques, perçoivent des impôts et fournissent la sécurité dans les zones qu’ils contrôlent. Ils ne ciblent plus principalement les civils dans leurs efforts de capturer Mogadiscio. M. Ahmed déclare aussi que la corruption interne a affaibli les efforts antiterroriste des forces armées alors que le gouvernement est ravagé par des luttes pour le pouvoir et des querelles politiques internes.
« Si Mogadiscio est conquise, les conséquences se feront sentir bien au-delà des frontières de Somalie, écrit M. Ahmed. Le Kenya, qui est déjà victime des attaques meurtrières des chebabs, subira probablement une nouvelle vague de violence sur sa frontière du Nord. »
Le 23 mars, les insurgés ont attaqué une base au Nord-Est du Kenya, en faisant six tués et quatre blessés parmi les policiers. Aucun groupe n’a revendiqué la responsabilité de l’attaque mais Mohamed Mwabudzo, commissaire du comté de Garissa, a déclaré à la BBC que le style d’attaque suivait le modèle de raid des chebabs.
M. Mwabudzo a dit que le « style de guérilla » de l’attaque se conformait au « modèle de raids transfrontaliers [du groupe] visant à déstabiliser la région ».
« On soupçonne que la milice a utilisé divers armements pour s’emparer du camp. »
Malgré des revers importants au cours des dernières années, notamment la perte de territoire, les chebabs se sont révélés capables de s’adapter et de recruter de nouveaux combattants. Ils sont particulièrement létaux dans les zones rurales et sur les routes commerciales clés qui convergent vers Mogadiscio.
Les forces somaliennes ont enregistré récemment quelques succès contre le groupe. Le 21 mars, les frappes de l’Armée de l’air somalienne, en coordination avec NISA, ont fait 82 morts et 19 blessés parmi les terroristes chebabs dans la région de Shabeellaha Hoose.
« Ces opérations visant à neutraliser les terroristes ont été menées lorsque l’Agence nationale de renseignement et de sécurité a reçu des informations concernant un groupe de Kharidjites qui essayaient de nuire à la sécurité dans les zones de Sabii et Canoole », a déclaré NISA. « Kharidjites » est un qualificatif employé par le gouvernement somalien pour décrire les chebabs.
Les forces somaliennes ont lancé l’opération après des attaques conduites au petit matin par les chebabs près d’Afgooye, ville agricole stratégique à environ 30 km au Sud-Ouest de Mogadiscio. Les terroristes ont aussi lancé une attaque au mortier le 27 février, quelques heures après l’arrivée du Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed pour une visite diplomatique.
« Ceci montre que, même avec un maximum de sécurité, Mogadiscio est trop dangereuse pour les dirigeants étrangers », écrit M. Ahmed.